[1] D'après les coutumes de Bigorre, tout chasseur était tenu de payer au seigneur sur les terres duquel il avait pris un chevreuil ou un sanglier une redevance dont la plus en usage était connue sous le nom de symier ou semée.Ce droit consistait généralement dans la tête, le pied ou un quartier de l'animal tué. Ceux qui ne l'acquittaient pas encouraient une sanction consistant le plus souvent en une forte amende.
Toute la Bigorre, surtout ses parties montagneuses, était infestée d'un nombre considérable de loups et d'ours.
L'hiver, lorsque la neige les obligeait à descendre dans la plaine, il y faisaient d'énormes ravages. Les loups surtout constituaient un véritable fléau dans les campagnes où ils rôdaient nombreux non loin des habitations.
El l'année 1770, un gentilhomme du Nivernais publia un mémoire sur leur destruction. Ce mémoire fut distribué à toutes les communes de Bigorre. L'emploi du poison y était préconisé :
" Chaque personne achetteroit un bête au plus bas prix, soit âne, cheval, bœuf ou vache ; cette bête seroit conduite, au jour indiqué dans un endroit désigné, et le plus à la portée des bois, là où elle seroit tuée et écorchée, on en découperoit les muscles, on saupoudreroit le tout de noix vomique pilée... ; au bout de 8 à 10 jours d'exposition de cette bête on en enterreroit les restes qui pourroient nuire aux chiens ; un syndic seroit chargé de cette opération, et, il seroit tenu, sous peine de forte amende, d'envoyer dans le mois suivant au Ministère un certificat signé du Seigneur, du Curé et de plusieurs notables de l'exactitude avec laquelle l'opération auroit été faite. "
Rien ne nous indique si ce procédé qui n'était pas sans présenter de graves dangers pour certains animaux domestiques, principalement les chiens, fut mis en usage.
La capture des loups se faisait généralement au moyen de pièges, rets, lassières (espèces de Bourses) ou avec des fosses appelés trappes.
Les battues s'effectuaient avec ou sans chiens courants.
Plusieurs chasseurs se rassemblaient armés soit de fourches, soit de bâtons. Les plus adroits étaient armés, selon les époques, de l'arc, de l'arbalète ou de l'arquebuse. Ces derniers se plaçaient aux endroits où les loups étaient susceptibles de passer pendant que les autres marchaient dans la forêt, en ligne déployée à quelque distance les uns des autres accompagnés de gros chiens. Ils faisaent le plus de bruit possible pour obliger les loups à se diriger vers les passages où se tenaient les tireurs.
La chasse de l'ours se pratiquait à peu près dans les mêmes conditions mais de préférences à l'affût et au moyen de trous profonds dissimulés acec de branchages qui, ne supportant pas le poids de l'animal, l'entraînaient au fond du précipice.
" Les pâtres qui gardent de nombreux troupeaux sur les montagnes, - écrivait M. de Froidour au XVIIe siècle - sont souvent exposés aux attaques des ours. Ils s'en garantissent en montant sur le premier arbres qu'ils trouvent armés d'une dague ou d'une petite cognée. L'ours, quoique lourd et pesant, grimpe sur l'arbre avec assez de facilité, mais, dès qu'il avance les pattes pour saisir le pâtre avec les griffes, celui-ci les lui coupe à coups de cognée. L'ours tombe à terre, et, étant sans défense, le tue ensuite sans beaucoup de peine. Mais si les pâtres sont surpris par les ours sans qu'ils aient le temps de monter sur un arbre, ils courent un grand danger. Il est vrai qu'il s'en est trouvé qui ont assez de courage et de fermeté pour attendre l'ours et se battre avec lui. Voici ce qui est souvent arrivé : l'ours se lève tout droit pour prendre le pâtre au corps mais celui-ci qui est armé d'une dague, a l'adresse de faire passer le museau de l'ours par dessus son épaule, sur laquelle il le tient étroitement serré. L'ours qui est plus fort, le reverse à terre et s'ils se trouvent sur un penchant, ils roulent ainsi embrassés jusqu'à ce que le pâtre a tué l'ours à coups de dague qui lui loge dans les reins. Il ne sort pas de ce combat sans avoir reçu plusieurs blessures par les griffes de l'ours ; mais c'est beaucoup qu'il ait pu garantir sa vie... "
Un autre genre de chasse à l'ours dans nos montagnes consistait pour les chasseurs à se couvrir le visage d'un masque de fer et de porter un corselet de même métal, semblable à une cuirasse. Armés d'un coutelas, ils s'en allaient, ainsi protégés, s'embusquer dans des passages resserrés. Dès leur rencontre avec l'ours ils engageaient avec lui un corps à corps. L'animal s'efforçait de leur labourer les épaules de ses griffes et de leur mordre le visage, mais ses ongles glissaient sur l'acier et ses dents se brisaient contre le masque d'airain.
La malheureuse bête finissait par périr par le couteau plongé en plein le cœur.
Lorsqu'un chasseur tuait un ours ou un loup, il était tenu, comme pour le chevreuil et le sanglier, de présenter la tête ou le pied de l'animal, non pour payer le symier, mais pour obtenir une prime promise.
Dans la Vallée de Sain'-Savin, celui qui prenait un ours de deux ans ou plus recevait 3 florins et la permission de faire la quête ; celui qui prenait un ourson recevait 12 sols bons.
Celui qui tuait un loup recevait un écu petit avec la persmission de quêter ; de même pour celui qui prenait une portée de louveteaux.
Eugène Duviau
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