La monographie de 1887 d'Ibos
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)




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de Marie-Pierre Manet








I


Ibos est un bourg des Hautes-Pyrénées, dans le canton nord de Tarbes, à l'occident de cette ville dont elle est voisine, n'en étant séparé que par une distance de six kilomètres, et sur la route nationale de Tarbes à Pau.

Il a pour limites :
- Au nord, les territoires d'Oroix, de Pintac et de Bordères;
- A l'est, celui de Tarbes ;
- Au midi, ceux de Juillan, d'Azereix et d' Ossun :
- Et à l'ouest, celui de Ger, en Béan.

La plaine d'Ibos a été creusée par les eaux réunies de l'Adour, de l'Échez et du Gave ; ce dernier, depuis, s'est jeté dans les Basses-Pyrénées en se détournant à la hauteur de Lourdes : (fracture dite de Peyrouse).

Le fond est une argile recouverte d'environ dix mètres de graviers ; et cette couche augmente en remontant sur l'ancien lit du Gave, jusquà Adé, ancienne moraine du glacier, où elle atteint le maximum de vingt-trois mètres.

Ibos est un lieu d'habitation relativement récent. Pendant les périodes successives de formation et de fonte des glaciers, cette plaine, continuellement ravagée par les irruptions périodiques des eaux, n'éait recouverte que de sable et ne permettait aune installation.

Les habitaient à deux kilomètres à l'ouest, sur le plateau, à une altitude supérieure, d'environ quatre-vingts dix mètres, où l'on trouve encore des milliers de tumulus, vraies nécropole des habitants de ces hauteurs.

Le territoire d'Ibos, dont l'étendue est de trois mille six cent cinquante cinq hectares, et le périmètre d'environ trente kilomètres, se trouve partagé par le coteau de Ger, que le parcourt du nord au sud, en deux parties à peu près d'égale étendue. L'une, qui s'étend du coteau jusque vers l'Échez, est une belle et riche plaine, faisant suite à celle d'Ossun, et se prolongeant au-delà de Maubourguet, dont le col, très uni n'offre qu'une légère dépression, à l'orient, à la petite pente du Pouy, qui soude la plaine d'Ibos à celle de Tarbes, la seconde, d'aspect plus sauvage, comprend le coteau lui-même, couvert de châtaigneraies, de vignes et de forêts et un vaste plateau profondément coupé au nord de la route de Pau, par le vallon de la Géline, et formé d'une immense étendue de landes stériles qui vont d'Ossun à Oroix et à Pintac.

Du côté des coteaux on jouit d'une vue spendide et nos pieds se déroulent : cette riche plaine d'où émerge le bourg d'Ibos, très bien bâti, avec son èglise monumentale ; la plaine de l'Adour, depuis la vallée de Campan, par delà laquelle on aperçoit la Maladetta, jusqu'à la plaine de l'Armagnac, avec ses villes et ses nombreux villages ; le vallon de Bénac, s'ouvrant vers Lourdes pour joindre la vallée du Gave, et flanqué de collines qui s'élèvent en amphithéâtre jusqu'aux plus hauts puis des Pyrénées ; et enfin, au delà de l'Adour, les coteaux de Gascogne, naguère si vineux et si riches. Puis, sur le coteau, de belles forêts ; et vers le Béarn, les landes stériles dont une partie sert de champ à tir à l'artillerie ; et une autre partie, de piste d'entraînement pour les chevaux de course.

Sans parler de la rivière de l'Échez, qui ne fait que le traverser sur une petite étendue, vers le sud-est, trois petits cours d'eau arrosent ce vaste territoire : la Géline, profondément encaissée au fond d'un froid vallon, descend du plateau d'Azereix et va se jeter à l'Échez, à Saint-Lézer ; le Souy, anciennement Ossoy (d'où Osoun), qui descend du plateau d'Ossun, traverse sa vaste forêt, longe la colline, arrose les pprairies du bas du coteau et traverse les futaiens d'Ibos et de Bordères, avant de se ré,unir à l'Échez, à Oursbelille ; enfin le Marding, à sec une trop grande partie de l'année, descend du bassin d'Ossun, s'alimente de nombreuses sources sur le territoire d'Azereix, arrose de fertiles prairies sur celui d'Ibos, et va se perdre dans le Souy.

Nous ne parterons pas, à cause de leur peu d'importance, du ruisseau du Rieutort, qui coule à travers la forêt du sud et se jette dans le Souy, ni de celui de Garonnères qui, prenant sa source sur le territoire d'Ibos près de celui de Tarbes, reçoit les eaux de quelques fontaines et se jette dans l'Échez, sur le beau domaine du château d'Urac.

Tous ces cours d'eau sont alimentés en partie par les eaux de pluies : aussi leur débit varie-t-il selon que les saisons sont plus ou moins humides et passent-ils de l'état de torrents impétieux à celui de simples filets d'eau, pour rester, durant une bonne partie de l'été, tout à fait à sec.

Ces ruisseaux sont insuffisants à l'arrosement d'une plaine telle que celle de l'Ibos : aussi, ici longtemps, a-t-on souhaité voir s'établir le canal de déviation du Gave, lequel prendait les eaux de ce petit fleuve en amont de Lourdes et le conduirait à travers la plaine d'Ossun et d'Ibos jusqu'à Maubourguet. Tout le monde rend justice aux efforts de M. le Sénateur Dupré qui, par sa persévérance à poursuivre la réalisation de cet important et utile projet, l'a fait pour ainsi dire seul. Mais il est à craindre que la génération actuelle ne le voit pas s'accomplir.

Il n'existe donc, en fait de canaux que les rigoles plus ou moins importantes dont les propriétaires ont entrecoupé leurs prairies avec une intelligence et une économie digne de tous éloges.

Si la commune d'Ibos a été mal partagée sous le rapport des cours d'eau, elle a été plus favorisée sous celui de ses eaux potables. Il n'est pas une maison qui n'ait son puits. Les eaux de ceux qui sont creusés à la partie orientale de la commune, sur la droite du Marding, filtrent à travers un sous-sol sablonneux, et sont profonds, limpides et sans saveur ; les pluies les plus persistantes n'en modifient pas sensiblement le niveau ; tandis que celles qui se trouvent dans la partie occidentale se troublent jusqu'au niveau du sol. Toutes, du reste, semblent manquer de calcaire.

De nombreuses fontaines jaillissent dans les bois et les landes. Les eaux en sont d'excellente qualité. On en trouve aussi cinq ou six sur le bord du ruisseau des Garonnères, dont la plus remarquable est celle de Lalette, qui jaillit à quelques mètres du château d'Urac, et dont les qualités sont justement appréciées et le débit considérable.

Quoiqu'il paraisse très plat, le sol a une inclinaison très marquée vers le nord. Le centre de la commune se trouve à une altitude de 320 mètres, tandis que le pied est à 316 mètres seulement.

Le chiffre élevé de cette altitude et la pente si prononcée du terrain vers le nord, expliquent comment Ibos, avec une latitude moindre que celle de la Provence, a un climat relativement froid. Ce n'est pas qu'en général les hivers y soient très rigoureux mais ils sont longs, les printemps sont plus insconstants ; on passe brusquement d'une journée de chaud soleil et de douce brise à des pluies froides, accompagnées de vents piquants et suivies de fortes gelées. Il en est de même des étés qui, depuis un certain nombre d'années ne sont rien moins que chaudes. Les nuits sourtout y sont très fraîches. Et telle journée brûlante de juillet et d'août sera suivie d'une nuit qui ne sera pas toujours exempte de petite gelée.

Ce qui rend encore ces deux saisons désastreuses pour les cultivateurs, c'est la fréquence des orages qui s'accompagnent trop souvent de grêle et qui, en un instant, enlèvent le fruit d'une année de labeur et la subsistance de la famille.

La saison qui d'ordinaire est la plus belle, celle qui est la moins sujette aux brusques variations c'est l'automne, avec ses journées ensoleillées, ses nuits calmes, ses vents doux et tièdes, se prolongeant jusqu'à la mi-novembre, formant ainsi avant l'hiver le petit été de la Saint-Martin.

