La monographie de 1887 d'Adé
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)




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I


La commune d'Adé est située entre la plaine et la montagne, à 12 km 700 en amont de Tarbes et à 5 kilomètres en aval de Lourdes, son chef-lieu de canton ; sa distance à Argelès, chef-lieu d'arrondissement est de 18 kilomètres. Elle est limitée à l'est par les collines qui la séparent des communes de Julos, d'Avéran, de Bénac et de Lanne ; à l'ouest par celles qui la séparent de Bartrés et d'Ossun. C'est le territoire de Lourdes qui la limite au sud. Au nord le territoire est terminé en pointe serrée par les territoires de Lanne et d'Ossun.

Le territoire d'Adé a 4.650 mètres dans sa plus grande longueur et 3.000 mètres dans sa plus grande largeur ; sa largeur moyenne est de 16 mètres et sa superficie de 7 km, 24 mètres. Le village est à l'altitude de 428 mètres ; les collines ont 590 mètres à l'est et 538 mètres à l'ouest. La partie cultivée du territoire forme un petit vallon qui débouche au nord, dans la grande plaine de Lanne-Maurine, la largeur de ce vallon ne dépasse pas 500 mètres. C'est le passage qu'on a nommé "Bouéit" (vide, trouée) des Maures : ce qui semble indiquer que les Maures, battus à Poitiers par Charles Martel, revinrent en nombre et furent battus de nouveau dans la plaine de Lanne-Maurine par les habitants du pays et que ceux qui restèrent passèrent par là.

Le sous-sol des collines de l'est est schisteux, et il n'y a pas plus de cent ans qu'on en extrayait l'ardoise. Une carrière de pierres à aiguiser, non exploitée maintenant, existe au Bois-Devant, colline de l'est. En face de cette carrière, au fond du ravin où coule le ruisseau Mouret, se trouve la pierre de Roland sur laquelle les habitants font remarquer les empreintes des quatre pieds du cheval de Rolland. Près du chemin qui conduit à la lande, du côté sud-est, on voit des pierres auxquelles on donne le nom de haillade (brûlées) mais on ne donne pas le motif de cette dénomination.

Le petit vallon cultivé est peu fertile : le sol est fait de sable mêlé à de grandes quantités de galets roulés. Dans presque toute l'étendue de ce vallon on trouve le sable à la profondeur moyenne de un mètre. Cela n'a rien de surprenant. En effet, le petit vallon, ainsi que l'indique M. E. Bulus, d'accord avec la configuration du sol, a été, au temps de sa formation, le lit d'un grand cours d'eau, du Gave de Lourdes peut-être ; lequel, après avoir formé la plaine de Lanne-Maurine, a corrodé le terrain et s'est creusé un lit plus profond en se dirigeant du côté de Louey où peut être il est allé rejoindre, pour un temps, son voisin l'Échez. Il a dû former pendant quelque temps des lacs entre Adé et Lourdes, avant de se diriger vers St Pé : les prairies marécageuses des alias, de Saux et de Monje en sont une preuve. Dans ses dernières inondations il a entassé à la limite sud du territoire d'Adé, quartier appelé Puyoles (petites côtes, des monticules de sable, de galets et de grosses pierres granitiques.

Le village d'Adé est bâti, en grande partie, sur un de ces monticules ; l'église en occupe la partie la plus élevée.

Le seul cours d'eau qui reste et qui mérite le nom de ruisseau est le Rieutor, qui descend des Granges, hameau de Julos ; il coule entre les bords distants de 0 mètre 50 au sud et de 2 mètre au nord. En hiver il coule souvent à pleins bords ; mais en été il baisse au point de n'être plus qu'un filet d'eau, pendant les fortes chaleurs il est à sec. Il reçoit au centre du village le petit ruisseau des Alias et au nord du village le ruisseau de la Gèoüne ou Genne qui descend du village de Bartrès. Si le Rieutor était curé, les inondations ne seraient pas à craindre. Le petit ruisseau dit du Pied-de la Cote et des Arpens coule au bas des collines de l'est ; il est formé des eaux qui découlent de ces collines en assez petite quantité. En été, il est toujours à sec, sauf quand il pleut. Le ruisseau Mouret sert de limite entre le territoire d'Adé et ceux d'Avéran et Bénac.

