La monographie de 1887 de Larreule
Hautes-Pyrénées
département 65.

(ADHP - Monographie établie en 1887)




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I


La commune de Larreule est située au nord du département des Hautes-Pyrénées. Elle appartient à l'arrondissement de Tarbes et fait partie du canton de Maubourguet. Le territoire est limité : au nord et à l'est, par celui de Maubourguet ; au sud-est et au midi, par ceux de Nouilhan et de Caixon ; au sud-ouest, par ceux de Montségur et de Labatut (communes du département des Basses-Pyrénées) et à l'ouest par celui de Lahitte-Toupière.

Il s'étend sur une longueur de cinq kilomètres du sud au nord, de quatre kilomètres de l'est à l'ouest et mesure, par conséquent, une superficie de vingt kilomètres carrés.

La distance de Larreule à Maubourguet est de quatre kilomètres ; celle de Larreule à Tarbes est de vingt-cinq kilomètres.

On peut diviser le territoire de la commune en deux parties bien distinctes, en égard à la disposition du sol, savoir : la partie de la plaine et celle des coteaux. La première, qui comprend à près les ¾ de la surface totale, est arrosée :

1° - par la rivière de l'Échez, qui prend sa source aux contreforts des Angles et qui se jette dans l'Adour à Maubourguet ;

2° - par le ruisseau de Lys qui tire son origine des dernières ramifications de la colline de Gers ;

3° - par l'Ayza et le Houssat, deux petits ruisseaux formés, soit par les eaux pluviales et l'écoulement , soit par de nombreuses fontaines ou sources situées dans le flans des collines occidentales de la plaine de Bigorre qui servent de limite entre les Basses et les Hautes-Pyrénées. Ces quatre cours d'eau ont un débit assez faible en été mais à la fonte des neiges, l'Échez augmente considérablement, déborde quelquefois et inonde la campagne ; quant au Lys, à l'Ayza et au Houssat, un orage en deux ou trois jours de pluies continuelles, suffisent à les transformer en torrents impétueux.

Les eaux potables sont recueillies à Larreule avec une très grande facilité ; un puits de quatre ou cinq mètres de profondeur ou une pompe aspirante, avec un tuyau d'égale dimension, procurent aisément toute l'eau nécessaire à l'alimentation. En outre, de nombreuses fontaines naturelles, dissiminées sur les divers points du territoire, fournissent également une eau potable d'excellente qualité.

L'altitude moyenne de Larreule est de 220 mètres.

Le climat est doux et tempéré. Les vents prédominants sont ceux du nord, de l'ouest et surtout ceux du sud-ouest qui proviennent du Golfe de Gascogne. Ces derniers en particulier sont très redoutés par les habitants pendant les mois de juin, juillet et août. C'est de ce point collatéral, en effet que surviennent à cette époque de l'année, les orages de grêle qui sont très fréquents dans notre localité.

La salubrité de la commune est bonne.

II


Le chiffre de la population de Larreule, d'après le recensement de 1886 est de 622 habitants. Ce chiffre tend à diminuer avec une progression peu rassurante pour l'avenir de notre commune. De 765 qu'il était en 1836, il tombe à 739 en 1866, à 717 en 1866, à 676 en 1876 et le voici descendre à 622 en 1886. c'est écart doit être attribué à deux causes principales :

1° - à l'émigration toujours croissante en Amérique ou vers les grands centres ;

2° - à la diminution constante du nombre des enfants pour un même ménage dont la moyenne n'est que de 1,25%, tandis qu'elle était de 2,2, il y a quarante ans à peine.

À la commune de Larreule est rattachée le hameau de Parrabère dont la population est de 89 habitants. Le nombre de feux est de 159 pour Larreule et de 29 pour Parrabère.