Les vents d'ouest et de sud-ouest sont les plus persistants et généralement humides. Les vents d'est sont secs et froids. Ceux du nord et du midi sont plus rares. Les premiers sont très froids ; les autres sont chauds et amènent la pluie.

Les saisons sont assez inconstantes. Cependant, en général, celle du printemps est la plus humide, quoique ce ne soit pas celle qui voit déborder les ruisseaux. Assez fréquemment, en effet, les grandes crues ont lieu vers le solstice d'é;té.

Quoique l'hiver soit relativement peu rigoureux et que l'automne soit doux, la température moyenne est fraîche, étant donné surtout l'inclémence du printemps et de certaines parties de l'été.

Bâtie en grande partie sur un terrain dont le sous-sol est sablonneux, la commune jouit d'une salubrité remarquable. Les épidémies, et en particulier celles qui s'attaquent à l'enfance, y sont très rares. Les rues sont assez larges et bordées de rigoles pavées qui favorisent l'écoulement des purins. Sous la longue administration de M. le Docteur Lacoste, en même temps que le cimetière, autrefois insuffisant, a été agrandi et embelli, ont été assainis et desséchés les nombreux marais qui touchaient à l'occident de la commune et ceux plus vastes qui existaient dans les landes et les forêts. Grâce à des travaux aussi intelligents que persévérants, les fièvres paludéennes qui autrefois accablaient et décimaient les habitants de certains quartiers ont tout à fait disparu et aujourd'hui, la salubrité est également parfaite sur tous les points de la localité.



II


D'après le recensement de 1886, la population de la commune d'Ibos est de 1.632 habitants. Ce chiffre est bien au-dessous de ce qu'il était autrefois et tout porte à penser qu'il s'affaiblira encore.

Des chiffres recueillis dans les divers recensements opérés depuis un demi-siècle, il résulte que la population était de, savoir :

 

En 1840 de 1.971 habitants.
En 1850 de 2.027 habitants.
En 1860 de 2.061 habitants.
En 1870 de 1.945 habitants.
En 1880 de 1.722 habitants.
En 1886 de 1.632 habitants.

Cette constatation et les comparaisons que l'on peut établir portent avec elles leur enseignement. Mais pour le mieux dégager, faisons, à l'aide du tableau du dernier recensement et de quelques renseignements particuliers, mais très courts, un petit travail statistique.

Sur les 1.632 habitants que renferme la commune d'Ibos, il en est 349 qui sont nés dans une localité étrangère. En déduisant de ce nombre les 31 domestiques des deux sexes qui ont été recensés, il restera encore 318 étrangers qui ont établi leur résidence à Ibos et sont devenus partie intégrante de sa population.

Sans doute l'émigration dans les villes est entrée pour une certaine part dans cette dépopulation si rapide. Cependant, si nous considérons que le nombre des habitants de la commune qui l'ont quittée pour des motifs divers :

- pour aller s'établir dans d'autres parties de la France est de 78 ;
- et que pour ceux qui sont passés à l'étranger il est de 26.
Total : 104.

On voit que le nombre des émigrants est bien inférieur à celui des immigrants.

Poursuivons encore nos recherches dans le recensement de 1886. Relevons-y le chiffre des délibérations existantes à cette époque à Ibos.

Nous trouvons que :

 

- De 35 à 40 ans, il y a 9 hommes et 16 femmes.
- De 40 à 50 ans, il y a 13 hommes et 18 femmes.
- De 50 à 60 ans, il y a 16 hommes et 29 femmes.

Totaux 53 hommes et 96 femmes.
Total général 149 célibataires de deux sexes.

Consultons les registres de l'état civil et, à partir de 1820, comptons les naissances par périodes de 10 années, puis nous prendrons la moyenne des naissances dans chacune de ces périodes décennaires.

Voici le résultat : (moyenne des naissances)

 

- De 1820 à 1829 : 49
- De 1830 à 1839 : 52
- De 1840 à 1849 : 48
- De 1850 à 1859 : 43
- De 1860 à 1869 : 42
- De 1870 à 1879 : 33
- De 1880 à 1885 : 34

Il est encore un calcul très intéressant à faire : c'est de rechercher quelle est, à Ibos et dans quelques autres localités, la moyenne des électeurs, sur 100 habitants. Au moyen de l'annuaire du département, nous trouvons que la moyenne est :

Arrêtons-nous sur ce dernier tableau. Il nous montre qu'Ibos doit avoir une population adulte en proportion supérieure à celle des localités voisines ; et comme conséquence, que le jeune âge y est en minorité. Mais nous aurions pu déduire cette conséquence de la vue du tableau des célibataires, dont le nombre nous semble exagéré et bien au-dessus de ce qui se voit dans les localités où la population n'a pas de tendance à diminuer.

Pour notre part, nous n'avons constaté un pareil cas que dans une commune riche alors qui ne maintenait une population à peu près suffisante que par les colonies que lui envoyaient les pays plus pauvres dont elle était environnait ; et nous nous croyons autorisés à pouvoir insérer que le célibat dont nous nous garderons de rechercher les motifs, dès qu'il atteint les limites que nous signalons, est une cause certaine de dépopulation et de dépérissement.

Si maintenant nous regardons le tableau des naissances, nous sommes frappés de l'écart existant entre la moyenne des naissances actuelles, avec le chiffre des périodes de 1830 à 1850. Et, tout attristés, nous nous demandons si nous ne rencontrons pas ici cette cause égoïste qui dépeuple tant de nos beaux départements et qu'on ne saurait trop flétrir au nom de la morale et des sentiments patriotiques, tout aussi bien que dans l'intérêt, bien entendu, d'un pays où la propriété est très divisée et où les bras ne peuvent être remplacés par des machines.

De ces comparaisons et de ces observations que nous ne poussons pas plus loin, il nous semble permis de conclure que la diminution de population, constaté dans le recensement de 1886, résulte de plusieurs causes ; que celle de l'émigration vers la ville n'y a pas la plus large part, puisqu'elle est plus que compensée par l'arrivée des étrangers qui viennent prendre la place des absents et que les deux autres sont irrémédiables : car elles sont toujours des signes de caducité et de décadence, qui font périr la localité, comme les nations qui en sont atteintes. Nous nous sommes un peu trop longuement attardés : aussi, avons-nous hâte de poursuivre.

La commune n'est point naturellement divisée ni en quartiers, ni en sections. Elle compte 450 feux ; une population très agglomérée de 1.528 habitants et une population éparse de 104 habitants ; pour un total égal à 1632 habitants.

Cette population ne lui donne droit qu'à un conseil municipal de 16 membres, dont un maire et un adjoint. Elle n'a d'autres employés qu'un secrétaire de la mairie, un appariteur, deux gardes-chapêtres et deux gardes forestiers.

Pour les cultes, Ibos était, autrefois, le chef-lieu d'archiprêtré important. Aujourd'hui, elle n'a qu'un desservant et un vicaire.

Ibos fait partie de la perception de Laloubère, dont le titulaire réside à Tarbes.

Elle est assez partagée sous le rapport de la poste.

C'est, en vain, qu'à plusieurs reprises le conseil a demandé la création d'un bureau. Actuellement, elle est desservie par celui de Tarbes, qui ne fait opérer qu'une distribution, laquelle se faisant avant l'arrivée des courriers du matin occasionne un grand retard dans les correspondances.

Les revenus ordinaires de la commune se composent principalement :

1° - du produit de vente des coupes ordinaires des bois, de chablis, de soutrage.
2° - des rentes sur l'état et des intérêts des fonds placés au trésor.
3° - du prix de ferme du champ de tir et de la piste d'entraînement.
4° - enfin de la redevance des biens ruraux dits champart.

Ces revenus ont atteint :

 

- En 1883 : 30.140 fr
- En 1884 : 22.058 fr.
- En 1885 : 20.524 fr.

La valeur du centime a été, pendant ces mêmes années, de savoir :

 

- En 1883 : 130 fr 61.
- En 1884 : 130 fr 53.
- En 1885 : 130 fr 78.