Adé a été autrefois, dit-on, un poste romain : un château s'élevait sur le tertre occupé aujourd'hui par l'église. Les eaux sont toutes potables : celles qu'on emploie pour la cuisine sont fournies par les puits des particuliers et par quatre fontaines d'un débit assez faible. En été le débit diminue des trois quarts.

Le village d'Adé est à l'altitude de 428 mètres ; au nord du territoire (chemin d'Ossun) elle est de 379. Les collines du levant ont 590 mètres d'altitude et va en diminuant vers le nord ; celle du couchant a 538 mètres et se termine à la plaine de Lanne Maurine à l'altitude de 430 mètres (Pourrède). Le climat est tempéré ; les vents du sud-ouest y amènent les pluies qui y sont assez fréquentes ; la température y est froide en hiver, bien chaude en été, mais le pays est très salubre.



II


La population d'Adé, d'après le recensement de 1886, est de 504 habitants. Ce chiffre était de 688 en 1853 ; depuis lors il diminue toujours. Il y a peu d'industries ; le commerce y a trop peu d'importance, et la population est essentiellement agricole ; mais l'agriculture est aujourd'hui impuissante à nourrir tous les habitants ; et plusieurs nombreuses familles d'ouvriers ont déguerpi. La jeunesse s'en va chercher ailleurs ses moyens d'existence ; les uns entrent en apprentissage, les autres en service ; mais peu retournent au village.

La commune forme une agglomération de 110 maisons comprenant 117 feux : elle est divisée en deux parties :
Marque-Dessus, 46 maisons, 51 feux et 221 habitants ;
Marque-Débat, 64 maisons, 66 feux et 283 habitants.

La municipalité d'Adé est composée du Maire, d'un adjoint et d'un Conseil municipal composé de douze membres. Il n'y a de fonctionnaires municipaux que le secrétaire de la mairie et le valet commun qui est aussi garde-champêtre, fossoyeur et cantonnier communal.

La paroisse d'Adé fut érigée en archiprêtré en 1340 ; et fit partie, avec Ibos, Pontacq et Angles de l'archidiaconé d'Angles. Elle est actuellement desservie par un desservant à résidence. Le vicaire d'Adé fait le service à Bartrès où il réside.

Adé fait partie de la perception de Lourdes ; il est également desservi par le bureau de poste et le télégraphe de Lourdes. La valeur du centime est de 21f55.

Les principaux revenus ordinaires de la commune sont le produit d'une coupe affouagère et d'une coupe ordinaire de futaie, ainsi que le prix de terme de chasse sur les biens communaux. Il y avait encore le produit de la taxe de bacades ; mais les bacades sont supprimés ; il faut y ajouter la part de la commune dans les contributions ordinaires et le secours que la commune reçoit de l' État pour l'instruction primaire.



III


Sur les 420 hectares cultivés, la moitié environ est employée à la culture des céréales et des plantes racines, l'autre moitié aux prairies naturelles et artificielles.

Les principales céréales cultivées sont le froment et le maïs, puis vient la pomme de terre. La culture des autres céréales et du lin est sans importance. On fait grand usage, pour l'alimentation, du maïs dont la farine, grillée le matin, non grillé le soir, est convertie en pâte ; on ne mêle cependant presque plus cette farine à celle du froment pour faire le pain, comme cela se pratiquait autrefois. Le cochon engraissé par la ménagère et salé est à peu près la seule viande en usage.

Le sol, avons-nous dit, est sablonneux et pierreux, aussi le rendement est peu élevé : la moyenne est de 10 hectolitres de froment à l'hectare et de 16 hectolitres de maïs à l'ha.