La commune de Larreule est administée par un maire, assisté d'un adjoint et d'un conseil municipal composé de douze membres. Un garde-champêtre (St Hilaire) remplissant également les fonctions de garde-forestier, un valet commun (Camblat), un cantonnier communal, un secrétaire de mairie (Launes), tels sont les fonctionnaires municipaux proprement dits. Les fonctionnaires payés par l'État sont : le percepteur (St Laurent), le curé (Fourcade-Samasu), l'instituteur (Sensever) et l'institutrice (Mlle Cénac). Le percepteur réside à Maubourguet. Il exerce en même temps les fonctions de receveur municipal de notre localité. Tous les matins, un facteur du bureau des postes et télégraphes de Maubourguet, fait une distribution dans la commune. Il repasse dans l'après-midi à la boîte aux lettres et emporte les correspondances de la journée.

Le centime communal est d'une valeur de 40 frs.

La moyenne des revenus ordinaires peut-être fixé à 6500 frs.

III


La vigne est la principale culture de notre localité. Cependant depuis que le mildew et le phylloxéra ont presque complètement tari cette source de revenus et que les propriétaires récoltent à peine le vin nécessaire aux besoins de leurs familles, la culture du tabac a pris une extension considérable. Nous avons aujourd'hui une centaine de planteurs cultivant une surface totale de 40 hectares environ. Le revenu moyen pouvant être évalué à 1.000 francs l'hectare, c'est donc un revenu fixe de 40.000 francs que fournit à la commune cette importante culture.

Après la vigne et le tabac, arrive le trèfle rouge, ordinairement désigné sous le nom de farouche, et dont la graine est encore aujourd'hui l'objet d'un commerce assez important. Deux moulins à trèfle construit sur la rivière du Lys et appartenant à deux propriétaires de la commune (Lansanade et Desplantez) servent exclusivment au dépessage de cette plante.

Les rivières et les canaux qui arrosent notre territoire se prêtent merveilleusement à la culture des prairies naturelles. Depuis une quarantaine d'années et principalement depuis l'apparition de l'Oïdium dans nos contrées, plus de 50 hectares de vignes hautes ou de terres labourables, ont été converties en prairies ; aussi en dehors du foin utilisé par les habitants pour l'élevage de leurs bestiaux, la quantité exportée de cette plante fourragère peut être évaluée à 2.500 quintaux métriques. En raison de 6 frs le quintal (1.000 kilos) le faire constitue encore pour la commune une source de revenus de 15.000 francs.

Le blé, l'avoine, le seigle, l'orge, le millet, le sarrasin, le trèfle, le lupus, le maïs, la pomme-de-terre, la betterave, le lin, les pois, les haricots et les fèves ne sont cultivés qu'en quantité suffisante pour les besoins personnels des habitants et pour l'élevage de leurs animaux domestiques.

Le versant oriental des coteaux qui bornent la commune à l'ouest est occupé par les vignes. Le sommet qui forme un vaste plateau et le versant occidental sont occupés par des taillis, des bois et des landes. Le taillis, soumis au régime forestier n'est exploité que tous les vingt ans. Il fournit une coupe extraordinaire d'une valeur moyenne de 2.000 frs. Les bois qui sont formés de vieux chênes, à moitié sciés et dépérissants, fournissent une coupe ordinaire de 400 frs à peine. Quant aux landes, elles forment avec les biens communaux non soumis au régime forestier qu'on a défrichés vers 1850, le meilleurs revenu du budget communal. Les terrains communaux, plantés en vignes et affermés produisent un revenu annuel de 1.600 francs.