III


Le territoire d'Ibos est par son étendue et par sa fertilité très propre à la production des céréales et des fourrages et à l'élevage du bétail.

On cultive les céréales sur une superficie d'environ 650 hectares, presque entièrement en plaine. Bien que le rendement moyen soit quelque peu inférieur à celui des terres de la plaine de l'Adour, il permet cependant d'approvisionner pour une bonne part les marchés de Tarbes et de Lourdes.

Les cultures dominantes sont celles du méteil et du maïs ; le froment n'occupe qu'un peu moins de la moitié de la place occupée par le méteil, le seigle et l'orge à peu près le cinquième ; mais le maïs tient seul autant de place que le reste des céréales.

La culture de la pomme-de-terre a pris depuis quelques années une certaine importance : le voisinage d'une nombreuse garnison assurait un écoulement facile à une récolte quelque peu hâtive ; mais l'abondance extraordinaire de la récolte de 1886 a fait éprouver une dépréciation très sensible à ce précieux tubercule ; et il est possible que si ce fait se reproduisait encore, la pomme-de-terre ne fut plus cultivée sur une aussi grande étendue, ce qui serait regrettable : car nulle culture ne peut donner un revenu aussi élevé.

Les procédés de culture sont plus simples que judicieux. Les instruments aratoires, à part la charrue en fer qui a remplacé l'araire, sont à peu près le mêmes que ceux dont se servaient nos pères : la herse, le rouleau, le buttoir, les hoyaux, le trident, la fourche, la faux et la faucille. L'assolement biennal, en ramenant trop souvent la même plante sur le même champ, épuise le sol, à qui le fermier ne peut restituer tout ce qu'il perd, pour qu'on le répande avec trop de parcimonie, et que, étant préparé, il est de médiocre qualité. Au lieu de paille, on se sert trop communément d'une mauvaise literie, comme sous le nom de soutrage : mélange de thuyas, bruyères et autres herbes qui l'on coupe sur les landes, qu'ensuite, il est tout à fait mal établi en plein air, et sous l'égout des toits, dont les eaux lui enlèvent le meilleur de ses principes fertilisants et qu'enfin les purins sont totalement perdus.

Pour suffire à l'entretien du bétail indispensable à l'exploitation de ce vaste territoire, on dispose d'une étendue d'environ 300 hectares de prairies naturelles. Ces prairies, bien qu'incomplètement irrigués, donnent deux coupes abondantes dans l'année, pour peu que l'été ait eu des pluies, ce qui permet d'exporter à Tarbes ou ailleurs une assez grande partie des chaumes, du trèfle incarnat et du trèfle rouge, qui fournissent du pacage aux divers bestiaux après l'enlèvement des récoltes jusqu'au printemps suivant, où ils sont enfouis par un labour profond, pour faire place au maïs. Ce pacage permet de réaliser une économie notable de fourrages, en même temps qu'il est une nourriture très hygiénique pour les bestiaux.

Il est inutile de parler des luzernières qui devraient occuper une bonne partie des terres labourables, très profondes et éminemment propres à la culture des légumineuses, actuellement, l'étendue qu'elles occupent est insignifiant.

Bestiaux :

L'élève du bétail doit occuper une bonne place dans toute exploitation. Aussi, Ibos compte-t-il parmi les animaux adultes des espèces, savoir :

 

- Bovine 1.000 têtes.
- Chevaline 300 têtes.
- Ovine 1.600 têtes.

Et cependant, ces animaux ne suffisent pas à la vaste plaine sur laquelle ils doivent vivre et qu'ils doivent engraisser de leur fumier. Une des causes de l'infériorité du rendement des terres est, avons-nous dit l'insuffisance du fumier. Or, sans bétail, point de bon fumier. La première obligation qui s'impose donc au cultivateur intelligent est celle d'augmenter le nombre de ces animaux et celle d'établir des prairies artificielles ; ce qui lui serait facile : le sol étant très favorable à cette culture. Et si l'on considère que les forêts et les landes communales fournissent un pacage assez abondant pendant une bonne partie de l'année, on peut conclure que le nombre des bestiaux pourrait aisément être double dans la commune d'Ibos.

Mais le cultivateur préfère encore vendre ses foins, même à des prix peu rénumérateurs et restreindre l'élevage de son bétail.

A voir ce qui se passe, il est même à craindre que, au lieu d'augmenter le nombre des animaux de ferme, il ne soit pas possible de maintenir les 15 à 20 troupeaux de bêtes à laine qui pâturent actuellement sur le territoire. Et ce serait fâcheux, à moins que l'on augmentât dans une proportion plus qu'équivalente le reste du bétail.

Vignes -

Avant l'invasion de l'oïdium, la vigne haute (hautin) occupait une étendue d'environ 320 hectares et produisait un vin clairet ou foncé - à volonté - peu alcoolique, il est vrai, mais frais, délicat, fin et facile à conserver. Celui qui était récolté sur la partie orientale du territoire était justement apprécié et connu dans la pays sous le nom de Vin de Bastillac.

Dans les années ordinaires, la récolte dépassait les besoins de la localité et l'excédent trouvait un écoulement facile dans le Béarn où il était recherché.

Mais aujourd'hui, cette culture est bien déchue. De ces vignes magnifiques, il ne reste plus que de rares rangées : l'oïdium, que l'on combattait mal, avait obligé leurs propriétaires à les détruire. On a essayé de les remplacer par des vignes basses, mais au lieu de les planter sur de bons terrains, comme il était facile d'en trouver, on les relégua sur un sol de qualité inférieure, en général bas et humide, où la vigne n'a pas pu se développer ni donner des récoltes suffisantes ; on ne consacra même pas à cette culture toute l'étendue désirable. De sorte que la récolte de vin a toujours été inférieure, en quantité, aux besoins de la consommation ; et sauf dans quelques hectares de vignes en coteau, la qualié a été très mauvaise.

Ajoutons que la vigne végétait faiblement sur des terrains mal choisis avant l'apparition du mildew qui les a encore tellement affaiblies, qu'elles semblent sur le point de périr. On peut juger par là si elles seront en état de résister au phylloxéra qui s'avance à pas par les deux coteaux qui bornent la plaine de Tarbes où son apparition a été constatée dans des localités peu éloignées. Peut-être même trouve-t-il déjà, à l'état latent, sur les vignobles d'Ibos.

Chasse et pêche -

Peut-on parler de pêche dans un pays où l'on ne trouve que quelques rares goujons, loches ou vairons dans le ruisseau du Souy ?

La chasse, elle-même, autrefois si agréable et si productive, dans un pays alors très giboyeux, ne fournit guère plus que la caille et la palombe. Pour le lièvre, grâce aux meutes de Tarbes on pourrait dire que l'on connaît par leurs noms comme en Provence, les deux ou trois représentants que l'on conserve précieusement comme les derniers survivants d'une race à peu près disparue.

Depuis longtemps, on constate d'année en année une diminution sensible de cailles. Est-ce à cause de l'aridité de la plaine, privée d'eau en août et en septembre ? Mais cet inconvénient existait autrefois. N'est-ce point plutôt par le braconnage qui se fait impunément, en toute saison, au moyen d'armes de plus en plus perfectionnées, et au printemps, par le filet et l'appeau. La divagation des chiens de chasse, à travers les blés, à la recherche des nichées de cailles et de perdrix, ne peut être que très nuisible à la conservation de tout gibier. La palombe elle-même est beaucoup moins constante dans ses migrations. Est-ce par le fait de certains déboisements ? Est-ce à cause du polygone du Ger dont le tir s'étend à côté de la forêt ? Quoiqu'il en soit, il n'en faut pas moins constater que cette chasse est aujourd'hui fort decevante : ce qui est fort regrettable, car elle était à la fois facile et agréable.