Les procédés de culture sont en progrès ; à l'arèt (sorte de charrue à deux versoirs non contournés) on a substitué la charrue en fer qui défonce mieux le terrain. Un nouvel instrument fabriqué sur nos indications, l'arrasclet (petite herse) sorte de houe à cheval de forme triangulaire, avec 3,5 ou 7 pointes longues et tranchantes comme des coutres, sert à trancher la terre entre les rangées de maïs avant d'y passer le razerot à soc tranchant, droit et large en forme d'hirondelle aux ailes déployées. La batteuse mue par un manège qui font tourner des bestiaux a remplacé, pour le plus grand nombre le fléau. Les terres sont en général bien cultivées et bien fumées. On commence à faire des essais d'engrais organiques.

La forêt, divisée en deux massifs, appartient à la commune. Elle est assise sur les collines qui limitent le territoire à l'est et à l'ouest ; l'essence du bois est le chêne. Cette forêt est soumise au régime forestier. Le Bois-Devant (190 hectares) est traité en futaie et aménagé en cinq affectations de 18 coupes chacune ; il doit être régénéré dans une période de 90 ans. Il donne chaque année une coupe de 208 mètres cubes dont 104 mètres cubes forment la réserve ; les 104 mètres cubes restant forment la coupe ordinaire dont le produit moyen annuel est de 1000 francs. Le Bois-Darré (102 ha) à l'ouest, est traité en taillis sous futaie et divisé en 15 coupes affouagères de 4 ha 08 chacune. Une de ces coupes est délivrée chaque année aux habitants qui paient une somme totale variant de 1.400 francs à 2.000 francs.

Il n'y a pas plus de 4 hectares plantés en vigne. Le philoxera n'a pas encore atteint la vigne, mais le mildiou y fait des ravages.

Les espèces d'animaux qu'on élève à Adé sont : l'espèce bovine (race de Lourdes), l'espèce chevaline et l'espèce ovine : celle-ci a diminué de plus de moitié. On élève quelques chevaux pour la remonte, mais plus généralement des mulets. La vache, qu'on emploie à tous les travaux de l'agriculture, est soignée pour son lait, mais surtout pour la production de veau gras.

Il n'y a à Adé qu'une petite usine à huile presque insignifiante et quatre moulins chomant à un et à deux volants, mais qui ne fonctionnent que pendant la saison d'hiver.

Les voies de communication sont nombreuses à Adé : d'abord la route nationale nº21 de Paris à Barèges, puis vient le chemin de grande communication nº8, d'Adé à Oursbelille passant par Ossun ; le chemin d'intérêt commun nº24 de Peyrouse à Momères, et enfin les quatre chemins vicinaux ordinaires qui retient Adé à Lanne, à Ossun, à Saux-Lourdes et à la halte dite d'Adé. Le chemin de fer de Toulouse à Bayonne traverse, du nord au sud, le territoire d'Adé. Il a été construit de 1863 à 1865. La construction de la route nationale remonte à plus de cent ans ; ainsi que le chemin de grande communication nº8. Le chemin d'intérêt commun remonte à 1866. Une rectification a été faite en 1850, à la route nationale pour la transporter à l'est du village et éviter la côte du centre de ce village.

Adé communique au moyen de la route nationale avec les chefs-lieux du canton d'arrondissement et du département. Les transports se font par des voitures particulières et par le chemin de fer qui dessert la petite halte d'Adé. Il est à remarquer que l'emplacement de cette halte est des plus mal choisis : elle est dans un lieu tout à fait isolé sur le territoire de Lourdes, à 1.500 mètres au sud du village d'Adé. Elle oblige les voyageurs d'Adé ainsi que ceux de Bartrès, de Loubajac et de Poueyferré qui arrivent à Adé par le chemin d'intérêt commun nº24 qui relie toutes ces communes à Adé, à remonter vers Lourdes pour aller joindre la halte, et à dépasser le but, au retour de Tarbes, pour revenir sur le chemin d'intérêt commun. Le meilleur emplacement serait au nord du pont établi sur la voie ferrée pour le dit chemin d'intérêt commun. Le chemin, dans cet endroit est à nouveau du sol environnant.