La vente des thuyas et fougères qui poussent sur les landes avec un vigueur extraordinaire produit annuellement une somme variant entre 1.100 et 1.200 francs. Il est bon cependant de faire remarquer que le prix de ferme des vignes va nécessairement diminuer à la nouvelle adjudication. Fortement attaquées par le mildiew, les vignes ne produisent depuis deux ans que des récoltes insignifiantes. D'un autre côté, et quoique le phylloxéra n'ait pas été encore officiellement constaté à Larreule, il est presque certain que le terrible puceron a déjà envahi nos vignobles. D'abord, sa présence a été reconnue à Maubourguet, à Sombrun et à Labatut-Toupière et notre territoire n'est, en sommen que le prolongement de ceux de ces trois communes. Ensuite les vignes perdues aujourd'hui et les constatations faites par divers propriétaires nous autorisant d'affirmer que dans le courant de 1887, la plupart de nos vignoble seront reconnus contaminés. La perte sera énorme, il est vrai, mais sera cependant moins sensible pour nos cultivateurs que pour ceux du Gers, par exemple, dont les terrains se prêtent difficilement à tout autre genre de culture. Les terres labourables avec du blé et du tabac, les prairies naturelles ou artificielles pour l'élevage des bestiaux, peuvent atténuer en partie la perte produite par la maladie de la vigne.

Larreule possède 500 bêtes à corne, de 90 à 100 animaux de l'espèce chevaline et 400 têtes de moutons ou brebis. Les poulinières de demi-sang, anglo-arabe, sont présentées chaque année aux primes de Maubourguet.

Nos rivières d'eau douce seraient abondamment peuplées de brochets, de truites, de poissons blancs ou barbeaux, d'anguilles et de goujons, si les empoisonnements trop fréquents opérés avec le chlorure de chaux, par des malfaiteurs étrangers, ou à l'aide de cartouches chargées de dynamite, ne détrusaient chaque année la plus grande partie de nos poissons.

Le pays est assez giboyeux ; seulement les braconniers et les chasseurs, à l'aide d'engins prohibés font le désespoir des vrais disciples de Nemrod et de St Hubert.

La répression de ces divers délits, quoique très active, n'est pas assez sévère dans ses résultats pour empêcher la récidive.

Les lièvres, les lapins, les cailles , les perdrix et les râles sont assez nombreux. Les oiseaux de passage tels que la bécasse, le vanneau, la palombe, le canard et la sarcelle ont une certaine prédilection pour notre territoire. Le gibier d'eau, surtout, attirés par nos nombreuses rivières, affectionnent d'une manière toute particulière, certains de nos quartiers.

Après l'agréable, passons à l'utile.

Sous des derniers rapports, Larreule ne le cède en rien aux villages les plus importants du département : 4 moulins hydraulique, deux moulins à trèfle, une miroiterie, 3 machines à vapeur pour battre le blé, 3 scieries hydrauliques, une bascule utilisée surtout pour le pesage du foin et de la paille, 5 cafés-restaurants, un cercle, un orphéon, une fanfare, 3 épiceries, 3 cordonniers, 2 tailleurs, un boucher, 4 forgerons, 2 charrons, 2 menuisiers, 5 charpentiers, 2 maçons, 1 sage-femme, 28 kilomètres de chemins vicinaux, la route de grande communication n° 8 qui traverse la commune, la proximité de la gare de Maubourguet et de la route nationale de Bordeaux à Bagnères-de-Bigorre (3 kilomètres environ), font de Larreule un site des plus agréables pouvant rivaliser avec les communes rurales les mieux formées des Hautes-Pyrénées.

Les seules mesures locales encore en usage à Larreule sont :

1° - le journal, mesure de superficie qui équivaut à 22 ares 43.

2° - La cruche ou vanne qui équivaut à 20 litres.

Cependant dans les échanges actuels, on ne compte plus l'époque peu éloignée où des derniers vestiges de nos anciennes mesures locales auront complètement disparu.

IV


L'étymologie probable du mot Larreule, vient du mot latin Regula, qui signifie La Règle. En voici la raison :

Il y a huit cents ans environ, un couvent de Bénédictins fut installé dans notre commune sous le nom de Réla, c'est-à-dire couvent de la Règle. Du mot Regula, nous enlevons le " g ", il reste Reula, qui devient, dans la suite, en patois, Reoulo. Or sur les acte de l'état-civil et dans diverses pièces des archives de la mairie, nous constatons que le mot Larreule est écrit jusqu'en 1750 environ, à l'aide de l'article " la " et du mot "Reule", le mot Larrreule s'écrit en un seul mot, l'ü surmonté d'un tréma. A partir de cette date, ce signe orthographique disparut des pièces officielles. Un grand nombre d'habitants écrivent encore Larreüle avec un tréma sur l'u.