Sur le haut d'un chêne entouré de quelques arbres de repos assez rapprochés, on établit avec des branchages une cabane cachée et assez vaste pour abriter deux à quatre chasseurs. Pour appeau; on se sert de palombes prises vivantes aux pantières de Gerde et de Saint-Pé, ou plus communément de deux pigeons à plumage de ramier, attachés chacun par une patte à l'extrémité d'une raquette, tandis qu'une ficelle pend à l'autre bout. La raquette, posant sur une pointe en son milieu, est fixée au sommet de l'arbre au dessus de la cabane. Voici ce qui se passe : le guetteur, apercevant les ramiers ou les palombes, tire la corde ; le pigeon, soulevé par la raquette qui fait bascule, retombe tout effrayé et battant fortement de l'aile. Ce bruit et cette vue attirent le gibier, qui se pose à l'extrémité des rameaux des arbres des alentours. Les chasseurs, tout à leur aise, font feu au commandement, à travers les meurtrières percées dans la cloison de leur cabane. Pour peu que la chasse donne, c'est pour la soirée une charge de gibier, pris sans fatigue, entre de gais propos, la fumée des cigarettes et un léger goûter, rendu excellent par l'appétit que l'on gagne en respirant le grand air oxygéné de la forêt.

Nous ne parlerons de la perdrix, de la bécasse, du canard, du pluvier et de la bécassine que pour dire que l'on n'en rencontre presque plus ; de même que des sangliers, dont une nombreuse famille a élu domicile depuis une année dans l'épaisseur des bois. .

Forêts -

Sans compter les châtaigneraies, aujourd'hui dépérissantes par une maladie qui tue, les forêts communales occupent une étendue de plus de 600 hectares : dont le tiers en futaies, et le reste en taillis, soumis à un aménagement qui ramène chaque 25 ans les coupes aux mêmes points.

Les forêts sont presque exclusivement peuplées de chênes, chênes-tauzins, et châtaigniers ; le bouleau, le hêtre, le tremble et l'aulne ne s'y trouvent qu'à l'état d'exception. On avait commencé de semer des pins sur une lande que l'on se propose de reboiser ; mais l'insuccès d'un pareil semis, constaté dans une commune voisine, n'encourage pas à poursuivre cet essai.

Toutes les forêts communales sont, du reste, soumises au régime forestier. .

Produits minéraux -

Les seuls produits qui pourraient être extraits du sol sont : la marne, dont on a cessé l'usage, depuis de longues années, au grand désavantage de l'agriculteur, et la tourbe, que l'on trouverait abondamment dans les marais des landes et des bois. Mais on ne tient pas à faire usage de ce combustible, le bois heureusement ne manquant pas. .

Usines -

On ne trouve d'autres usines que cinq moulins à eau et deux scieries à vapeur : les uns et les autres servent seulement aux besoins de la localité ; et trois de ces moulins, faute d'eau, chôment une certaine partie de l'étiage. .

Voies de communications -

La route nationale n°117, de Bayonne à Perpignan ; le chemin de grande communication n°8, d'Adé à Maubourguet ; et le chemin d'intérêt commun n°14 d'Ibos à Rabastens, rendent très faciles les communications d'Ibos avec les principales villes qui servent de débouchés à ses produits : Tarbes, Lourdes, Nay, Souloulou, Vic et Rabastens. Si l'on ajoute que les administrations municipales qui se sont succédées depuis une quarantaine d'années ont veillé avec la plus grande sollicitude au développement et au bon entretien des chemins vicinaux et ruraux, on comprend que la commune d'Ibos pense avoir un réseau de chemins à la fois très étendu et en parfait état. .

Ponts -

Les ponts sont nombreux et en généal très solidement construits, mais aucun d'eux ne présente rien de remarquable. Il en existe neuf en pierres de taille sur le Souy, un pareillement en pierres sur la Géline. Tous ont été construits depuis une soixantaine d'années.

Il n'existe à Ibos aucun moyen de transport. Le chemin de fer traverse son territoire, mais sans s'y arrêter, entre la gare de Tarbes et la station de Juillan. Pour leur usage, les habitants possèdent, d'après le rôle de l'impôt, 90 voitures suspendues attelées d'un cheval, sans compter celles qui n'ont pas de ressorts, ni les petits attelages d'âne assez nombreux.

Essentiellement agricole, Ibos ne fournit au commerce que des produits agricoles : blé, seigle, méteil, avoine, maïs, haricots, bois, laine, agneaux, moutons, veaux, porcs, mules surtout et fourrages, transportés aux marchés et foires du voisinage, qui sont très fréquentées. .

Anciennes mesures -

Le système métrique est presque exclusivement en usage dans la localité. Les tisserands seuls et les vendeurs de planches se servent de la canne, (8 pan et le pan valant les 2/9 du mètre). On vend les terres au journal de 22 ares,43 et la redevance due par certains tenanciers de fonds autrefois communaux se paye en sacs (le sac valant un peu plus de 83 litres), en mesures (le quart du sac), en coupeaux (la moitié de la mesure), en coupereaux (la moitié du coupeau), et le picotins (le quart du coupereau). Mais ce sont là les seuls usages de ces mesures, que bien peu de personnes connaissent encore.


IV


Étymologie probable du nom -

Il est une tradition qui fait dériver Ibos de deux mots latins, Y bos ( va, bœuf), et encore n'est-on pas tout à fait d'accord sur le fait qu'il donna naissance à la tradition. Voici qui est adopté le plus communément : Jules César, dit-on, aura donné ce nom à cette localité, en l'entendant prononcer en leur langage par des bouviers qui cultivaient la plaine : "Ha, boed" - va bœuf - Ibos.

Selon d'autres, César se serait adressé à un paysan à qui il aurait fait certaines questions. Le paysan ne comprenant pas ou ne sachant répondre, regardait stupidement le conquérant "Y, bos" - va bœuf, lui aurait dit César, et aussitôt il aurait donné le nom de I.bos à la localité. Cette explication est peu sûre, comme du reste la suivante, que nous nous permettons d'avancer, n'en ayant pas d'autre. Le mot d'Ibos (Y bos) pourrait être formé du préfixe Y (pour in) et de (bos), nom patois de bois car Ibos a été, jusqu'à une époque très récente, environné de bois de tous côtés.

Histoire municipale -

La ville d'Ibos a été de temps très ancien, une des villes considérables du Comté de Bigorre : elle payait la quarantième (1/40) denier des impositions royales de la Province. Elle est qualifiée par ses anciens titres de ville Marcadale, ou ville de commerce, et ses foires et marchés étaient remarquables.

Elle fut une des premières de la Bigorre à suivre le mouvement qui pousssait tant de villes de France à se former en Communes ; et elle racheta de bonne heure, du seigneur, les droits féodaux qui grevaient la Communauté et les particuliers ; car déjà en 1304, d'après le plus acien document parvenu jusqu'à nous nous voyons la ville d'Ibos - villa sen castrum yvossio, ne reconnaître d'autre suzerain que le roi.

Dans les luttes qui eurent lieu à la fin du XIIIe siècle entre les rois de France et les maison d'Armagnac et de Foix, au sujet de la succession du vicomte de Béarn, Ibos avait eu le bon esprit de soutenir les droits du roi mais elle avait eu singulièrement à souffrir. En considération de cette acte et souffrance, Philippe le Bel, en l'année 1304, par un acte ou privilège, donna à la ville, et à nouveau fief, pour une somme modique (300 sols toulousans), les terres cultes et incultes, herms et inherms, qui forment son territoire, un des plus beaux et des plus vastes du département, et à charge d'une redevance annuelle de deux deniers par arpent, payable le jour de la fête de Saint Thomas.

Le texte de cet affièvement, rédigé en langue roman bigourdan, a été écrit par Bedan de Turret, notaire à Tarbes, le lundi de la fête de Saint Mathieu, de l'année 1304 (septembre 1304).

Le Bézrau (communauté), d'Ibos s'assembla à la barbacane de ladite commune le 4 janvier 1304, afin de ratifier cet acte.

Il est bon de dire que, à cette époque, l'année commençait le premier avril.

Les habitants surent se faire confirmer cette concession par Jean de Grailly, sénéchal et lieutenant du roi d'Angleterre en Gascogne, en 1370, lorsque la Bigorre appartenait aux Anglais.

Charles V et Charles VI, en 1372 et en 1385, en confirmant les divers privilèges, concédés à Ibos, s'engagèrent pour eux et pour leurs successeurs, à ne jamais mettre hors de leurs mains le domaine d'Ibos, ni la juridiction sur ladite ville.