Le principal objet du commerce est le bétail, les volailles, les produits de l'agriculture, le bois de construction et le chauffage.

Il y a à Adé un marchand de bois de construction qui fait d'importantes affaires, un marchand de vin en gros, un marchand drapier, deux épiciers, trois aubergistes.

Les mesures locales sont le quart de l'hectolitre ou 25 litres appelé cartère ; la moitié de la cartère (12,5 l) ou coupet la livre petit poids est de 4 hectogrammes et la livre grand poids est de 5 hectogrammes ; le quintal est de 50 kilogrammes. Le journal de terre est de 18 ares 76.

Les mesures métriques sont les seules en usage.



IV


On dit que Adé signifie (en grec) chant. Le patois est l'idiome du pays. Les mœurs sont bonnes à Adé. Le culte catholique est seul en usage. Le costume pour l'homme est le pantalon d'étoffe légère ou de cadix, tissus grossiers fabriqués avec la laine du pays, gilet et veston également en laine du pays, quelquefois en drap, ou bien la blouse courte de coutil. Pour le gros travail l'homme porte quelquefois la camisole qui descend au dessous du genou. La femme porte le dimanche la robe longue mais non traînante, avec le caraco ; en été une simple jupe et un caraco léger lui suffisent pour le travail. Elle se coiffe d'un mouchoir en couleur qu'elle retrousse sur le derrière de la tête ; tandis que l'homme porte le béret et assez peu le chapeau, la femme ne porte jamais le chapeau. Tout le monde chausse les pieds dans des sabots : en été et surtout le dimanche on porte les souliers, les bottines, les brodequins ; pour le travail les sandales.

Le seul monument important de la commune est l'église, nouvellement construite. Elle est dans le style ogival, à trois nefs, une grande et deux petites latérales. Le clocher, haut de 31 mètres est surtout remarquable par sa flèche toute en pierre de Lourdes et ornée de clochetons. Dix vitraux à sujets surmontés de cinq rosaux ornent le chœur, six, la grande nef et 7 autres les bas côtés. Un médaillon surmonte la porte latérale et une riche grisaille complète cette décoration au clocher.

En creusant les fouilles de la nouvelle église on découvrit les excavations contiguës, en forme de poires, ayant environ trois mètres de hauteur et plus de 2 mètres 80 de largeur à la base. On découvrit aussi à près de trois mètres de profondeur, des tombes faites avec des moellons taillés du pays et qui enchâssaient le corps très exactement. On y a également trouvé des coquilles provenant sans doute de quelque pèlerin de St Jacques de Compostelle. Une petite chapelle située au nord du village et que l'on reconstruit en ce moment, aurait été bâtie en 1006 : ce millésime a été trouvé gravé sur une des pierres du seuil de la porte. Elle est désignée sous le nom de chapelle du Rosaire.

Avant 1789 ou 1792 le communauté d'Adé était administrée par quatre consuls qu'on élisait tous les ans. C'étaient eux qui mettaient en terme les carrières d'ardoise, qui percevaient les revenus et payaient les employés ; la régen (instituteur) et le valet commun. Ils rendaient leurs comptes tous les ans à la communauté qui les déclarait libérés par un reçu transcrit sur un registre, ou inscrivait les sommes à rembourser.

Vers 1792 aux consuls succédaient les Agents Municipaux et les Conseils Généraux ; puis viennent les Maires et les Adjoints avec les Conseils Municipaux.. On ne connaît rien d'intéressant à signaler sur la municipalité.