Cette origine nous paraît la seule acceptable et nous ne pensons pas qu'il soit possible de trouver une étymologie plus rationnelle.

La fondation de l'abbaye de Larreule (1050) amena le défrichement des terrains environnants. Les landes incultes furent transformées par les moines en terres labourables et en vignobles produisant des vins d'un cru excellent.

Antérieurement à cette fondation, le village primitif se trouvait sur la rive droite de l'Échez ( ruines, feuilles, tradition ). Ce n'est donc que par suite de la fondation du monastère ou du château féodal que le centre de la commune s'est déplacé.

Le château de Parrabère dont on admire encore les ruines imposantes date de la Renaissance. Il dut probablement remplacer l'ancien château féodal de la commune, complètement disparu ajourd'hui, mais dont les fossés et quelques vieux pans de mur indiquent l'emplacement.

La tradition affirme qu'un souterrain d'un kilomètre de longueur réunissait les deux résidences seigneurales.

Parmi les personnages célèbres, nés dans la commune, nous pouvons citer :

1 - Le comte de Parrabère qui fut tué à la bataille d'Ivry (1590) sous les yeux du maréchal Biron et de son suzerain, le roi de Navarre, qui devint plus tard Henri IV.(tradition, Henriade, chant N° III).

2 - La marquise de Parrabère, une des nombreuses favorites du Régent, dont le mari, après avoir été exilé, dans des terres de Parrabère, fut, dit-on, empoisonné.

3 - Les comtes de Sancy, propriétaires actuels des ruines du château, qui furent très influents sous les derniers Bourbons.

4 - Et de nos jours, enfin, Larreule s'honore d'avoir donné naissance au plus éminent de ses enfants, à M. Eugène Ténot, à un fils de ses oeuvres, qui après avoir exercé les fonctions de professeur au collège de Saint Gaudens (Haute-Garonne) et de Clémeau (Algérie) publia à une époque où il y avait quelques dangers à le faire (1867), une étude historique sur le Coup d'État, intitulé La Province en décembre 1851, ayant fait preuve dans cet ouvrage de grandes qualités d'écrivains, il devint rédacteur du Suèle. Préfet des Hautes-Pyrénées pendant la Défense Nationale, rédacteur en chef de la Gironde, Député de la 2 ème circonscription de Tarbes (1881-1895), écrivain militaire de premier ordre, tels sont les titres qui ont valu à notre compatriote la Décoration de Chevalier de la Légion d'Honneur et la nomination de Commandant de l'Ordre du Dragon Vert, de l'Annam.

La langue usuelle de la commune est le patois de la Bigorre.

Les anciennes coutumes ont compètement disparu. Signalons cependant les amusements du mercredi des Cendres qui ont lieu encore et qui existent de temps immémorial. Ce jour-là, les jeunes gens, la plupart déguisés forment la chaîne en se tenant par la main, entrent dans toutes les maisons de la commune en passant par la croisée et en sortant par la porte, ou réciproquement, acceptent les oeufs, le boudin, le lard, toutes les victuailles qu'on leur offre enfin, ou s'en emparent de force s'ils sont mal reçus. C'est ce qu'on appelle Faire courir ou danser la Parrabère au son du fameux et antique couplet :

" Adiou, praoubé, praoubé,
praoubé, adoi praoubé Carnabal
Tu t'en bas à you démori ;
adiou, praoubé Carnabal


Est-ce une légende ou un tradition historique que la mort de Saint Esselin, survenue dans la commune de Larreule, à une époque très reculée, sur l'emplacement d'une fontaine qui porte son nom ?