Nous trouverons l'énumération de tous ces privilèges dans le Censier de 1429 et la sentence de 1619. Nous en extrayons les principaux :


1° - Propriété concédée à la commune de la Justice, haute, moyenne et basse avec prison, pilori et gibet ;

2° - Droit aux consuls de nommer et instituer un greffier, deux notaires, et un bayle ou sergent pour l'exécution des jugements ;

3° - La connnaissance de tous procès criminels appartiendra aux jurats et échevins, et l'exécution de leurs jugements aux bayles ;

4° - Exemption de confiscation moyennant la grosse amende de 65 sols morlaas pour les crimes emportant mort naturelle et de confiscation ; et sept sols et demi pour les délits légers ;

5° - Exemption de tous droits sur les ventes et les achats de terres, vignes, etc. soit dans la ville soit sur son territoire ;

6° - Exemption de tous droits quelconque de mutation ;

7° - Liberté entière aux habitants de porter et reporter, vendre et négocier leurs denrées et marchandises, dans tout le pays du Comté de Bigorre, sans payer aucun leude, péage ni gabelle ;

8° - Droit de socquet ou de cabaret, celui de boucherie - sauf la réserve dudit droit au roi depuis le jour du dimanche gras jusqu'au jour de Pâques ;

9° - Droit de taverne, œillade, moulin à foulon et moulin à blé ;

10° - Droit de tenir des marchés les mardis, de quinzaine en quinzaine, et de deux foires franches chaque année ;

11° - L'usage et la pacage de toutes leurs forêts, bois, eaux, terres, herms, inherms cultes et incultes ;

12° - Enfin, droit d'envoyer des Députés à L'Assemblée Générale des États.

Tous ces privilèges et franchises avaient été donnés à charge de redevances et prestations dues au roi, et moyennant la somme de mille francs, que les habitants finirent de payer en 1386, au sénéchal de Bigorre, Jacobus Dominus de Acrebilla.

Les franchises et privilèges dont à cette époque jouissait la ville d'Ibos, ne laissaient pas que d'être fort recherchées de ses voisins, et des plus puissants. C'est ainsi qu'un certain Morgati, médecin de la reine de Navarre, et seigneur d'Urac, sollicitait et obtenait de la Communauté entière le droit de vicinalité - (faire partie de la béziau) - voir l'acte de vicinalité - Gelette, notaire, 1494.

Coïncidence singulière : à quatre siècles de distance, cette belle seigneurie d'Urac est encore occupée par un autre médecin, M.Dupré, professeur distingué à la faculté de médecine de Montpellier, et sénateur des Hautes-Pyrénées.

Pour défendre ses droits contre les empiètements ou agressions du dehors, Ibos s'était entourée de fortifications : car nous la voyons au XV ème siècle traitée de "Billa Murata" - enceinte de remparts - elle avait même un château entouré de tours de défense sur l'une desquelles était, dès avant les guerres de religion, installée une horloge.

Elle ne négligeait rien pour étendre ses domaines, déjà considérables : c'est ainsi que nous la voyons à diverses reprises acquérir les territoires de Castaède, de Cognac, de Bastillac.

Mais ses franchises et ses libertés ne la mirent pas à l'abri des tracasseries des riches commandeurs de Bordères (ordre des chevaliers de Malte), qui prétendaient avoir des droits sur la terre de Juillan, sur le territoire d'Ibos et contre lesquels elle dut, de temps immémorial soutenir de nombreux et interminables procès.

Administration -

Recherchons très sommairement comment la Communauté fut organisée pour profiter de ses privilèges et de ses libertés.

Parlons d'abord de son administration.

Comme toutes les villes du Midi, et particulièrement de la Bigorre, Ibos était administée par des consuls électifs. Ils furent d'abord au nombre de cinq, chacun étant nommé dans un des cinq quartiers de la ville. Cela se passa ainsi de temps immémorial jusqu'en 1693. A cette époque, sans changer le nombre de Consuls, le premier d'entre eux prit le titre et exerça la charge de Maire. En 1765, il survint encore un nouveau changement : le titre de consul fut aboli et nous trouvons à la place deux échevins et trois conseillers de ville. Cette innovation fut de courte durée car en 1773 nous voyons la municipalité composée d'un maire, deux consuls, deux assesseurs et deux contrôleurs.

Il est digne de remarque que la charge de consul ne se pouvait refuser, sous peine d'une forte amende : la communauté, en effet, " estimait à mépris" le refus de la " distinction et honneur qu'elle octoyait". La charge de consuls durait une année. L'un des consuls, désigné par ses collègues, prenait le titre de trésorier, pour faire "charge de recette et dépense des deniers communs de la ville, et de deniers de taille que chaque consul devait lever dans l'étendue de son consulat (quartier), pour faire, ledit tresorier, payement au receveur de ladite taille."

Élection -

Le 27 décembre de chaque année, la Communauté dûment convoquée par les Consuls en exercice, s'assemblait à la Maison de ville. Là, les Consuls en charge, élisaient à la pluralité des voix "pour consuls de l'année suivante des hommes prudents, sages, éclairés, de bonne vie, mœurs et capacité et qui n'étaient entre eux ni parents ni alliés et les faisaient agréer serment par le communauté. L'élection faite, les noms des consuls étaient publiés le premier janvier, jour de la fête de la circoncision et avant d'entrer en fonction, ils étaient tenus de prêter serment. Le six janvier, fête de l'Épiphanie, à la messe, tête nue, à genoux, et les mains mises sur le te-igitur, la vraie croix et le canon de la messe, en présence des anciens, les nouveaux consuls prêtaient serment de bien et fidèlement exercer les fonctions de la dite charge, faire leur devoir, qans qu'ils puissent entreprendre d'ores en avant de faire aucune assemblée publique, (béziau), qu'avec permission."

Installation -

Cette cérémonie faite, les consuls étaient installés par le conseil, le Procureur du Roi, ou son substitut ou en leur absence par les consuls sortants. Ils recevaient pour costume une toge et un chaperon qu'ils portaient dans les assemblées publiques et dans les grandes cérémonies.

Gages -

La charge de consul n'était pas seulement honorifique. Ils recevaient des gages. Un arrêt du conseil d'État, en date du 1er Juillet 1765, fixe les gages de chacun des consuls d'Ibos, à la somme de 8 livres, outre certaines indemnités qui leur étaient allouées à l'occasion de leur élection et de leur installation.

Conseils -

Ibos a eu deux sortes de conseil : le conseil général et celui que nous trouvons sous cette appellation : le conseil politique. Ils ont eu une grande importance. Car si les consuls revêtus de leurs insignes, présidaient, ils ne pouvaient rien entreprendre sans leurs insignes, présidaient et opinaient, ils ne pouvaient rien entreprendre sans l'assentiment du conseil. Lors de l'érection de la Commune, ou Communauté, ou Véziau tous les habitants étaient appelés à prendre part à l'administration de la chose publique, et leur réunion formait le conseil général, la béziau. Pendant des siècles, ils jouiront très pacifiquement de ce droit. Pourtant, il arriva que la généralité des habitants se désintéressent des affaires de la commune si bien que pour détruire cette indifférence, le conseil décida, à diverses reprises, qui les "absents sans raisons valables seraient pignorés".

Mais la royauté s'était fortifiée, son autorité ombrageuse ne pouvait s'accommoder des libertés municipales. Elle prit prétexte, pour détruire les anciennes coutumes, "du tumulte de ces réunions si nombreuses, de la multiplicité des opinions contraires qui s'y débattaient, de l'impossibilité qu'il y avait à faire entendre raison à certains esprits inquiets, gens n'ayant rien à perdre et jetant partout le désordre", et alors il fut ordonné que la communauté, pour être représentée, élirait trois ou quatre hommes ou plus.

Ainsi fut abandonné, l'esprit des anciens béziaux, et tout vestige de l'ancienne liberté disparut. Telle était la situation de la Communauté à la fin de l'ancien régime, lorsque la nuit du 4 août vint abolir tous les privilèges et fit rentrer Ibos sous la loi générale.