La commune d'Adé a suivi les destinés du Comté de Bigorre dont il faisait partie : ainsi, dans l'enquête sur les revenus de la Bigorre faite par ordre de Philippe le Bel en 1300, Adé était compris dans la viguerie de Tarbes. Ce village appartenait au roi de Navarre, Comte de Bigorre lorsque, sous le règne de Catherine, reine de Navarre et Comtesse de Bigorre, arriva le fait suivant :

"Bernard et Lancelor de Castelnau, seigneurs de Laloubère, possédaient un fief à Soubaignan, situé auprès de Vic-Bigorre, à l'occident du lit de la Rivière de l'Adour, sur le chemin de Vic à Rabastens. Il n'y avait que le château sur un tertre et le moulin, et pas d'habitants. Ceux qui menaient les bestiaux au marché de Rabastens étaient arrêtés, et s'ils ne payaient pas ce qu'on leur demandait, on coupait les jarrets du bétail. On fit si souvent en sorte d'avaries aux habitants de Vic, qu'ils se plaignirent vivement à Catherine, Reine de Navarre, Comtesse de Bigorre. Elle convient avec eux d'échanger quelques terres de son domaine avec Soubaignac, et que les habitants de Vic lui paieraient les mêmes droits qu'elle percevait pour les terres qu'elle baillerait en échange à Lancelot de Caselnau. Elle lui a cédé Adé et Saulx. Ce fut durant le cours le ce procès que Lancelot fit faire l'enquête qui suit devant le commissaire du Parlement" Dictionnaire Larcher cité par l'abbé Dufau dans son histoire sur la Bigorre chez M. Lavieu à Tarbes. Mais la Comtesse en livra à Castelnau que la basse-justice, réservant pour elle la haute justice.

En 1599, les habitants d'Adé firent une reconnaissance à Etienne 1 er et à Etienne II de Castelnau. Plus tard, le seigneur de Palaminy devenu acquéreur des biens de Castelnau à Laloubère, intenta un procès pour se faire payer une censine telle qu'elle était arrêtée dans le censier de Bigorre de 1429 dressé par ordre de Philippe le Bel. Mais par un arrêt rendu en 1628, il fut décidé qu'il fallait s'en tenir à la reconnaissance de 1599. Et les habitants d'Adé ont payé annuellement 39 livres 10 sols. Les droits seigneuriaux consistent dans la dite censive, dans le droit d'œillade de trois en trois ans, un payant deux cessants, celui qui a dix brebis ou plus en présente trois au seigneur ou à son procureur, lequel en choisit une. Le parsan d'Adé dit des Arpens et celui dit de las Cazaleret contiennent cent trente journaux et demi ; doivent au seigneur, à raison de deux liares et demi par journal...4 livres 17 sous et 10 deniers et demi. Plusieurs habitants tenaient des terres à fiefs pour lesquelles ils payaient des redevances en monnaie et deux paires de chapons du prix de 20 sols une à St André et l'autre à Quasimodo.

Les archives d'Adé sont assez peu connues. Difficiles à déchiffrer, quelques uns de ces écrits sont en langue romane, fortement mêlée de mots patois. Un vieux parchemin de 5 à 6 mètres de long, contient l'échange d'une montagne près de Gazost que la Communauté d'Adé donna au seigneur d'Ossun. Ce droit s'exerce encore de nos jours.

Feu M. Durier, archiviste départemental, qui a visité les archives vers 1884, trouva 1.400 pièces intéressantes qu'il désirait faire transporter à la préfecture. Le Conseil Municipal se refusa à les livrer.

On dit que M. Fourcade, curé de Lannemezan et qui a occupé pendant quelque temps le poste d'Adé, prépare une histoire de la paroisse d'Adé, éditée chez M. Larrieu, imprimeur à Tarbes.



