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La chapelle de Notre Dame de Piété
à Cadeilhan-Trachère
.[1]



Sceau
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"Au bas de la montagne et du pic de Lumière,
Que de ses feux naissants, le soleil dore, éclaire,
Est un petit hameau qu'on nomme Cadeilhan...
"


C'est à l'entrée de ce hameau que s'élève, auprès d'une fontaine renommée, la chapelle de Notre-Dame de Piété. La route d'Espagne passait jadis devant son seuil et les voyageurs allant et venant s'arrêtaient parfois pour faire une courte prière et jeter une obole à travers la grille en bois de chêne qui fermait la façade de l'édifice.

Cette chapelle fut érigée en 1654 à l'occasion de la peste qui décima la contrée et spécialement la paroisse de Cadeilhan-Trachère. Elle débuta le 22 mars 1653, à Trachère, en faisant de Jeanne Ferras, femme d'Armand Pessoulé, sa première victime. Le surlendemain, Armand mourait à son tour et trois autres membres de sa famille tombèrent les uns après les autres.

Le fléau se répandit, augmentant bientôt avec les premières chaleurs. Malgré le dévouement des médecins et des consuls, malgré le zèle que le curé Jean Mascarou et le vicaire Maître Tanouilhe déployèrent au chevet de tous les mourants, la mortalité atteignit des proportions effrayantes : du 8 décembre 1653 au 20 août 1654, en particulier, 44 décès furent enregistrés et une quarantaine de personnes étaient déjà mortes depuis le mois de mars. Le cimetière était trop petit pour recevoir tant de cadavres, on les enterrait partout, à côté des maisons et même dans les champs.

Il y eut des scènes tragiques que le Registre des décès rapporte. Ainsi, Dominique Peyrau mourut

"dans le cimetière ayant lui-mesme fait son sépulchre et emporté son suaire après avoir enterré sa belle-mère et cinq de ses enfants et demeuré trois jours dans ledit cimetière, attendant la mort, ayant été plus lost confessé, et ayant emporté sur soy l'argent pour faire couvrir son corps de terre... "

Au mois de Juin, la consternation était générale ; les survivants de Cadeilhan-Trachère tournèrent leurs regards vers le Ciel et firent le vœu d'élever une chapelle sous le vacable de Notre-Dame de Piété. La peste cessa.

Les habitants de Cadeilhan-Trachère s'engagèrent, par acte notarié à doter et entretenir la chapelle. Le 20 juillet 1654, les consuls et habitants

"faisant tant pour eux que pour le reste des habitants de la communauté de Cadeilhan-Trachère, lesquels, de leur bon gré et franche volonté, mus de dévotion et ayant à cet effet bâti la chapelle de Notre-Dame de Piété au dit lieu de Cadeilhan, à ce qu'il plut à Notre-Seigneur appaiser son courroux et délivrer du fléau de la peste, pour la donation de ladite chapelle, entretien et réparation d'icelle ont promis et promettent de bailhet annuellement et à perpétuité la somme de trois livres et plus si besoin est... "

Ils fondent, en outre, par le même acte, 4 messes à célébrer chaque année le second samedi des mois de mai, juin, juillet et août, à huit sous chacune.

Enfin, Jean Ferras, s'engageait, lui aussi, à fonder trois autres messes : deux de Notre-Dame et l'autre en l'honneur du glorieux Saint-Sébastien "chantables à perpétuité". La chapelle avait dès lors son entretien assuré.

Sitôt qu'elle fut achevée, elle devint un foyer de dévotion dans Cadeilhan-Trachère. Les fidèles venaient y prier souvent ; les fiancés y contracter mariage pour se placer sous la protection de la Sainte-Vierge : Jean Ferras, de Cadeilhan, et Marguerite de Benque y reçurent la bénédiction nuptiale le 26 novembre 1654. Aux fêtes, spécialement à celles de l'Assomption et de la Fête-Dieu, les paroissiens de Cadeilhan-Trachère s&appos;y rendaient en procession, après vêpres.

En 1712, fut placé le balustre en bois de chêne qui fermait la façade de l'ancienne chapelle.

Sous la Révolution, la chapelle eut beaucoup à souffrir car elle fut dépouillée de ses revenus et de ses meubles. De ceux-ci, il ne reste plus que le pupitre du missel.

Mais pendant le XIX e siècle, les libéralités des fidèles : Jean-Pierre Soubiran, chanoine Pène, abbé Sajous en particulier, servirent à la remettre en état.

La chapelle de Notre-Dame de Piété n'était éclairée que par une fenêtre bien étroite du côté de l'épitre. La voûte formée d'un simple lambris était ornée d'inscriptions peintes rappelant les figures de la Vierge. La façade avait un clocheton que surmontait un coq en fer battu. L'autel en maçonnerie était adossé au mur nord de la chapelle.

En 1891, l'abbé Jean-Baptiste Sajous prit possession de la cure de Vignec et Cadeilhan-Trachère, son annexe. Il songea, dans la suite, à démolir la vieille chapelle pour en reconstruire sur son emplacement une autre plus vaste et plus belle qui pourrait, à l'occasion, servir d'église. Il commença à réaliser son projet en 1909. Avec le concours des habitants de Cadeilhan-Trachère, il fit jeter à terre la chapelle, puis construire le gros œuvre de la nouvelle : murs, toit, parquet du sanctuaire. Au sanctuaire, il plaça un bel autel de Notre-Dame de Pitié. Mais l'abbé Sajous quitta la cure de Vignec en 1912.

Lorsque M. l'abbé Vidalon y fut nommé curé en 1927, la chapelle inachevée servait à remiser les outils agricoles du quartier.

Avec le concours des habitants de Cadeilhan-Trachère, M. l'abbé Vidalon termina la chapelle qui est devenue pour ce village un centre de dévotion mariale. Quand les femmes se rendent à la fontaine, elles ne manquent pas de saluer Notre-Dame de Pitié par quelques "je vous salue Marie" ou quelques invocations.

Il fit placer sur la façade de la chapelle une plaque en émail où figure cette poésie :

"Écoutez en deux mots, de cette humble chapelle
Si chère aux gens d'ici l'origine bien belle.
C'était aux temps lointains. Un terrible fléau
Semant partout la mort, ravageait ce hameau.
Nos aïeux, dans le Ciel, mettant leur espérance
A la Vierge Marie exposent leur souffrance :
Si vous nous secourez, Reine du Paradis.
Un temple en votre nom par nous sera bâti.
Souriant à leur foi, Marie esquisse un geste.
Aussitôt de ces lieux, on vit s'enfuir la peste.
L'amour reconnaissant accomplissant son vœu
Bâtit cette chapelle à la Mère de Dieu.
A l'époque moderne elle fut agrandie,
Enfin, en ce grand jour, au culte rétablie.
"

Cadeilhan, 25 mars 1930

Près de la porte, cette inscription invite le passant à rentrer dans la chapelle :

"Entre, gentil passant, dans cet auguste lieu,
Pour faire une prière à la Mère de Dieu.
Tu mettras dans le tronc une pieuse aumône.
Elle te le rendra cette Mère si bonne
."

A l'intérieur de la chapelle, se trouvent les statues du Sacré-Cœur, Sainte-Bernadette, Ste Jeanne-d'Arc, Ste Germaine et Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus.











Notes

[1] Source : Gallica.bnf.fr
Bibliothàque Nationale de France
Bulletin de la Société académique des Hautes-Pyrénées
Société académique des Hautes-Pyrénées - (1947-1949)


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© Marie-Pierre MANET







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