Ajoutons, avant de terminer, qui la ville d'Ibos avait des armoiries, qu'elle conserve encore dans les archives de la mairie.

Souvenirs historiques -

La ville, avons-nous dit, avait eu grandement à souffrir de la guerre à la fin du XIIIème siècle ; elle connut de bien autres horreurs vers la fin du XVIème siècle, à cette déplorable époque où, catholiques et protestants, oubliant tout sentiment de patriotisme et de morale, semblaient faire assaut de vandamisme et de férocité.

Nous allons résumer brièvement les souvenirs historiques qui datent de ces guerres et qui se rapportent à l'église, "château" autant qu'à la communauté.

Cette église fut détruite en 1569 par le comte Gabriel de Montgoméry, le même qui blessa Henri II dans un brillant tournoi, et qui après la mort du roi mit son épée au service de Jeanne d'Albret, et devint l'un des principaux chefs des huguenots.

Six ans plus tard, en 1575, une armée de protestants se portait, en courant, du Languedoc en Béarn, et logeait en la ville d'Ibos. Pour cette fois, elle sauva son église sur la promesse de 1.600 livres qu'elle fit au seigneur de Solan, colonel, commandant de ces troupes. La somme n'ayant pu être payée le lendemain, le chef huguenot emmena les consuls et les retint comme otages jusqu'à paiement. Cette rançon ne devait pas pour longtemps sauver l'église : car à retour de Navarreins, les mêmes religionnaires la brûlèrent avec une douzaine de maisons appartenant à des ecclésiastiques et autres. la compagnie du vicomte de Paulis, qui logea dix à douze jours dans Ibos, commit les "pilleries et vexations les plus intolérables". Au mois d'octobre 1592, un préhendé d'Ibos introduisit le parti de la ligue dans son église. Le capitaine Galosse, qui y commandait sous l'autorité de M. de Bazillac, gouverneur du pays, en fut chassé après une défense très honorable. Les ligueurs se fortifièrent solidement dans l'église, et se rendirent maîtres de presque tout le pays, qu'ils pressurèrent horriblement. De leur côté, les peuples du Comminges se jetèrent sur la plaine de la Bigorre, enlevèrent les troupeaux, pillèrent les maisons et forcèrent les habitants du pays, par des brigandages, d'abandonner leurs terres et d'aller gagner leur vie en Espagne.

Les ligueurs se maintinrent deux ans dans la citadelle d'Ibos, dont ils furent enfin chassés par Philippe de Montaut, baron de Bénac, qui, après avoir délogé la garnison de l'église, en fit abattre la voûte pour, en cas de retour, leur ôter tout lieu de défense et de retraite. Depuis lors, la ville d'Ibos a vécu dans une tranquillité profonde.

Traditions et légendes -

De mauvais plaisants ont fait des contes sur le peuple d'Ibos, qui certes ne le méritait pas plus qu'un autre. Ils ont été dès longtemps les Béotiens de la Bigorre ; et les simples disent encore fort gravement :"lous pépis d'Ibos - lous planta-aguillas". Nos pères, qui avaient l'esprit caustique, aimaient à se venger, de ceux dont ils étaient jaloux, par des gauloiseries ou par des chansons. Or, à cette époque d'asservissement et de misère, où tout était taille, impôt ou corvée, les péages étaient divers et nombreux. Chaque "ville marcale" avait les siens où les "bons manants" payaient deniers, hors les habitants d'Ibos, qui de par leurs privilèges étaient exempts de tous péages dans toute l'étendue du comté de Bigorre. On conçoit de quel œil les malheureux qui toujours avaient à payer, voyaient les privilèges des Iboséens. De là, par jalousie, les contes, dont quelques-uns forts spirituels qui courent à leur endroit.

Ce qui encore peut expliquer le peu de sympathie qu'excitaient les gens d'Ibos, c'est que jusqu'à ces derniers temps, ils n'avaient aucun empressement à se mêler avec leurs voisins, qu'ils avaient l'air de traiter avec dédain. Jamais ils ne s'alliaient à des étrangers. Ils avaient tous un air de famille, un costume, un langage à eux. Le peu d'estime qu'ils affectaient pour tout ce qui leur était étranger pour avoir contribué à la vengeance mordante qui les a stigmatisés, et dont ils ont le bon esprit d'être les premiers à rire.

Mais le sarcasme n'est pas toujours la raison. Et les habitants d'Ibos montrèrent de tout temps un grand souci pour leurs privilèges et leurs libertés et une grande constance et habileté pour les conserver et les augmenter ; comme ils montrent de nos jours une grande fermeté, un grand sens pratique et un profond esprit d'indépendance, provenant sans doute de ce qu'ils n'ont jamais subi le joug du seigneur.

Du reste, aucune tradition ni légendes ne sont parvenus à notre connaissance.

Mœurs -

Peu de plaines sont plus fertiles que celle d'Ibos ; la propriété y est très morcelée. Chaque petit ménage possède son petit jardin et son champ ; si celui-ci ne suffit pas à l'entretien de la famille, on y joint quelque terre qu'on prend à ferme et quand elles le peuvent, les personnes valides vont travailler moyennant salaire chez des propriétaires mieux partagés. L'amour du travail y est général, l'oisiveté presque inconnue.

Si la richesse y est rare, l'aisance y est commune et l'on n'y connaît point la misère. Aussi, la population, très économe, est fort attachée à ses champs, à sa maison, à son clocher.

Les mœurs sont simples, pures et polies ; les défauts sont ceux que l'on remarque chez la généralité des gens de la campagne. L'auberge et le café, autrefois sans clientèle, sont malheureusement un peu trop fréquentés. Non seulement les affaires publiques se discutent au cabaret, mais presque toutes les particulières : achats, ventes, affaires en litige, mariages, se traitent en choquant le verre.

Si cette coutume est blâmable en ce qu'elle rend la tête un peu vive et pour d'autres raisons, elle a aussi son bon côté.

Au milieu de la liberté de la table, l'âme s'ouvre à la franchise et le paysan si madré met au jour toute sa pensée. Le lendemain on discutera de sang-froid les propositions qui auront été émises. Ainsi, "ils délibèrent lorsqu'ils ne sauraient feindre et ils décident, quand ils ne peuvent se tromper."

Il a été un temps où les contes de fées égayaient les longues soirées d'hiver, en terrifiant les petits enfants. Mais aujourd'hui, on est moins porté qu'autrefois à passer la veillée avec ses voisins. Et sans que la croyance aux sorcières ait tout à fait disparu, les personnes superstitieuses deviennent rares et rares aussi, celles qui courent chez le devin.

Langage -

La langue du sud de la France est le patois, qui se modifie de province en province, de clocher à clocher et qui est formé de latin, de français et d'espagnol.

Le judicieux Montaigne, qui traitait de "ramassage barbare et blessant pour les oreilles françaises" certaines idiomes du centre et de l'ouest de la France, s'exprime ainsi en parlant de notre dialecte : "il y a, bien au-dessus de nous, vers les montagnes, un langage Gascon que je trouve singulièrement beau, sec, bref, significatif, et à la vérité un langage masle, militaire et pertinent, comme le français est gracieux, délicat, abondant."

Placés sur les confins de la Bigorre et du Béarn, les habitants d'Ibos ont fait un heureux mélange des patois béarnais et bigourdan et s'en sont fait un langage abondant et gracieux qui se prête parfaitement à exprimer les nuances les plus délicates de la pensée.

Cultes -

De tout temps, Ibos a été profondément catholique. Sa belle église, témoignage de la foi de ceux qui la construirent, possédait une chanoinie, prébendée (un archiprêtre et six prébendés), qui donnait l'assurance d'une instruction religieuse solide. Aussi résista-t-elle aux tentations réitérées des partisans de Calvin et après le Concordat, rendit-elle au clergé l'influence d'autrefois.