Nous n'en savons rien. Dans tous les cas, voici ce que les vieillards racontent encore aujourd'hui à leurs petits-enfants pendant les longues soirées d'hiver.

Il y avait une fois, un pauvre pélerin, nommé Saint Esselin, qui venait du Béarn le premier jour du mois de mai. Il s'arrêta bien las, sur l'emplacement de la fontaine que vous connaissez tous. Exténué de fatigue et mourant de soif, il enfonça son bâton dans le gazon et prononça les paroles suivantes :

Aci qué planti moun bourdou,
Sé non ya aïgur,
Diou qué n'y doù

Traduction textuelle :
Ici je plante le bourdon (bâton)
S'il n'y a pas d(eau que Dieu en donne...
(S'il n'y a pas de source dans cet endroit, je prie Dieu d'en faire jaillir une).


St Esselin put se désaltérer mais il mourut quelques instant après. Les habitants de la commune de Monségur (Basses-Pyrénées) et de Lahitte-Toupiè, qui arrivent en l'occasion d'apprécier les vertus de ce saint lors de son passage dans leurs communes, essayèrent mais en vain de transporter son corps dans un de leurs villages. Malgré le grand nombre ou le diversité des villageois, il leur fut impossible de faire avancer d'un pas la voiture où avait été déposés les restes du saint et ils furent obligés d'abandonner à eux-mêmes le chariot et les boeufs. Ceux-ci se dirigèrent immédiatement vers Larreule (il est probable qu'il leur était plus facile de descendre que de monter la côte) et St Esselin fut, paraît-il, inhumé dans l'église de notre commune.



La fontaine existe toujours et quelques personnes superstitieuses attribuent encore à ses eaux la vertu de guérir radicalement un grand nombre d'infirmités.

L'église s'empare de cette croyance, et, de nos jours, nous voyons encore, le 1 er mai et le 3 ème jour des rogations et le 16 août de chaque année (fête patronale de St Roch), le clergé de la paroisse, accompagné d'un nombre plus ou moins grand de fidèles, aller en procession à la fontaine de St Esselin. Arrivé dans les lieux, le curé n'omet jamais de bénir l'eau miraculeuse en employant les mêmes prières qu'il récite en bénissant les eaux, le dimanche matin. Après le départ de la procession, les malades lavent leurs plaies et abandonnent les vieux chiffons sur les marches de la fontaine.

Avant 1780, un curé de la paroisse, qui n'avait dans doute pas la foi, voulut exiger du conseil municipal une somme de 9 francs pour faire trois processions traditionnelles. Le Conseil refusa la subvention et les processions n'eurent pas lieu. La légende affirme que la fontaine le même jour, premier mai, l'abbé Robin, successeur de ce prêtre, continua les traditions et fit gratuitement les processions. A la première, l'eau revint considérablement. Frappé de ce fait, le curé Robin, dans son testament légua une rente perpétuelle de 9 francs pour faire les trois processions et abandonna aux pauvres des communes de Larreule et de Nouilhan, la totalité de ses biens. C'est à l'aide de ces fonds que fut créé notre Bureau de Bienfaisance qui dispose d'une rente annuelle de 800 francs.

Nous n'avons à apprécier ici, ni l'absurdité de la légende ni le vrai motif de la libéralité du curé Robin : qu'il nous suffise d'affirmer que le souvenir de ce mobile des prêtres, du bienfaiteur des déshérité, de l'urne des pauvres enfin, sera éternellement gravé dans le coeur de ses concitoyens reconnaissants.

Le premier mai de chaque année, et en signe de réjouissance tous les habitants célébrent la fête des gâteaux en l'honneur de St Orens. Les pâtissières de Maubourguet n'oublient jamais ce jour. Elles portent à Larreule un nombre considérable de gâteaux et leur marchandise s'écoule avec une rapidité extraordinaire.

