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Évolution d'un village
du Piémont Pyrénéen
de la préhistoire
à nos jours
.



(1er partie)


Sceau
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Ouvrages en vente
de Marie-Pierre Manet


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(© Madame Marthe Amiel-Delas)


A mes parents qui ont su me transmettre
l'amour et le respect du passé.


A tous ceux qui, depuis la préhistoire,
ont foulé le sol de ce village et dont
quelques gênes courent encore dans nos veines.


A tous ceux qui, dans un avenir proche ou lointain
s'abreuveront aux mêmes sources,
comtempleront les mêmes paysages.



Le sol de mon village est fait de la
poussière de mes ancêtres.



Avant-Propos



Depuis quelques decennies, la population de la France s'agglutine dans les villes. Nos contemporains vivent dans des conditions totalement artificielles : univers de béton, rythme de vie effréné, en complet décalage avec la nature.

Ils ne savent pas où ils vont ; ils ne savent plus d'où ils viennent. Certains se posent des questions. Ils ont perdu les repères de leurs ancêtres paysans qui s'appuyaient sur la Foi, la Famille, le sens aigu du Devoir, dont ils avaient été éduqués à faire, selon la maxime de Bourdaloue :

"Leur plaisir par rapport à eux-mêmes,
Leur honneur par rapport au monde,
Leur mérite par rapport à Dieu
"

Ce travail ne se veut pas un ouvrage d'historien, mais la simple relation de souvenirs personnels, de découvertes dans les archives municipales, départementales ou familiales et des récits des "Anciens", lorsqu'il y avait encore des veillées autour de la cheminée.

Un tout petit territoire de 1527 hectares est concerné. Cette unité géographique n'était pas un lieu de passage.

La Baïse n'étant pas navigable, les Normands ne purent la remonter. Burg, Begole ou Campistrous virent passer Montgomery en 1569 et Welligton en 1814, mais ce qui est devenu la route départementale nº 17 n'étant qu'un petit sentier, aucun de ces soudards ne fut tenté de s'y engager.

Cette situation a eu des conséquences positives. Les habitants vécurent paisibles, à l'abri des pillages et des violences. Ces populations sédentaires, endogames, auto-suffisantes, n'évoluèrent que très lentement et jusqu'à la première guerre mondiale, certains vivaient encore - presque- comme au Moyen-Âge.

L'auteur, qui a pleinement conscience des lacunes et imperfections de cet ouvrage, sollicite l'indulgence du lecteur tout en espérant avoir contribué à la connaissance de ces gens dont quelques uns de nos gênes gardent la mémoire.

M. A-D


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De châtillon en Bigorre à Castelbajac



Châtillon-en-Bigorre : prit le nom de CASTELBAJAC en Décembre 1352, nous verrons plus loin en quelles circonstances.

Le territoire de Castelbajac fut amputé d'un tiers environ de sa superficie vers 1780, par une vente au profit de la commune de Campistrous - puis d'un autre tiers lorsque la commune de Houeydets devint autonome en 1864.




SITUATION - RELIEF - GEOLOGIE :


A l'origine, Châtillon-en-Bigorre s'étendait sur une dizaine de kilomètres de long, des confins de Montastruc au Nord, aux abords de la Nationale 117 au Sud (les limites sont là assez floue) - occupant donc une des branches de l'éventail formé par le Plateau de Lannemezan.

Une longue crête Nord-Sud est encadrée par des pentes largement exposées à l'Est et à l'Ouest.

Le relief est assez tourmenté. De 600 mètre environ au Sud, l'altitude passe à 510 au Nord pour descendre à 360 mètres au fond des vallées.

Depuis les temps anciens, malgré l'érosion et de fréquentes mais faibles secousses sismiques, ce relief n'a guère évolué, créant une multitude de micro-climats.

Le flanc exposé à l'Ouest est nettement plus abrupt, conséquence certaine de l'action des vents d'Ouest très violents et des précipitations qu'ils apportent. D'aucuns y voient aussi une conséquence du sens de rotation de la terre. La pente qui est exposée à l'Est est beaucoup plus douce, donc plus facilement cultivable.