Costumes -

Devant la facilité des communications, tout s'unifie. Si autrefois, le vêtement, tout de terroir était particulier à chaque localité, aujourd'hui que la ménagère ne file plus, ce sont les étoffes de la Flandre, de la Normandie et de la Belgique dont elle façonne le vêtement de la famille. Les enfants, comme ceux de la ville ont culotte ou jupe courte et jambes chaussées de bas et de bottines ; la jeune fille de la campagne prend la mode si changeante de la ville. Et si nous avons quelque chose de stable à signaler, ce sont les bérets et les blouses généralement portés par les hommes.

Alimentation -

Les habitants sont sobres et s'ils s'oublient quelquefois à l'auberge, à la maison ils sont très réglés. Il n'est point de famille qui ne "tue le porc gras" au carnaval, et qui n'invite, pour ce jour de fête, ses parents et ses voisins. La boucherie, autrefois peu fréquentée, si ce n'est le dimanche, fournit une assez bons quantité de viande et non seulement le paysan met la poule au pot le dimanche, mais de temps en temps il en a une à mettre à la broche, sans compter les oies, les canards et les dindons qui ajoutent au confort de l'alimentation.

Le méteil est généralement employé et souvent aussi le froment pour faire le pain qui est la base principale de l'alimentation, avec la pomme de terre et la pâte (mélange de farine torrifié et de bouillon).

La salubrité du lieu, jointe à des habitudes réglées et à une alimentation saine, font que le population d'Ibos est forte, saine, d'une taille en général au-dessus de la moyenne. Et si les centenaires y sont inconnus, les septuagénaires et les octogénaires y sont très communs et jouissent des agréments d'une verte vieillesse.

Monuments -

Église - l'église d'Ibos, aussi remarquable par son ancienneté qu'au point de vue de l'art, et qu'une décision récente a classée parmi les monuments historiques, se dresse au milieu de la plaine qu'elle domine et attire les regards par sa grande masse. Son orientation est parfaite. L'unité de style n'est pas ce qui la fait remarquer : car le clocher, la nef et le chevet forment trois portions caractéristiques bien tranchées mais où dominent le style gothique et celui du Moyen-Âge.

Chaque partie a sa valeur artistique et mériterait de fixer le regard.

L'époque de sa fondation n'est pas certaine. Il existe bien dans l'escalier du clocher une inscription lapidaire gravée en creux au revers de la dixième marche, sur l'arête inférieure, taillée en biseau, laquelle ferait remonter son origine à l'an mil (au quart de sa grandeur).

Maistre A Renau T de baleix (majuscules)
inscription

Cette inscription a dès longtemps exercé la sagacité des savants qui en ont donné des explications peu acceptables et que nous ne rapporterons pas.

En voici une qui a été donnée par un inspecteur des bâtiments de l'État : Millesimo arte Des dicata basilica.

Il en est une autre qui se trouve à la bibliothèque municipale de Tarbes et que nous transcrivons ci-après : (Anna) (illesimo) e (a) arte De (o) ba (si) (li) ca (adificata).

Quoiqu'il en soit, il est probable que ce fut à l'époque des invasions normandes qu'elle fut édifiée ; il est certain que, comme beaucoup de villes du Moyen-Âge, elle était fortifiée : son nom de château, qui s'est perpétué ; les fossés et fortifications dont elle était entourée et que l'on a fait disparaître dans le courant de ce siècle, mais pas pourtant si complètement, que quelques parties ne puissent encore se voir pour témoigner qu'elle a servi de rempart à la communauté dans les temps des désordres et des guerres du Moyen-Âge.

Donnons brièvement la description de l'intérieur de l'église, partie la plus remarquable au point artistique.

C'est un monument en brique, à nef unique, flanqué de six chapelles, à chœur polygonal fort élevé et éclairé par sept fenêtres meneaux, avec quatre feuilles au tympan. Son clocher est une tour carrée sur la façade. La voûte de l'abside est ogivale, les sept nervures réunies à la clef s'appuient sur des colonnes de différents modèles, à moitié engagées. La nef a trois travées, dont le grand axe court de l'ouest à l'est. Elle est soutenue au nord et au midi par des contreforts. La voûte est sillonnée de nervures croisées qui retombent sur modillon et se relèvent à chaque travée afin d'entourer une des fenêtres. Les vitraux qui ornent ces fenêtres ne datent que de 1855. C'est une œuvre d'art fort appréciée des connaisseurs et due au goût éclairé de M. Durand, architecte diocésien.

Monuments druidiques -

Tumulus - Parmi les tumulus qui existent encore sur les landes du plateau, nous ne mentionnerons que celui qui est connu sous le nom de Castéra, (casta, camp), à côté duquel se voient encore les trous d'un ancien camp romain. Ce camp occupe l'extrémité septentrionale de la colline entre le Souy et le Rieutort, qui se réunissent quelques mètres plus bas. Les abords, sauf la gorge étroite où est bâti le Castéra, en sont très escarpés et ils devaient être de facile dépense.

Le tumulus a six à huit mètres de hauteur et présente une dépression à son centre ; il est entouré d'un double fossé, parfaitement visible.

Dolmen - menhir - Citons encore trois énormes pierres druidiques : l'une, placée sur un des points culminants de la lande méridionale, git sur le sol (dolmen) : elle est désignée sous le nom de Peyra-blanqua, pierre blanche. Les deux autres sont des menhirs, à peu près de hauteur d'homme, dont l'une se dresse non loin de la précédente ; et la seconde dans la partie la plus déserte de la lande du nord, appelée encore Cassagnau (planté de chênes). Ce menhir est connu sous le nom de Peyre-hicade (pierre fichée, plantée). Il est à remarquer que le sol de la lande n'est point pierreux et que ces pierres ont évidemment été transportées sur les plateaux, aujourd'hui dénudés, mais autrefois couvert de vastes et épaisses forêts.

Archives - Les divers matériaux qui pourraient servir à l'histoire de la commune consistent :

1° - En parchemins qu'elle possède et qui établissent ses privilèges.

2° - Dans les délibérations de la municipalité et en des pièces de valeur très mince, éparses dans les archives.
3° - Glanages, par Larcher, (manuscrit déposé à la bibliothèque municipale de Tarbes).

4° - Histoire de la Bigorre, atttribué à l'abbé Colomés, (manuscrit, même bibliothèque).

5 ° - Dans des actes déposés dans l'étude de crertains notaires et d'anciens monastères.



Annexe au titre IV


Enseignement -

Sous l'ancienne monarchie et jusqu'en 1789, la commune d'Ibos, en vertu de ses anciens privilèges, avait une école dirigée par un régent de latinité qui prenait à ses frais un régent de grammaire. Le premier acolyte, clerc tonouré ou autres minorés, était choisi par la municipalité accepté par l'archiprêtre et agréé par l'évêque. A cette école, était attachée une prébende préceptorale dans l'église St Laurent, avec "jouissance des fruits, profits, revenus et émoluments attachés à ladite prébende".

Chaque année, régulièrement, vers l'époque du 24 juin, il y avait une assemblée générale de la communauté, "chacun mandé en sa maison et au son de la cloche, à l'effet de nommer le Régent chargé d'instruire la jeunesse et assister aux offices divins, suivant l'usage et pendant l'année qui commence le jour de la St Jean, jusqu'à pareil jour de l'année suivante"

On changeait fréquemment ces régents, qui souvent avançaient dans les ordres et parfois aussi ne satisfaisant pas aux exigences de la communauté ou de l'archiprêtre. Nous n'en donnons point la liste, qui ne pourrait offrir le moindre intérêt.

À partir de 1770, il existe dans les délibérations une lacune regrettable de sorte qu'il nous a été impossible de nous rendre compte de ce qui s'est passé en 1789 et pendant les premières années de la Révolution. Il faut arriver au 26 prairial de l'An VII pour trouver dans le registre des arrêtés du maire la nomination du "cotoyen Dalies" pour donner des leçons de "lecture, écriture et calcul". La commune assurait à l'instituteur un traitement annuel de 436 francs, en sus de la rétribution en nature que lui payaient les pères de famille.

Deux ans après, le "citoyen instituteur", trop exigeant, déplut à la municipalité qui lui retira ses subsides. Le premier Dalies abandonna la commune et il ne nous a pas été possible de trouver le nom de son successeur.

