[1] Dans nos montagnes, le premier éclairage connu fut - comme nous l'avons vu chez les Romains et les Grecs - la tède, du latin taeda, morceau de pin dont les éclats résineux formaient les torches.Sous le manteau des cheminées de nos cuisines ou des maisons d'habitation de nos montagnards, nous avons vu une ardoise assujettie par un de ses bouts dans les joints des pierres de la paroi et servant de support au petit bûcher de branches de pin ou bûchettes résineuses. Cet appareil primitif devait remonter aux temps préhistoriques.
Puis vinrent, du VIe au VIIe siècle, les chandelles (candelae, candèles) qui éclairaient les maisons, et étaient faites de chanvre ou détoupe que les Grecs et les Romains imprégnaient de résine, de poix ou de cire et dont ils faisaient leurs torches.
Nos paysans empruntèrent à la civilisation romaine des chandelles (candelae, candèles) qui furent très répandues dans la classe pauvre de nos basses vallées.
Nous avons vu faire et utiliser ces chandelles de résine dans nos maisons bourgeoises de la plaine de Bigorre. C'est surtout des Landes que nous vient la résine (arrousie).
On achetait au marché lou pasteg de arrousie (le gâteau de résine) qui avait la forme d'un plat creux et pesait dans les 500 grammes environ. On le faisait fondre à petit feu dans une bassine, au fond de laquelle était gravé le plus souvent un M et parfois l'initiale du nom du frabricant de pasteg.
La chandelle de résine (candele de arrousie) était faite avec des filaments de chanvre, du lin ou de l'étoupe de 40 à 60 centimètres et aussi un mètre de longueur. On trempait cette mèche dans la bassine, puis on l'arrondissait en la roulant sous des mains mouillées sur une ardoise ou une plaque de métal appropriée.
Chaque ménage fabriquait ses chandelles de résine. L'appareil spécial qui servait à maintenir la chandelle s'appelait lou candelè ; ceux qui ne le possédaient pas utilisaient une tige en bois fendue à une extrémité pour pincer la chandelle (candèle) et s'arrangeaient pour que l'autre extrémité eût trois branches, fût trifourchue et reposât comme un trépied sur le sol, et si cette extrémité était unie, droite, ils l'enfonçaient dans un trou ou dans la paroi du mur, sous le manteau de la cheminée à la cuisine ou dans la grange.
Cet appareil s'appelait, dans nos régions pyrénéennes, mourgacho.
Ce n'est difficilement, à regret et peu à peu, que nos populations rurales renoncèrent à leurs candelès pour la lampe (caleil) qui, bien que très rudimentaires, fut considérée comme un progrès sur les chandelles de résine.
C'était le plus souvent un petit vase en cuivre jaune, sans couvercle, autour duquel étaient pratiquées une, deux, trois et jusqu'à trois échancrures qui servaient de becs pour la mèche. A cette lampe, qui était en fer forgé, en Provence, et en cuivre, en Gascogne, ne tarda pas à être assujetti un récipient inférieur pour recevoir l'huile qui pouvait s'échapper de celle-ci. Elle était suspendue comme lou caleu provençal, par une tige en fer mobile.
Cette lampe dérive directement de la lampe punique ou carthaginoise.
Ces lampes portatives sont munies d'une tige terminée par un harpon ou crochet qui servait à les accrocher au mur ou à les suspendre à un clou ou à un meuble.
Nous en avons vu de semblables, il y a une quinzaine d'années encore, brûlant à l'air libre, dans des écuries, des granges et sous le spacieux manteau d'une cheminée de cuisine.
Et voici deux spécimens en fer forgé assez remarquables : l'une est ornée de deux fleurs de lys et date de l'époque Louis XIII ; l'autre porte le bonnet phrygien et a éclairé à Paris la salle des Jacobins en 1793.
F. de CARDAILLAC (1922)
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