Une petite page d'histoire locale :
La commune d'Ozon
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[1] Ozon est un nom qu'on a voulu probablement déduire du terme basque oso (parfaitement bon), et par extension (d'après Montlezun) lieu sain, hygiénique, fertile.

Ce lieu, qui dépendait de la Bigorre, se trouvait enclavé entre la pays des Fittes et Reffites et le Nébouzan.

Il appartenait au quarteron de Tarbes et payait au bureau de cette ville les impositions inscrites sur le Rôle pour 10 feux 2 quarts de taille.

La justice basse, d'après le Censier de Bigorre de 1429, était exercée par le seigneur d'Ozon [...].

Dans la suite, le droit de justice du seigneur prend plus d'extension ; dès 1536, il a la justice moyenne, civile et basse, et à partir de 1541 les dénombrements stipulent en sa faveur le droit de tenir en prison le responsable d'une querelle pendant 24 heures et de lui faire payer " la loy de dix sols bons. "

Ozon relevait aussi de l'arrondissement roturier du sénéchal de Bigorre en première instance, et en dernier ressort de la Cour du Parlement de Toulouse.

Le seigneur était le patron du lieu, il avait le droit de nomination à la cure d'Ozon avec les annexes et dépendances d'icelle, et la dîme. Celle-ci, aliénée au chapitre de Tarbes en 1440 par Pierre d'Ozon, fut rachetée de l'évêque Claude de Houssay, en 1655, par un Pal de Cardaillac. Il avait en plus la dîme du parsan de Castéra.

Le seigneur d'Ozon avait encore bon nombre d'autres prérogatives. Outre le droit du sang qui prescrivait que " celui qui se blesse doit porter l'instrument avec lequel il s'est blessé, sous peine de dix sols d'amende, et que le bête qui blesse quelqu'un doit être confiquée au seigneur ", il avait le droit de confiscation du bétail " qui a gîtté audit lieu pour hiverner au della d'une nuit " sans sa permission ; droit sur les deux tiers des bois que la communauté possédait ; droit de prendre les terres délaissées et abandonnées ; droit de lods (location) et ventes acquis du roi, et quiconque ne l'acquittait pas s'exposait à une amende de quinze sols ; droit de trois ou quatre corvées par an et par habitant ; droit de fournage à raison de deux mesures de froment pour chaque maison, et banalité du moulin (sur 16 mesures, une pour droit de mouture) ; droit de fixer l'époque des vendanges ; droit d'un pot de vin sur chaque vaisseau que les cabaretiers payaient pour le vendre à pot et à pinte ; droit, le jour des noces des habitants, d'un pot de vin, un sou de pain et une poule ; droit de taille, en cas de mariage de ses filles, à raison de dix petits écus ; droit de dix sols bons sur ceux qui traversaient ses terres et sur ceux qui commettaient un excès sur un forain ; droit de choisir trois consuls sur une liste de six habitants que les consuls sortant de charge lui présentaient ; droit de cinq sols bons sur les plaideurs devant les consuls du dit lieu ; à l'église, droit d'offrande, les quatre fêtes solenelles de l'année, d'eau bénite par aspersion ; droit de banc entre le sanctuaire et la nef, et celui de graver ses armes (qu'on appelait droit de litre) ; enfin, droit d'entrée aux États de Bigorre.

Le seigneur d'Ozon n'avait pas que des droits, il avait aussi des devoirs envers le Comte, son suzerain, et partant, nous dit le Censier de 1429 " le sehor d'Ozon es tengut de pagar cascun an au Comte XXII sols, VI dine morlas. Iten que son tenguts de fer au comte host et cavalgade, per quan son mandats."

Les tenanciers d'Ozon, au nombre de dix-huit à cette époque, étaient tenus de payer leurs redevances au seigneur à la fête de Saint-Martin (le 11 novembre).[...]

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La paroisse d'Ozon étaient rattachée à l'archiprêtré de Tournay, dépendant lui-même de l'archidiaconé de Rustan, dans le diocèse de Tarbes.