Mais au 29 pluviose An XIII, une délibération du conseil municipal nomma le premier Cassagnet, J.P. de Pontacq, aux fonctionx d'instituteur, "à la place du Sr Castaing", et aux conditions suivantes :

1° - Obligation de faire chaque jour deux classes, à l'exception de celle du soir du jeudi, marché de Tarbes.

2° - Donner des leçons de lecture, écriture et calcul ; faire faire la prière matin et soir par les enfants ; à la leur apprendre s'ils ne la savent ; et même à leur apprendre le catéchisme et le plain-chant.

3° - D'assister les jours de fête aux services religieux "pour contenir la jeunesse dans le respect et dans les attitudes convenables", et de faire, chaque fois qu'il en sera requis, le service de l'église en qualité de chantre, par lui-même, ou par tout autre qu'il pourrait s'adjoindre dans l'objet ci-dessus.

4° - L'instituteur recevait 150 francs de la commune pour le prix de son logement, une mesure de carrou (méteil) des pères de famille pour chaque enfant qui apprendrait à lire et deux mesures dudit grain, pour ceux qui apprendront à lire et à écrire.

Pour la surveillance de l'instituteur et de l'école, il était nommé un jury de trois membres qui devait examiner les enfants pour "décider quels étaient ceux qui devaient être mis à la lecture et faire un rapport sur l'assiduité de l'instituteur. En cas de plainte "méritée", le conseil se réservait de prendre à son égard telle mesure que de droit".

Qu'il y a loin de cette situation à celle qui était faite au citoyen jadis, six ans auparavant, dans une délibération dont les termes étaient tout à fait bienveillants et l'esprit tout de dévouement à la cause de l'instruction des citoyens ! Brumaire avait passé par là.

M. Cassagnet exerça jusqu'en 1814.

Le 5 juin 1814, à la première Restauration, le conseil nomme le premier Prat Dominique Gelé, d'Azereix, instituteur de la commune d'Ibos aux mêmes conditions qui ont été rapportées ci-dessus.

Le sieur Gelé établit à Ibos une école mutuelle. Cet homme, ancien cuirasier de la Garde, peu instruit, mais doué d'une volonté énergique et d'un véritable don d'enseignement, apprenait à ses écoliers plus qu'il ne savait lui-même, suivant le témoignage de ses anciens élèves, dont un docteur, un inspecteur d'académie et un conseiller de cour d'appel.

Nous allons nous contenter de donner la liste des instituteurs publics et des instituteurs libres depuis la Révolution jusqu'aujourd'hui.

 

Instituteurs publics Dates Instituteurs libres Dates
Dalies
Castaing
Cassagnet
Prat gelé
Ducasse
Tarbés
Péré
Frères de l'Institution Chr.
Laffont
Gassan
Laffont
Mars
VII à IX
VII à XIII
XIII à 1814
1814 à 1825
1825 à 1854
1843 à 1847
1847 à 1859
1854 à 1870
1861 à 1868
1868 à 1873
1873 à 1874
1874 à ....
Baradat
Cadiran
Le même
Id.......
Barbé
Grangé
Laffont
1819
1821 à 1846
1849 à 1854
1856 à 1859
1853 à 1854
1859 à 1860
1860 à 1861

Description de l'école -

La maison où se tient aujourd'hui l'école est un antique bâtiment ayant servi jadis de tribunal et de prison. Sa façade est au midi. Il a 25 mètres de long et 7 m 20 à l'intérieur. Le rez-de-chaussée renferme le logement de l'instituteur, un bûcher et l'ancienne classe du conseil ; le premier étage est occupé par le tambour d'un escalier, les deux salles de classe et l'ancienne salle des archives. Au dessus, se trouve le grenier.

Les classes, avec le nouveau mobilier dont elles sont munies auraient manqué de place si, par suite de la diminution de population, le nombre des enfants n'eût été considérablement réduit. À la rigueur, elles avaient assez d'air, mais pas assez de lumière dans certaines journées sombres. Le plafond non plâtré, les planchers mal joints, les coisées fermant mal, la toiture et l'absence de persiennes, tout cela rend les classes très froides tandis qu'en été ... au travail et à la bonne tenue des élèves. Que l'on joigne, à ces inconvénients, un escalier obscur où toute surveillance est impossible, par lequel les entrées et les sorties ne peuvent se faire ensemble, rythme et chant, un jour insuffisant ; les latrines mal établies et infectes et l'on verra ce qu'il reste à réaliser.

La première amélioration, ou plutôt la seule, consisterait à porter la classe au rez-de-chaussée et le logement de l'instituteur, à l'exception de la cuisine, au premier.

La fréquentation des classes n'est satisfaisante que pendant le mois de décembre, janvier à moitié février. Le reste de l'année, les enfants sont occupés à la garde des bestiaux et à la culture des terres. Tout en reconnaissant que les bras manquent à certains moments et pour les pressants travaux, il est permis de faire remarquer que souvent les plus légers motifs sont des prétextes pour excuser les absences, et que les parents, en désirant que leurs enfants acquièrent une bonne instruction, ne savent pas s'imposer quelques sacrifices pour la leur assurer.

Le peu de temps que les enfants passent à l'école et l'intermittence de la fréquentation expliquenet pourquoi, trop généralement, le niveau de l'instruction est peu élevé. Il est certain qu'on ne trouve pas un enfant qui ne sache lire, écrire plus ou moins et compter et que même il y en a bien peu qui ne soient en état d'écrire une lettre plus ou moins correctement et d'exprimer ce qu'ils auront à dire. Mais nous le disons avec quelques confusion, il n'y a pas lieu d'être satisfait des résultats acquis, lesquels ne répondent ni aux efforts que l'on a pu prendre, ni aux sacrifices que s'imposent l'état de la commune.

Les conscrits de la classe 1886 savent tous lire, écrire et compter et les conjoints de la même année, hommes et femmes ont tous signé leur acte de mariage.


Bibliothèque -

Nous avons, dès notre arrrivée, essayé d'établir une bibliothèque, complément naturel et indispensable de l'école. Mais, moins heureux que dans une autre commune où dès 1870 nous en avions fondé une par souscription, nous avons rencontré des préjugés et en ce moment encore nous n'avons pas réussi. Le conseil municipal cependant, dans une précédente session, a voté en principe l'établissement d'une bibliothèque scolaire en réservant le vote des fonds à la session de mai. Nous n'avons ni caisse des écoles, ni caisse d'épargne.

Traitement des maîtres -

La commune devançant la loi sur la gratuité, avait en 1868 rendu ses écoles gratuites, aux dépens de ses revenus ordinaires et sans recourir à l'imposition des 4 centimes. Le traitement de l'instituteur fut alors fixé à 1420 francs. Depuis, en 1878, le conseil le porte à 1520 francs. Celui de l'instituteur adjoint étant de 800 francs.

Sacrifices à demander à la commune -

Il y aurait à demander à la commune pour l'approbation de l'école ; mais à notre avis on ne pourrait espérer réussir qu'à une double condition.

La première, c'est que l'on respecterait, autant que faire se pourrait, les murs tels qu'ils se trouvent, de manière à rendre possible, par ce moyen, le remploi des poutres et autres bois en bon état.

La seconde, c'est que l'architecte devrait abandonner toute idée de vouloir faire œuvre d'art et ne s'attacherait qu'à l'économie et à l'utilité.

Si ces recommandations étaient suivies, il ne serait peut-être pas besoin de demander une somme très considérable : dix à quinze mille francs me semblent suffisants. On ne devrait pas dès lors, désespérer d'amener la commune à consentir à ce sacrifice. Mais dans le cas où l'on voudrait faire les constructions luxueuses trop au goût des architectes ; si l'on faisait table rase de tout ce qui existe pour tout édifier à neuf, alors il serait à craindre que jamais Ibos ne donnât san acquiescement. Mais toujours il faudra du tact et beaucoup de patience, quand on abordera cette difficile question, pour la mener à bien.

Ibos, le 15 avril 1887

L'instituteur public

Mars A.




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département 65.

© Marie-Pierre MANET





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