Annexe au titre IV : Enseignement


L'histoire de l'enseignement remonte, pour Adé à l'année 1738. Le premier régent dont le nom s'est conservé et qui a exercé de 1738 à 1753 est le nommé Bernard Claveran, natif d'Adé : il apprenait à lire et à écrire ; il était payé par les parents et par la communauté qui lui donnait dix livres pour ses gages. En 1740, il reçoit 26 livres ; en 1743, 30 livres. En 1752, il reçoit 30 livres et deux sous six deniers pour répondre aux messes pendant une année. Il quitte l'enseignement en 1753 et se fait ardoisier. Carassus Guilhaume d'Azereix le remplace le 27 octobre 1755. Il s'engage pour la somme annuelle de 50 livres, deux chars de bois le paiement des écoliers et autres droits du régent suivant la coutume. Il fera deux écoles par jour et toutes les écritures et répartitions nécessaires. Mais l'année d'après on lui retire le bois et il quitte en 1756. En 1759 Antoine Fabas d'Arcizac-Adour s'installe pour le mois d'avril seulement et part le 3 mai. Laffont François de Béarn vient et part dans la même année 1759, Fourcade lui succède et reste pendant deux ans et puis s'en va. Il est à remarquer que tous ces régents sauf Claveran, sont étrangers à la commune : ils ne peuvent rester à Adé qui sans doute leur donne un traitement insuffisant. Aussi faut-il en revenir aux régents natifs du village. Voici le régent qui ne s'en ira pas : c'est Borie Bernard qui s'engage le 8 janvier 1763 et ne quitte son poste qu'en 1801. Son traitement de régent et de secrétaire est d'abord de 40 livres ; puis de 46 livres en 1777. Le 9 janvier 1778, on divise ce traitement ; on lui donne 20 livres comme secrétaire et 30 livres comme régent, total 50 livres. Ce chiffre s'élève par degrés à 60 livres en 1788, à la veille de la Révolution.

En 1795, l'école primaire est supprimée. Borie Bernard continue ses fonctions comme instituteur particulier aux conditions suivantes : il lui sera payé par élève, une mesure de (carron) méteil beau et marchand, dix sous par élève qui écrive, et en outre 60 livres valeur métallique suivant l'usage. Il recevra les élèves indigents, la commune lui paiera leur rétribution. On le charge du soin de l'horloge. En 1798, on ajoute que les écoliers qui ne pourront écrire à l'école du soir écriront à celle du matin. Il disparaît en 1801. Bordenave Mathieu d'Adé, lui succède comme instituteur communal. Vergez François est instituteur particulier. Les écoles sont mixtes quant au sexe. Mathieu Bordenave fera deux écoles de trois heures chacune par jour, sauf le jeudi. Il a promis d'apprendre aux écoliers, à lire, à écrire, à faire la prière et le catéchisme. Il lui sera payé une mesure de seigle ( c'est méteil qu'il faut dire) par élève et un franc en sus par élève qui écrit. La commune lui donnera 40 francs. En l'An XI, la commune donne 60 francs. Ce traitement est celui de secrétaire de la mairie et d'instituteur. Mais, forcée de fournir un logement ou une indemnité à l'instituteur, la commune d'accord avec lui, fait passer ces 60 francs comme indemnité de logement... Le 30 janvier 1808, le traitement de 60 francs est ramené à 50 francs ; mais chaque élève qui écrira paiera 1 franc 50 au lieu de 1 franc. En outre, la père de famille qui aura trois enfants d'âge scolaire pourra les substituer les uns aux autres et ne payer que pour deux. L'instituteur fera deux fois par semaine le catéchisme aux enfants, la prière à la fin de l'école, le service aux offices divins, le chant se fera à la tribune suivant les anciens usages. L'année suivante, on lui impose de faire trois fois le catéchisme par semaine, d'enseigner les prières du matin et du soir. On lui paie 60 francs pour son logement, le service divin et le chant.

En 1817 en exécution d'une circulaire préfectorale qui avait pour objet de connaître le nombre d'élèves à établir dans chaque commune et faire fixer le traitement de l'instituteur, la commune déclara qu'une école primaire suffisait, et fixa le traitement à une prime de chars de bois fournis par la commune, deux décalitres et demi de méteil par élève qui n'écrit pas et deux francs en sus par élève qui apprend l'écriture et le calcul. Avec cela, dit le Conseil, le traitement de l'instituteur sera de 300 francs ce qui lui a paru raisonnable. Bordenave Mathieu cesse ses fonctions en 1820. Il est remplacé par Boyé Jean qui ne reste que deux ans environ.

C'est ici que se place la séparation des sexes.