Façonnés par les plissements tertiaires particulièrement enchevêtrés et par les sédiments déposés par les glaciers qui formèrent le Plateau de Lannemezan, sol et sous-sol de Châtillon-en-Bigorre, sont très complexes.

Quelques amateurs ont cru déceler, entre les plissements des failles ou des cavités plus ou moins importantes mais cela n'a jamais été étudié sérieusement.

Le sous-sol est généralement composé d'argile très dure mais on trouve aussi un peu de boulbène (terre argilo-sablonneuse) ou de la marne et des schistes calcaires. Par endroits affleurent aussi quelques blocs de granit. Les moraines ont laissé d'importantes quantités de cailloux roulés composés de quartzite. La couche arable est très mince au Nord, peut-être parce qu'épuisée par une agriculture d'implantation très ancienne. Au Sud, au contraire, l'argile est recouverte d'une très épaisse couche de terre noire, légère, très riche en matières organiques, dûes sans doute à la lente décomposition de sphaignes et autres mousses, fougères ou bruyères qui ont prospéré librement jusqu'au milieu du XX e siècle.

Les recherches faites par des compagnies pétrolières aux environs de 1950 n'ont pas donné de résultats positifs, alors qu'un faible gisement de pétrole fut exploité à quelques kilomètres à peine (Bonrepos - Montastruc).

Trois carrières de marne ont été exploitées jusqu'en 1914 : les marnières de Baïsolle, de l'Anclou et de Gachiot. Elles fournissaient gratuitement aux agriculteurs, l'amendement nécessaire à ces sols particulièrement acides.

Entre les couches de marne, des shistes calcaires, en blocs plus ou moins volumineux (lavasses) étaient utilisées dans la construction des maisons (jambages, linteaux, pavage des sols). Dans les très vieilles cheminées, âtre et contre-cœur étaient formés d'une de ces grosses pierres (avant d'être remplacés par des plaques de fonte).

Il est fait état de l'emploi des pierres de ces carrières pour la réparation des églises de Trie et de Galan, au XX e siècle. L'exploitation des marnières fut abandonnée à partir de 1914 faute de main-d'œuvre.


CLIMAT :

Dire que le Plateau de Lannemezan a un climat rude est simplifié à l'extrême d'une réalité beaucoup plus complexe. L'influence océanique y est très forte et le touriste est frappé en été, par l'aspect verdoyant de la région.

La pluviomètrie : est assez importante et répartie tout au long de l'année. Il est rare de dépasser plus de trois semaines entre deux averses. Donner des moyennes ne peut que refléter très imparfaitement la réalité.

La pluviosité moyenne de l'année est de 1.300 millimètres. Les fortes précipitations se produisent surtout lors de très violents orages d'été, parfois accompagnés de grêle et de foudre qui causent de graves dégâts aux récoltes, aux lignes électriques ou téléphoniques.

Les printemps sont généralement maussades et les automnes doux et ensoleillés.

La principale caractéristique de ce climat est une excessive variabilité.

En Juillet par exemple, on a pu relever de 4 mm. à 22 cm de pluie.


LES VENTS :

Ils soufflent pratiquement tous les jours de l'année. Dominants d'Ouest, ils apportent pluie en été et neige en hiver, favorisant la formation de congères. Lorsqu'ils sont très forts on les appelle "Ben-Plouy".

Nos grands-pères parlaient de "l'année des grandes neiges". C'était en Février 1888. Il se forma des congères d'une telle importance que certaines personnes furent bloquées chez elles, surtout dans les maisons situées à l'Est de la route. L'amas de neige obstruait les portes d'entrées et les habitants durent attendre que leurs voisins moins éprouvés viennent pelleter la neige pour leur permettre de sortir de chez eux. Les vents du Sud sont assez importants. D'après une étude du Centre de Recherches Atmosphériques de Campistrous, si en durée on compte 37 % de vents d'Ouest, il y a 24,7 % de vents de Sud. Ils sévissent surtout la nuit. En été, ces vents très chauds sont souvent chargés de sable qui se dépose lors de la moindre averse. Si la pluie n'est pas assez abondante pour bien rincer la végétation, les animaux refusent de manger ces plantes car le sable agace leurs dents. Ces vents très fatigants en été sont par contre fort agréables en hiver où l'effet de Foehn réchauffe sensiblement la température.


