Des réfugiés polonais
dans les Hautes-Pyrénées
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[1] Parmi les réfugiés politiques ayant résidé dans les Hautes-Pyrénées, il y a, comme presque partout, un groupe de réfugiés polonais ou plutôt deux groupes de polonais réfugiés, les uns après la révolte de 1830, les autres après celle de 1863. Sur cette émigration, la série M, donne des renseignements moins complets qu'on pourrait le désirer, mais néanmoins intéressants. Les premiers polonais arrivent dans le Département en 1834. Leur nombre varie entre 25 et 30, les années suivantes. Ils touchent des subsides accordés aux réfugiés politiques et les états montrent qu'il s'agit en majeure partie d'officiers de l'armée polonaise ; certains, tel que le prince Czetwertynski appartiennent à la haute noblesse. Il y a également quelques sous-officiers et soldats. A côté d'un groupe stable (très relativement) il y avait ceux qui passaient quelques mois seulement dans le Département, la plupart se rendant à Barèges (il s'agit d'officiers plus ou moins infirmes).

Des instructions sont données pour que le nombre des polonais y soit limité et le bénéfice des bains gratuits réservé aux cas les plus intéressants. En 1838, une trentaine de Polonais en moyenne, se trouvent à Barèges, venant de toute la France.

A part une proportion assez forte d'officiers âgés et infirmes habitués de Barèges, l'élément "stable" ne l'est guère en fait. La moyenne des Polonais reste sensiblement la même, mais il y a de nombreux départs, compensés à peu près par les arrivées. De ce fait, le nombre de Polonais décroît lentement.

Du point de vue politique, leur attitude ne donne guère prise à la critique. L'incident le plus sérieux est une perquisition faite chez un Polonais soupçonné d'appartenir à une Société secrète démocratique en liaison avec les républicains hostiles à la monarchie de juillet. L'intéressé proteste de son innocence et finalement n'est pas inquiété. Autre incident sans gravité : aux obséques du prince Czetwertynski, en 1837, un réfugié est signalé comme ayant tenu des propos anti-russes, assez violents. Il est chapitré, mais on s'en tient là. Les réfugiés sont traité avec bienveillance. Certains bénéficient de hautes protections. L'un d'eux est recommandé par Thiers ; un autre par le Comte d'Ornano, commandant de la 4e Région militaire. On a, par exemple, des égards particuliers pour deux colonels infirmes, qui ont servi dans les Armées impériales, dont l'un faisait déjà partie de la Légion polonaise en 1798, et pour le prince Czetwertynski, qui sera enterré à Tarbes, et sur lequel ses amis publient une petite plaquette, reproduisant les discours prononcés à ses obsèques, notamment par un Tarbais, M. Ducru, inspecteur primaire.

Mis à part les officiers âgés ou infirmes, les plus jeunes essayent de se faire une situation en France. Les subsides sont assez minces et réduits progressivement. Les plus jeunes auxquels leurs connaissances de français, le permet, entreprennent des études supérieures. Certains entrent aux Ponts et Chaussées. L'un d'eux, à Montauban, doit s'occuper spécialement du canal des deux mers. Beaucoup apprennent un métier d'artisan et s'embauchent comme apprentis. La plupart ayant appris un métier, quittent Tarbes. Certains deviennent employés ou voyageurs de commerce.

Dans ces Polonais, un cas curieux est celui de Tomassewski, il est réclamé par deux érudits en vue de l'époque : Letrosne et Champollion Figae, qui déclarent avoir besoin de lui pour la reproduction des chartes mérovingiennes qui doivent être publiées. Le Ministre veut bien autoriser à revenir à Paris cet excellent lithographe. Il n'y a, parmi eux, qu'un prêtre qui s'établit à Toulouse, où il espère gagner sa vie comme professeur de langues. La plupart de ces réfugiés parlent et écrivent assez bien le français. C'est pour eux, un atout important. Ils font d'assez nombreuses dettes, pour le paiement desquelles des retenues sont faites sur leur subsides. Un des premiers réfugiés polonais (le colonel Téléki) a la chance de voir ses detttes qu'il a laissées à Montpellier, généreusement payées par un officier anglais, en villégiature dans les Pyrénées.

La deuxième émigration n'a pas, dans les Hautes-Pyrénées, l'importance - très relative - de la première. Un groupe de vingt officiers blessés et autorisés à se soigner à Barèges, mais, sauf un, ils rentrent à Paris. Les Polonais sont alors une vingtaine. Certains se préparent au Collège de Saint-Pé, au concours de grandes écoles. La plupart rentent groupés à Tarbes. Quelques-uns se marient à des Françaises. L'un d'eux qui a épousé une lingère assez bien achalandée, gagne quelque argent en chassant. En 1876, il y a encore huit polonais subventionnés, âgés et infimes. Le dernier polonais dont on trouve la trace - il y a à cette époque des lacunes dans les dossiers - quitte la Bigorre en 1888, pour terminer sa vie dans un hospice polonais de Paris.

L'étude de ces documents, si incomplets qu'ils soient, donne une impression favorable de cette émigration. Dans l'ensemble, - il y a évidemment quelques exceptions - ils semblent s'être efforcés de gagner leur vie. Il ne paraît pas y avoir lieu de retenir contre eux les dettes - en général minimes - qu'ils avaient laissées. Cette émigration Polonaise, somme toute, a été - même compte tenu de ceux qui ont fréquenté nos stations thermales - d'importance minime, mais il m'a paru intéressant de donner sur elle quelques renseignements sommaires.

J. Mangin






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Notes

[1] Source : Gallica.bnf.fr
Bibliothèque Nationale de France
Bulletin de la Société académique
des Hautes-Pyrénées
Société académique
des Hautes-Pyréneées - 1952


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© Marie-Pierre MANET








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