Elle avait une église paroissiale dédiée à l'Assomption de la Vierge, un prieuré sous l'invocation de St-Martin avec une chapelle dédiée à ce saint au quartier de ce nom, une chapelle St-Jacques située sur la rive gauche de l'Arros au quartier St-Jacques et une autre chapelle au Château, fondée le 7 septembre 1697 ; ces trois chapelles subsistaient encore au début du XIXe siècle.

Vers 1865, les habitants d'Ozon-Darré en édifièrent une nouvelle qui fut placée sous le patronage de Notre-Dame de l'Assomption, lors de sa bénédiction solennelle le 12 avril 1867.

Un couvent des Filles de la Croix, pour l'instruction des jeunes filles, fut établi dans cette paroisse vers 1834, dépendant de la maison mère de Lapuye (département de la Vienne).

Ozon devint en 1790 une commune du canton de Tournay où elle eût plus tard son siège de perception pour les contributions foncières et aussi sa justice de paix.

Elle est bien dotée de voies de communication par la route nationale n°117 qui la traverse, et aussi par sa halte de chemin de fer dite d'Ozon-Lanespède ; elle est privilégiée aussi par sa situation, son climat et la fertilité de son sol, autant que Tournay et Bordes.

Assis entre deux côteaux qui lui servent d'abri, le bourg principal s'étage néanmoins à la base de la colline Est, et ainsi reçoit l'air pur de la vallée, échappe à l'atmosphère humide de l'Arros, et se réchauffe au soleil jusqu'à le dernière heure du jour.

Son terrain est fertile ; les fruits y sont délicieux et le vin en est exquis ; c'est le pays des meilleurs produits potagers, sans compter que les herbages y sont très nourrissants.

Cette terre, toujours riante et bien ensoleillée, a été convoitée à diverses époques par des andes guerrières qui sont venues la fouler et quelque fois s'y fixer.

Tels, les Romains conduits par Crassus, lieutenant de César, 56 ans avant l'ère chrétienne, qui séjournèrent en ce lieu : plusieurs monnaies romaines ont été découvertes en 1836, en même temps que des cercueils lapidaires, au quartier St-Martin, non loin de la station du chemin de fer. Le nom Castéra (section A, dite du Castéra) est d'ailleurs assez significatif : il indique qu'un camp militaire romain était placé là, en vue de Cieutat, ville importante de la Novempopulanie.

Le souvenir des Maures ou Sarrazins, qui pillèrent la Bigorre vers 732, y est gardé aussi par le nom de Moura, un quartier de la section B du plan cadastral.

Ozon eut à supporter encore, pendant un mois et demi, l'occupation des troupes du duc d'Anjou, frère du roi de France, qui voulut assiéger en juin 1373 le château de Mauvezin, pris par les troupes anglaises du Prince Noir, trois ans auparavant "... avait le Duc (d'Anjou) en sa compagnie bien huit mille combattants, sans les Gennevois et les communes des bonnes villes des sénéchaussées de ce pays ... étaient le duc et ses gens logés en ces beaux prés, entre Tournay et le Chastel. Environ six semaines se tint le siège... ", dit Froissard dans ses chroniques (1330-1400).

La première moitié du XVIe siècle est marquée par plusieurs disputes qui eurent lieu au sujet des pacages entre les habitants d'Ozon et ceux de Tournay, et même par des rixes sanglantes, où quelques Tournayais trouvèrent la mort.

D'après la procédure ordonnée par Alain d'Albret, tuteur d'Henri II de Navarre, un Mathiü, bastard d'Ozon, fut le plus compromis dans cette lutte tragique, et c'est contre lui que [...] viennent témoigner les consuls et habitants de Tournay.[...]