Les statues de St Esselin, St Orens et de St Roch ornent l'intérieur de notre magnifique église abbatiale, construite par les bénédictins au commencement du XIIe siècle, et qui compte parmi les monuments historiques du département des Hautes-Pyrénées. La voûte en pierre de taille, l'escalier aux marches de pierre, usées par le frottement, les oubliettes que l'on constate encore dans les murs du clocher antique, les fresques, les peintures anciennes, les châpiteaux, dont quelques uns sont déposés au Musée de Tarbes, les colonnades des croisées avec leur style dorique et corynthien, voilà tout autant de merveilles pour les amateurs d'antiquités.

L'abbaye était construite sur l'emplacment actuel de notre nouvelle maison d'école ; les cellule des moines étaient dispercées dans un champ, converti depuis peu en place plublique, et qui est encore désigné, aujourd'hui sur le cadastre, sous le nom de Champ de l'Abbaye. La maison qui servait de cuisine aux abbés existe toujours. Elle est située au nord de l'église et appartient au sieur Gellis Marcelin. On y admire encore quelques restes de peinture et un magnifique escalier.

Une seconde maison, située au midi de l'église, servait, paraît-il, de bibliothèque. On la désigne aujourd'hui sous le nom patois de Libés, en français Livres.

Une troisième, située au levant de la précédente porte le nom de Roses. Il est probable que c'était le parterre du monastère.

Vers la fin du XVIIIe siècle, Monsieur l'Évêque de Tarbes vint un jour, sans être attendu assister la communauté. Il trouva l'abbaye déserte et l'église dans le plus grand désordre. Les moines étaient tous en voyage, en chasse ou à la pêche, mais aucun n'était à ses devoirs : la communauté fut dissoute et les moines dispersés.

L'étranger admire encore les ruines imposantes du château de Parrabère qui possédait 365 ouvertures. Les personnes tout à fait dignes de foi nous ont affirmé, avec des faits à l'appui que tous les passants étaient obligés d'en saluer les murs sous peines des plus sévères. On cite entr'autres, un jeune soldat béarnais, libéré du service militaire et rentrant dans ses foyers qui fut appréhendé au corps et châtié sévèrement par les gardes du château pour avoir omis de faire le salut de rigeur.

Une maison située au nord-est de cette ancienne résidence seigneuriale porte encore le nom d'Aoudiençe, en français Audience. C'est dans ce local que le seigneur rendait sa justice.

Aujourd'hui, que les prérogatives de la noblesse ont été rayées de nos lois, le paysan sourit à l'aspect de ces immenses débris d'une grandeur déchue, se rappelle les souffrances de ses ancêtres et se promet de défendre à l'avenir, envers et contre tous, les conquêtes de notre grande Révolution que lui ont léguées aux aïeux, ses bienfaiteurs, les immortels de 1789.

Annexe au titre IV : enseignement


Les archives communales sont muettes sur l'organisation de l'enseignement public avant 1750. Il n'y avait donc pas d'écoles ni de maîtres proprement dits. La tradition affirme cependant qu'une école dirigée par les moines, était attachée au monastère. On y enseignait le plain-chant, la lecture, peu ou point de calcul et les éléments de l'écriture. Tout le monde n'y était pas admis ; l'abbé se réservait le droit de désigner les élèves qui pourraient suivre l'enseignement du couvent. On y formait des sacristains, des chantres et quelques capistes.

A partir de 1720 jusqu'en 1789, le desservant de la paroisse ouvre une petite école pour les garçons dans la sacristie de l'église. En même temps, quelques instituteurs ambulants, nourris et logés à tour de rôle par quelques riches propriétaires, vont de maison en maison enseignant les éléments de la lecture, de l'écriture et du calcul.

Ce n'est qu'en 1789 que la commone possède un instituteur public. Agréé par le Conseil municipal et par Mr le Curé, il repmplissait également les fonctions de secrétaire de mairie, de sacristain et de chantre de l'église. Dans son école on apprenait le catéchisme, l'histoire sainte, l'évangile, la lecture, l'écriture et les quatre premières règles de l'arithmétique. Mr Noguès enseignait en autre à ses élèves l'art de tisser les bas, les blunets et les gilets de laine. Il était payé à raison de 25 litres de blé par élève.