L'AUTAN : est ici à l'extrémité de sa zone d'influence. Il rend les animaux nerveux, les gens irascibles et fatigue beaucoup les malades en raison de sa charge d'ions positifs. Par les vents du Nord et du Nord-Est, arrive le froid parfois sévère. Les vents d'Ouest ont parfois, au printemps, un effet très spectaculaire : ils apportent le pollen des pins des Landes qui forme un dépôt jaune d'or très particulier.


LES TEMPERATURES :

Les températures moyennes assez bien équilibrées entre les mois d'hiver (-4º) et l'été (+17) cachent des extrêmes assez prononcées : de -17 º à +37 º (soit 54 º d'écart). En été, les maxima sont souvent atteints en Août, mais les températures supérieures à 30 º se répartissent entre Juillet, Août et quelquefois la première semaine de Septembre. Les journées très chaudes sont peu nombreuses.

Entre les perturbations de l'équinoxe et avant celles de la Toussaint, il y a généralement " l'été de la Saint-Michel". Puis vient " l'été de la Saint-Martin" - Cela donne, non pas " l'été indien" mais ce que l'on pourrait appeler " l'été bigourdan".

L'AUTOMNE est la plus belle saison de l'année. Les températures sont agréables (on a connu +30 º fin octobre 1996) très supportables car les journées sont moins longues qu'en été. Ce beau temps dure souvent jusqu'à la mi-décembre. Les automnes sont splendides : le ciel d'un bleu intense, les feuillages flamboyants, les Pyrénées à peine couronnés de neige, qui prennent une teinte "améthyste", les couchers de soleil qui atteignent une rare splendeur sont une profonde jouissance pour les yeux. Champignons, châtaignes, figues, pommes, poires, raisins, dernières "pêches de vigne" parviennent à un degré de saveur d'une rare subtilité.

EN HIVER, on rencontre encore de belles journées : +24 º en Janvier 1966, + 23 º en Décembre 1965 et Février 1966. Les minima, sans atteindre les records de France (-41 º dans le Doubs) peuvent causer quelques gênes. Des pointes furent notées en 1985 avec -17 º, en 1986 -14 º, mais sur très peu de jours. La seule exception fut Février 1956 où le thermomètre descendit à -19 º et cela pendant un mois. Le bruit des arbres qui éclataient sur toute leur longueur ressemblait à des salves de grosse artillerie. Les glaces obstruaient les rivières gènant considérablement meuniers et boulangers. L'épaisseur de la couche de verglas rendait les déplacements très difficiles. Au dégel, le bilan des dégâts fut très lourd. Les routes étaient défoncées, beaucoup de récoltes furent détruites, les vignes et les arbres moururent ou furent très abîmés. Il y a eu d'autres hivers très froids. Les anciens parlaient de vin gelé qui avait fait éclater les tonneaux, mais sans préciser de dates. Cela a dû arriver il y a fort longtemps et très rarement.

De temps en temps se sont produits des phénomènes météorologiques aussi violents que spectaculaires ; les étés 1935 et 1936 virent, l'un une tornade qui enleva les toitures et sectiona de gros arbres à mi-hauteur, et l'autre une chute de blocs de glace atteignant un kilogramme.

Toutefois, même en hiver, le ciel reste d'un bleu très intense entre les nuages.


Le 28 Juin 1849 :

Trois personnes de Castelbajac :
Monsieur PIQUE Jean (AMBROSY), 75 ans, maire de la commune,
Monsieur GAYRIMOND Jean (PAROUAT), 66 ans, conseiller municipal,
Madame FONTAN Dominiquette, veuve DUBOSC BARTHET, 45 ans,
se rendirent à Tarbes en voiture à cheval.