Vers 1518, on eut à déplorer encore entre les bergers des mêmes communautés d'autres effusions de sang. Plus tard, vers 1537, les rappors se trouvent de nouveau envenimés ; mais cette fois, le différend se termina à l'amiable : " Les communautés de Tournay et d'Ozon, ayant eu dispute pour le pacage, noble Arnaud de Cardeillac et Jeanne d'Ozon, mariés, prirent la parti des habitants de leur village. On convint d'arbitre, et l'on choisit Pierre de Nogario et Pierre de St Albino, avocats à Tarbes, auxquels les dits seigneur et dame d'une part, et les habitants de Tournay et d'Ozon donnèrent chacun leurs pouvoirs en trois actes différents. Il fut mis en principe que... la coutume ancienne que " no es memeria de contrari es en lo présent pays de Gyayne de fer paxe lo bestiaü de vesin à vesin..."

Au mois d'août 1569, les Hugenots incendièrent l'église d'Ozon et plus tard le château fut assiégé, mais le seigneur de Cardeillac en chasse les ennemis.

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Ozon avait un château féodal qui remontait à une époque fort reculée dans le Moyen-Âge. Il s'élevait sur la rive droite de l'Arros à quelques mètres au nord-ouest du château actuel. Vers 1870, il eût été encore possible, par ce qui restait des fondations, d'en reconstituer le plan. Mais, la dynamite achevant l'œuvre de destruction, des jardins anglais et des promenades ombragées prirent la place du vieux castel.

Le château actuel fut construit vers la fin du XVIIe siècle : " Le P. Saguens, religieux Minime, un des plus habiles mathématiciens de son siècle, en dressa le plan suivant toutes les règles de l'architecture et le goût du temps, de manière que cet édifice ait l'air d'une maison noble ". Depuis près d'un demi-siècle, le parc est orné de belles plantations d'arbres exotiques, et une balustrade en pierre de Lourdes se dresse le long de la terrasse.

Les terres attenantes au château et celles de trois autres métairies qui en dépendaient avaient une superficie d'environ 190 hectares. Un moulin banal moulant à quatre meules, sis sur la rivière de l'Arros, était en ferme pour 156 sacs de grain l'an.

Il devait y avoir de l'abondance dans les greniers et la cave du château, car en maintes circonstances, durant les trois derniers siècles de l'Ancien Régime, outre la communauté d'Ozon, les consuls et habitants de Bernadets, Burg, Orieux, Goudon, Clarac, Bordes, etc..., y contractèrent des dettes fréquentes pour achats de seigle, carron, millet, avoine, fourrages et vin.

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Les seigneurs d'Ozon[2] ne sont pas connus antérieurement au XIIe siècle, et depuis cette époque voici telle qu'elle est établie, la suite des familles seigneuriales :

Les Ozon arrivèrent, par la descendance mâle, en 1513 ; mais la race, par Jeanne d'Ozon, héritière de sa Maison, mariée vers 1525 à Arnaud de Cardeillac de Lomné, se continue jusqu'en 1748 date à laquelle la Maison d'Ozon[3] alla par héritage à la Maison de Galard, au comte Joseph de Latour, seigneur de Landorthe.

Le château et la terre d'Ozon passèrent ensuite aux mains de Messire Jean de Cénac, lequel vendit le tout à M. de Bombarde en 1755.

Celui-ci en fit donation en 1760, à Anne de Montesquiou, vicomte de Fezensac, marquis et baron de Montesquiou, chanoine honoraire de l'église métropolitaine d'Auch.[4]

En 1778, le dit château et les terres furent achetées à de Montesquiou pour 190.000 livres par Mlle Marguerite de Lassus de Saint-Geniès, représentée par sa sœur Marie-Pétronille, mariée à Nicolas Frémin de Beaumont[5]. Leur fille (nièce de Marguerite de Lassus) Justine Frémin de Beaumont, en hérita ; elle fut mariée en 1805 à Hyacinthe de Saint-Pastou.

Marie de St-Pastous, leur fille, fut héritière et épousa en 1835 le Comte Maxime de Roquette-Buisson.

Le domaine et le château d'Ozon échurent à l'une de leurs filles, Marguerite de Roquette-Buisson ; laquelle fut mariée en 1869 au Comte Alphonse d'Exéa.