Les successeurs : Bonnefoi (1815-1818), Vignaux ( 1818-1822), Lajus ( 1822-1829) le remplacent dans les mêmes conditions et avec le même programme moins le tricot.

La maison d'école, située sur l'emplacement actuel du presbytère était une vieille maison, ouverte à tous les vents et construite sur des piquets.

De 1829 à 1848, Mr Pérès, bachelier ès-lettres, ancien diacre, relève le niveau de l'enseignement. Il fit de bons élèves et ne laisse à Larreule que de bons souvenirs. Il n'enseigna cependant la grammaire qu'à partir de la loi de 1833.

L'ancienne maison d'école avait disparu et avait été remplacée par une maison solide, mais mal appropriée.

Après Lr Pérès arrive Mr Abadie, élève de l'école normale. Ce dernier ayant quitté la commune en 1856, fut remplacé par Mr Lasserre jusqu'en 1858, époque où il abandonne l'enseignement pour entrer dans l'administration des ponts et chaussées.

Son successeur, Mr Toujas (1858-864) est un des meilleurs instituteurs qu'ait possédés la commune. Il mourut à Larreule, dans la force de l'âge, enlevé à l'affection unanime de tous ses concitoyens.

A sa mort, Mr Abadie fut replacé à Larreule où il exerça la fonction d'instituteur public jusqu'en 1878, époque où il fut admis à faire valoir ses droits à la retraite. De 1878 à 1880, Mr Contre, sujet d'élite, fit briller d'un vif éclat l'école de Larreule pendant son court passage dans la commune.

Titulaire actuel depuis 1880 : Sensever.

Larreule n'a possédé d'institutrice jusqu'en 1820 environ.

Institutrices privées : Madame Mauvezin , Mme Beaulies ( 1820-1830), Madeleine Agasse ( 1830-1838), Mlle Laffon ( 1838-1845). Leurs programmes successifs étaient semblables à ceux des instituteurs : Voguès, Bonnefoi, Vignaux et Lajus. Ce n'est qu'en 1850 que Mlle Laffon (1850-1886) entrée en religion, fonda la couvent actuel et fut nommée institutrice communale peu de temps après.

L'école des filles a été laïcicée en 1886. Depuis cette époque, Mlle Cénac, élève du Lycée des jeunes filles de Tarbes, pourvue du brevet supérieur, dirige l'école communale avec autant de zèle que d'intelligence et de savoir.

La création d'un groupe scolaire s'imposant à la commune pour trois motifs principaux :

1°- L'insalubrité de l'ancien local de l'école des garçons lequel d'ailleurs ne répondait plus à tous les besoins.

2°- Le désir de la municipalité de laïciser l'école congréganiste.

3°- Le manque d'un local pour cette création. Me Caddau, architecte de la ville de Tarbes, fut chargé en 1882 de dresser le plan du magnifique groupe scolaire qui s'élève aujourd'hui au centre du camp de l'Abbaye, devenu place publique .

Cette belle construction se divise en trois parties bien distinctes et et tout à fait indépendantes les unes des autres.

Au centre, la mairie ; au nord, l'école des filles, le logement et le jardin de l'institutrice ; au sud, l'école des garçons, le logement et le jardin de l'instituteur ; à l'ouest les cours sablées et les préaux couverts.

Les écoles, planchéiées, vastes et spacieuses, complétées chacune par un vestibule et un vestiaire, sont très bien éclairées, d'une aération facile et exposées au levant. Elles mesurent chacune 8 mètres 25, 6 m 25 de large sur 4 m de haut.