Dans la journée survint un très violent orage. Nos voyageurs arrivèrent à Burg dans la soirée et on leur dit qu'il était impossible de rentrer à Castelbajac par la route habituelle car Baïse et Bégole avaient débordé et la vallée était inondée. Ils bravèrent les conseils qui leur étaient donnés. Le lendemain, ne les voyant pas rentrer, leurs familles entreprirent des recherches. Le cheval paissait dans un pré. Il avait pu se libérer de la carriole disloquée et les cadavres des trois personnes étaient accrochés aux branches des arbres. Un moulin avait été emporté.

Cette triple noyade impressionna fortement l'opinion car le maire était allé à la Préfecture pour présenter sa démission en raison du conflit qui l'opposait au curé de la paroisse : l'abbé CONTRE.

En résumé, on peut qualifier ce climat de très capricieux : les températures peuvent chuter de 15 et même 20 degrés en 24 heures. Les vents peuvent également tourner très rapidement et il est bon d'avoir toujours un lainage à portée de main.

HYDROGRAPHIE :

En raison du climat, du relief et de la nature du sol, l'eau est très présente.

LES RIVIÈRES :

A l'Est la BAYSOLLE, à l'Ouest Le BAÏSE-DARRE - connue jusqu'au siècle dernier sous le nom de RIOUPEYROUS, délimitent le territoire qui nous intéresse. Leur régime naturel est très irrégulier. Réduites à un simple filet d'eau en été et surtout en automne, elles sont sujettes à des crues aussi violentes que dévastatrices et imprévues à la faveur d'un orage ou de la brusque fonte des neiges. Leur débit fut amélioré au cours du XIX e siècle, grâce à l'apport d'eau de la Neste par l'intermédiaire d'un canal qui mérite un chapitre spécial (voir plus loin).

Avant 1909, les débits moyens respectifs de ces deux rivières étaient estimés à 200 et 50 litres seconde. Un décret fixa alors l'apport du canal de la Neste à 916 litres seconde pour la Baïse-Darrè et 256 litres seconde pour la Baysolle. En 1997, il semble que l'apport soit de 1.000 litres seconde pour la Baïse-Darrè et 1.5600 litres seconde pour la Baysolle.

De distance en distance, le lit de ces deux cours d'eau était coupé par des barrages sommaires faits essentiellement de branches entrelacées. Ils permettaient l'irrigation des prairies riveraines. Des digues plus sophistiquées alimentaient des moulins à farine, des scieries ou des batteuses.

Lors d'une période de sécheresse, dans les années 50, le Gers souffrait beaucoup du manque d'eau. Un commando de jeunes gersois remonta le cours des Baïses, faisant sauter tous les barrages. Cela ne leur donna pas plus d'eau dans l'immédiat, mais le lit de ces petits cours d'eau se creusa, le débit ne fut plus freiné par ces multiples digues et lorsque survinrent de très fortes pluies le 10 Juillet 1977, les rives furent emportées et, en aval, il y eut de très gros dégâts (Berdoues, Mirande etc...)




LES SOURCES

Les sources sont nombreuses alimentent des ruisselets coulant au fond des échancrures qui entaillent profondément les flancs de la colline principale. Ces minuscules cours d'eau alimentent les Baïses.

Tous ces points d'eau étaient, autrefois très bien entretenus et c'était un plaisir pour se promeneur de rencontrer une vasque soigneusement entourée de pierres ou de rondins destinée soit à abreuvrer les animaux, soit à assurer les besoins domestiques. Ces lieux frais et humides abritaient une flore et une flaune spécifiques (rainettes, tritons, salamandres, parfois même sangsues).

Les noms pittoresques ou imagés de ces sources sont parfois oubliés.