Ces familles ont joui d'une grande réputation dans le pays, car d'elles sont isus des hommes distingués dans les rangs de l'église, de l'armée, etc...

Arnaud-Guillaume d'Ozon, évêque de Bigorre de 1777 à 1795, assista au concile général de Latran en 1779, sous le pape Alexandre III.

Jean 1er de Cardeillac, vaillant défenseur de Tarbes en 1574, puis de Bagnères, fut établi gouverneur de cette dernière ville.[6]

Jean-Jacques de Cardeillac, lieutenant de dragons, se distingua aux batailles de Steinkerque et de Neervinden (Belgique) en 1692 et 1693.

Jean-Charles de Cardeillac, qui avait servi à Malte avec distinction, fut nommé chevalier de l'ordre, puis commandeur de St-Jean de Toulouse.[7]

Maxime de Roquette-Buisson, avocat, substitut du procureur du roi au tribunal d'Étampes en 1824, procureur du roi à St-Gaudens en 1827, devint Conseiller Général d'Hauterive (Hte-Garonne) et député de ce département de 1849 à 1852.[8]

Le Comte d'Exéa fut capitaine des mobiles en 1870, puis chef de bataillon. Un autre d'Exéa était Général au moment de la guerre contre la Prusse. Il allait enlever le roi à Ferrières, avec l'autorisation du gouvernement, lorsque arriva un contre-ordre au moment où il montait à cheval. Il mourut à l'âge de 95 ans, le 9 Février 1902.[9]




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Notes

[1] Sources : Gallica.bnf.fr
Bibliothèque Nationale de France
En cournè det houéc ;
Journal des cours d'adultes du département des Hautes-Pyrénées
Société d'entraide pédagogique - Bagnères - 1925.


[2] À une certaine époque, un seigneur d'Ozon et un autre d'Estampes ayant maltraité l'archiprêtre de Tournay
furent condamnés à la prison. L'évêque de Tarbes, qui avait reçu pouvoir de commuer cette peine, les condamna à demander pardon
à l'archiprêtre, les deux genoux à terre, devant la porte de l'église de Tournay, le premier dimanchequi suivrait la signification de ce jugement,
un peu avant la messe de paroisse, et de plus à payer 60 livres à l'œuvre de la dite église.
(Les fabriques du diocèce de Tarbes, par l'abbé Lafforgue, Tome 1er, pages 114 et 115).


[3] Bernard fut le dernier des Cardeillac d'Ozon. Il épousa Henriette Élizabeth de Rochechouard, le 12 octobre 1723, à Luc, (registres de catholicité de la paroisse de Luc, année 1723 p 3 et 4)


[4] Un Bernard-Loudat de Montesquiou, issu de cette ancienne Maison, fut archidiacre d'Auch en 1134 et évêque de Bigorre vers l'année 1141 et jusqu' 1175.
(histoire de Bigorre, par l'abbé Duco, publiée par l'abbé Duffo).


[5] Frémin de Beaumont fut membre du Cops législatif. Il devait périr, en 1704, sur l'échafaud ; il " gémit pendant cent jours dans une maison d'arrêt".


[6] Son cousin, Raymond de Cardeillac, seigneur de Sarlabous, chevalier de l'ordre du roi, colonel d'Infanterie, gouverneur d'Aigues-Morte, combattit à la tête de son régiment à Moncontour ; il convoqua à Tarbes les trois ordres des états de Bigorre, et y organisa la défense de cette province entre les protestants.


[7] Un Jean de Cardeillac fut patriarche d'Alexandrie et archev≖que de Toulouse.


[8] Un Gabrile de Roquette fut évêque d'Autun (1666-1703). Un autre, Emmanuel de Roquelle, abbé de St-Gildas, devint membre de l'Académie française.


[9] Un d'Exéa fut patriarche d'Antioche ; un autre, archevêque de Séville, et un autre encore évêque d'Elne.






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de la Bigorre devenue Hautes-Pyrénées
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© Marie-Pierre MANET








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