Pour faire droit à une lettre de M. le Sous-Préfet, les sexes sont séparés. Capdevielle Pierre, muni du brevet du 3 ème degré, est autorisé par M. Jourdan, recteur de l'académie de Pau, et M. Jahan préfet, à faire l'éducation des filles. En 1828, une institutrice libre, Fourcade Louise d'Odos, s'établit pour quelques mois seulement à Adé.

Le 24 novembre 1828, Bordenave Bernard, muni du brevet de capacité est autorisé par M. le Recteur de Pau, à exercer les fonctions d'instituteur à Adé ; il fait d'abord l'école aux garçons, puis aux filles seules. Le 8 mai 1830 est agréé et installé comme instituteur chargé seulement de l'école des garçons, le sieur Bourg Pierre, né à Adé. Dans le procés-verbal d'installation du premier janvier 1831, le Conseil Municipal s'engage à soutenir et à favoriser en tout et partout le sus dit Burg comme instituteur communal. Il a le brevet du 2 ème degré. En vertu de l'ordonnance royale du 14 février 1830, la commune devait faire en traitement fixe de 200 francs à l'instituteur avec ses revenus ordinaires et au besoin au moyen d'une imposition extraordinaire ; mais il fut convenu que les 200 francs lui seraient payés par les élèves. Chaque élève continua de payer une mesure (25 l) de méteil évaluée 3 francs et chaque élève qui écrivait payait deux francs en plus. La loi du 28 juin 1833 trouve cet instituteur en fonction. Il lui garantit un traitement fixe de 200 francs ; il continue à percevoir la rétribution payée par les élèves. Sa situation s'améliore, mais aussi sa charge devient plus lourde. Le programme s'élargit avec la loi de 1833 : ce n'est plus la lecture et l'écriture seulement qu'on enseigne comme autrefois , mais en outre les éléments de la langue française et du calcul, le système légal des poids et mesures. C'est le programme que l'on suivra jusqu'à la loi de 1867. De plus les écoles sont plus et mieux fréquentées à mesure que le besoin d'instruction se fait sentir, et le nombre des illettrés diminue.

Revenons un instant à l'école des filles :

A Bordenave Bernard succède la nommée Marie Dupont comme institutrice pour les filles. Son installation a lieu le 5 décembre 1830. Elle enseigna la lecture, le calcul, l'écriture, le catéchisme et les prières d'usage, enfin elle prodiguera tous ses soins aux enfants, et ce moyennant la rétribution d'une mesure pleine de méteil et dix sous en argent. Elle se paiera en outre le local où elle fera l'école. Il n'est pas possible de préciser le temps pendant lequel elle a exercé. Après elle, Fontan Laurence d'Adé, non pourvue de titre mais fortement soutenue par le clergé exerce les fonctions d'institutrice jusqu'en 1846. Elle apprend seulement à lire et à écrire, le catéchisme et les prières.

Enfin en 1846, Melle Dupas Jeanne-Marie, native d'Adé, qui vient d'obtenir son brevet élémentaire, s'installe comme institutrice libre d'abord ; mais elle reçoit un traitement communal pour les élèves indigentes. La commune paie le loyer de la maison d'école jusqu'en 1850 époque où son école est installée dans une des salles de la maison commune nouvellement construite. Elle est reconnue institutrice communale en 1864, et c'est elle qui exerce encore à Adé en 1887.

M. Burg est resté en fonction d'instituteur jusqu'en 1856. Se sentant alors fatigué il demanda et obtint un congé qui fut renouvelé ; enfin il se retira définitivement en 1856.

Son neveu Burg Pierre, né aussi à Adé, élève sortant de l'École Normale de Tarbes, pourvu du brevet facultatif comprenant toutes les matières de l'article 23 de la loi du 15 mars 1850 sauf le dessin et la gymnastique, fut d'abord nommé suppléant intérimaire, puis suppléant et enfin titulaire le 8 septembre 1859. C'est lui qui occupe aujourd'hui le poste d'Adé.