Sur le versant Ouest, d'amont en aval, on rencontrait l'Alia, Prédagné, Pich, Ouides, Hounttarrouy, Picharrottes (désignée dans les temps anciens sous le nom de "Hount dets Sarrazis") qui donnaient les ruisseaux de l'Anclou, de l'Artigahus, de Prédagné, du Pich, des Ouides, de Hountarrouy, de Birech, d'Arriougrand et de Rudelou.

Sur le versant Est, toujours d'amont en aval, les sources de la Guélindo, de la Graouette, du Cascar, ou de la Goutte, donnent les ruisseaux du Riou det Thou, Cascar, Maou, Bourseil, Layeu, Bordères, l'Échart, Géla.

"Bigorre" signifie "ruisseaux rouges" ; deux de ces ruisseaux justifient tout particulièrement cette appellation celui qui coule au fond du "Clot dera Lasserre" et celui de "Hountarrouy". Leur lit est tapissé d'un dépôt d'oxyde de fer brun-rouge.

La Graouette figurait dans les anciennes cartes d'État - Major comme pouvant abreuver 40 chevaux. Captée en partie seulement, elle alimente un bassin et un lavoir avec un débit d'environ 2.750 litres à l'heure. Cette eau sort à une température constante de 12 º centigrades. Elle n'a jamais été tarie même dans les périodes les plus sèches. A l'analyse, elle s'est révélée exempte de produits chimiques. Seules quelques bactéries inoffensives y ont été trouvées. Nombre de gens du village vont y puiser leur eau de boisson.

Le site est très plaisant. Il a été aménagé avec beaucoup de soin par la municipalité et les jeunes du Comité des Fêtes. Un fête champêtre particulièrement prisée s'y déroule chaque année.

Sur le territoire de Castelbajac, la source des "Picharottes" (Hount deths Sarrasis) jaillit à 7 º centigrades, avec un débit constant de 24 litres à la minute, soit 34.560 litres par 24 heures. Particulièrement pure, elle est totalement exempte de nitrates. Elle alimente un lavoir restauré par Georges Sireix de Burg, qui y a placé une statue de la Sainte-Vierge, christianisant ainsi ce lieu - peut être voué dans l'antiquité à quelque déesse des sources !

En un temps où l'on parle beaucoup de pollution et de pénurie d'eau potable, Graouette et Picharottes, exemptes de nitrates et autres produits chimiques sont des cas qui méritent d'être signalés.

En des endroits marécageux se formaient des mares souvent aménagées en abreuvoirs ou en lavoirs : Han, Laquette, Barbet, Laquos. La plupart de ces terrains ont été drainés pour être cultivés.


DES PUITS

Les puits sont plus ou moins profonds, selon le relief (de six à vingt-quatre mètres) fournissaient de l'eau potable. Les plus profonds ont une température constante d'environ 12º centigrades. C'est aussi la température de la Graouette.

Comme la plupart des villages de la région, Houeydets a sa source minérale : "Hount de Moura". C'est un griffon dont les eaux étaient réputées pour faciliter la digestion en période de "pèle-porc". Elles étaient censées soulager aussi les problèmes de l'arbre urinaire.



PRÉHISTOIRE

Pour la période préhistorique, nous étudierons l'ensemble de ce territoire sous le nom de Castelbajac.

Les nombreux vestiges que l'on trouve sont semblables à ceux que l'on rencontre sur tout le Plateau de Lannemezan : tumuli ; tombelles, mottes plus ou moins fortifiées.

La population des âges du bronze et du fer devait être relativement dense si l'on se réfère au nombre très important de tumuli. La mise en cultures en a arrasé la quasi-totalité. Aujourd'hui, très peu sont encore visibles. Les archéologues qui en ont dressé l'inventaire sont restés très en deça de la réalité.

Parmi ces archéologues citons :
Lartet et Chaplain-Duparc vers 1874.
Laverdure vers 1961
Gabriel Puyau (1967 - 1968)

Pour ce qui est de la partie située actuellement sur la commune de Campistrous, signalons que trois tertres : "las Tres Puyos" et deux autres ; "Arioulés de Chourrine" ont été classés en date du 1 er Juillet 1965.