Leurs surfaces respectives sont de : 8,25 x 6,25= 51 m² 56
Volume : 51,56 x 4 = 206 mètres cubes 250
Les cours mesurent : 19 m x 15,60 soit 296 m²
Les préaux couverts : 13 x 6,58 soit 85 m² 54
Les jardins : 28 x 18 soit 5 ares 04

Les logements se composent de quatre pièces chacun, savoir : deux chambres à coucher, une salle à manger et une cuisine.

Le mobilier scolaire, nouveau modèle, est neuf et en très bon état. Il serait pourtant à désirer :

1° - Que les coisées de dimensions colossales fussent garnies de rideaux ;

2° - Que les murs des jardins soit exhausés ou munis de grille ;

3° - Que deux pompes fussent placées le plus tôt possible ;

4° - Que les préaux couverts fusssent complétés par des agrès de gymnastique ;

5° - Que des hangars fussent construits pour permettre l'élevage des animaux de basse-cour et pour remiser le bois et le vin. Cette dernière construction est celle dont le besoin se fait le plus vivement sentir.

Une somme de 1.500 frs serait d'ailleurs plus que suffisante pour réaliser ces urgentes améliorations.

La fréquentation de l'école est bonne.

La moyenne des présences est de 44 sur 48 inscriptions ; aussi l'état de l'instruction primaire est-il très insuffisant. Un grand nombre d'élèves âgés de plus de 14 ans sont envoyés chaque année au collège de Vic ou dans des pensions secondaires pour compléter leur instruction. Ce mouvement a cependant diminué d'intensité depuis 3 ou 4 ans. Les quelques bons résultats obtenus dans l'école des garçons et le relèvement des programmes ne sont peut-être pas tout à fait étrangers à cette diminution.

Les rares illettrés qui sont venus s'y établir ; aussi pouvant nous affirmer qu'il n'existe pas trois électeurs, àgés de moins de 45 ans, nés dans la commune, qui ne sachent lire, écrire et compter.

Les chiffres, soixante, sont d'ailleurs assez éloquents par eux-mêmes :

Nombre des conscrits illettrés de la dernière année... Néant.
Nombre des conscrits qui n'ont pas pu signer leur nom... Néant.
Même constatation pour les ann&eaute;es 1885, 1883, 1881.

L'organisation définitive de la bibliothèque scolaire recule au 1er Janvier 1881. La commune possédait déjà l'armoire, mais sans livres. Sur nos livres existants, la municipalité envoie chaque année une somme de 25 frs sur son budget pour achat de quelques volumes. Ces sacrifices ont été récompensés par une concession de 22 volumes, accordée par le Ministère de l'Instruction public en Juin 1886.

La bibliothèque possède ce jour :

1° - Livres destinés aux familles...44
2° - Livres destinés aux élèves...46
Nombre de prêts pendant les 3 premiers mois de 1887... 16

L'instituteur a un traitement de 1.000 frs.
L'institutrice communale... 800 frs.

Outre les deux écoles laïques, il existe encore une école privée et gratuite, dirigée par les soeurs de St Joseph, autrefois communale.

Une propagande active et surtout certaines influences que nous n'avons pas à désigner ici, ont abouti, après des efforts surhumains, à faire inscrire 10 élèves à l'école congréganiste. Ce chiffre n'a pas besoin de commentaire.

Conclusion :

Que faut-il ajouter, que reste t-il à désirer pour que la commune de Larreule maintienne son ancienne réputation ? L'union de tous ses enfants pour ne former à l'avenir qu'un seul faisceau de cultivateurs intelligents, d'hommes éclairés pour la société, de bons défenseurs pour la patrie, d'excellents citoyens pour la République !!!



L'instituteur public

Larreule le 10 avril 1887

Jn Sensever




[Plan du site passion-bigorrehp.org]



[Commune de Larreule.]
[Généralités sur les Communes]
[Sommaire]




Chacun peut apporter son aide concernant les monographies de 1887 des communes
de la Bigorre devenue Hautes-Pyrénées
département 65.
© Marie-Pierre MANET









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