Des renseignements recueillis sur l'état de l'instruction primaire avant 1789 et après il résulte qu'en 1690 sur quatre actes de mariage constatés aucun des époux n'a signé. En 1788 sur cinq actes de mariage, les 5 époux signent et non les épouses. En 1789, sur les 4 actes, 4 époux et 3 épouses signent. En 1827, sur 7 mariages, 5 époux signent et pas une épouse. En 1876, sur trois actes les 3 époux et les 3 épouses signent.

La maison commune d'Adé dans laquelle se trouvent les écoles a été construite en 1849. Elle est à toutes les expositions si ce n'est celle de l'est. Elle a la forme d'un rectangle de 15 mètres de long et 7 mètres de large. Elle est à un 1 er étage avec grenier. Le rez-de-chaussée est partagée en deux salles à peu près carrées de 6 mètres de côté chacune, séparées par un corridor de deux mètres. La salle du levant est affectée à l'école des filles ; elle est éclairée par deux fenêtres et une porte vitrée ; une petite porte au nord-est livre passage pour aller aux latrines.

L'école des garçons est dans la salle de l'ouest. Elle est éclairée par 5 ouvertures dont deux s'ouvrent au couchant sur la rue centrale du village, deux autres, au sud, s'ouvrent sur la cour du sud non fermée, la 5 ème au nord s'ouvre sur la cour du nord. La porte d'entrée est au milieu de la cloison qui sépare l'école du corridor. Dans ce corridor, il y a deux grandes portes qui s'ouvrent l'une dans la sus dite cour du sud, l'autre dans celle du nord. Les latrines sont dans la cour du nord. La salle d'école des filles a été réparée assez récemment, le mobilier a été augmenté. La salle d'école des garçons devrait être réparée. Le bruit qui se fait sur la rue centrale et la cour du sud devenue place publique, distrait les élèves à l'école. Le mobilier attend une transformation complète. Le 1 er étage est également partagé en deux salles correspondantes à celles du rez-de-chaussée ; on y arrive par l'escalier étroit qui va du rez-de-chaussée au grenier. Il est établi dans le corridor. La salle de la mairie est sur l'école des garçons ; l'autre salle n'a pas de destination. Dans la pensée des auteurs de cette construction, la salle d'école des filles et la salle du 1 et étage qui lui correspond étaient destinées au logement de l'instituteur. Mais l'instituteur se trouvant, en 1850, logé chez lui, et la commune n'ayant pas de local pour l'école des filles, on installe celle-ci dans la salle destinée au logement de l'instituteur ; et depuis lors rien n'a été changé. Il faudrait nécessairement construire une maison d'école de filles dans laquelle on ferait le logement de l'institutrice. On peut donc conclure que les besoins scolaires ne sont qu'à demi satisfaits.

L'école n'est pas régulièrement fréquentée surtout en été. Les programmes y sont appliqués dans la limite du possible ; mais les enfant quittent jeunes l'école pour les travaux agricoles ou pour les études classiques. Cependant il n'y a pas de conscrits illettrés et les élèves sortants emportent en général, des connaissances suffisantes. Il n'y a pas de caisse des écoles mais le conseil inscrit chaque année au budget une somme pour fournitures classiques à faire aux élèves indigents. On espére posséder bientôt une bibliothèque scolaire. Le traitement de l'instituteur est de 1.300 francs, celui se l'institutrice de 1.100 francs, la commune paie à l'instituteur une indemnité de logement.

Nous avons indiquer plus haut les améliorations à réaliser : Réfection et augmentation du mobilier scolaire (école des garçons, achat de l'armoire bibliothèque - réparations à l'école des garçons - Construction d'une école de filles.

Nous estimons qu'une somme de 25.000 francs serait nécessaire pour réaliser ces améliorations.




L'instituteur d'Adé.

Pierre BURG







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[Commune d'Adé.]
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Chacun peut apporter son aide concernant les monographies de 1887 des communes
de la Bigorre devenue Hautes-Pyrénées.
© Marie-Pierre MANET








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