Sur le territoire de Houeydets, lors de la dernière tranche de mise en culture des landes communales (1967 - 1968), Gabriel PUYAU, aidé de quelques bénévoles fit des fouilles au lieu-dit HAN (du latin fanum : sanctuaires consacrés aux dieux pyrénéens).

Il mit au jour cinquante et une tombelles. Des cônes de terre recouvraient des cercles tangents, délimitées par des galets de quarzite (cromlechs), dont le diamètre variait d'environ 1 m 50 à 20 mètres.

Sur la terre noire qui constitue ce sol, avait été déposée une mince couche d'argile, évoquant le sol en "terre battue" des habitations locales, telles qu'on a pu en voir jusqu'au milieu du XX e siècle, dans nos villages.

Cendres et charbons attestaient le présence d'un bûcher élevé sur cette argile. A l'intérieur du cromlech se trouvait une urne, rarement plusieurs. Un galet d'une hauteur de 20 à 30 centimètres était planté verticalement sur le bord intérieur du cromlech. Le diamètre passant par ces galets indiquait la direction N-E - S-W, alors que les urnes n'avaient pas d'emplacement fixe à l'intérieur du cercle. Il était très curieux de voir toutes ces petites bornes orientées dans la même direction. Était-ce la Voie Lactée, guide des grandes migrations ou l'influence des courants telluriques auxquels les hommes préhistoriques semblaient être très sensibles qui les a motivés ? De récentes études faites en Bretagne semblent justifier cette dernière hypothèse.

Appien décrit ainsi des funérailles dont il avait été témoin :

"Le corps fut brûlé sur un bûcher très élevé. Des sacrifices funéraires furent offerts... Les assistants tournaient autour du bûcher en célébrant la louange du défunt... Lorsque le feu fut complètement éteint, un tumulus fut élevé sur les cendres du bûcher".

Ce texte paraît tout à fait approprié à la nécropole qui nous intéresse.

Les monuments, armes, victuailles qui accompagnent la sépulture impliquent une croyance à une survie - à l'immortalité de l'âme. Les cimetières étaient peut-être des lieux de réunions. A certaines époques de l'année, amis, parents, descendants devaient offrir des libations, des offrandes, des sacrifices funèbres sur le tumuli.

Les urnes découvertes par Gabriel PUYAU sont de dimensions variées : l'une d'elles (incomplète) mesure environ cinquante centimètres de diamètre, alors que les autres sont beaucoup plus petites. Elles sont presque toutes en argile rouge. Une seule, assez petite, est en poterie noire finement décorée. Les unes semblent appartenir à l'âge de Bronze et les autres à l'Âge de Fer. La plupart sont visibles à Tarbes (musée Massey).

Au siècle dernier, des archéologues s'intéressèrent aux plus grands des tertres situés à Houeydets. Les "Anciens" racontaient que des "étrangers" embauchaient des gens du village pour piocher. Ils trouvaient des urnes et des armes tordues par le feu (lances ou javelots). Il s'agit probablement de CHAPLAIN-DUPARD. Le produit de ses fouilles est conservé au Musée du Mans (avenue de Paderborn). Des étiquettes indiquent que les urnes ont été trouvées au voisinage de débris métalliques : bronze ou fer et qu'elles contenaient des débris d'os calcinés.

Les urnes en argile cuite se sont très bien conservées. Celles en argile crue se délitaient dès qu'elles étaient au contact de l'air.

Vers 1843, Jean MARQUE, dit "Jean de la Lande" voulut construire sa maison (qui appartient aujourd'hui (en 1995) à son petit-fils, André B. Il arasa un tertre et découvrit des urnes qui devaient être dans un bon état de conservation, puisque les gamins qui gardaient leurs troupeaux dans la lande voisine en firent un jeu de quilles et les cassèrent à coups de cailloux.

Ce tumuli en terre étaient de beaucoup les plus nombreux. Il en reste d'ailleurs un nombre important dans les quartiers dénommés : "Cuyéla, Puyolles, ou grabarole". Ils sont peu visibles car, situés dans les champs, les labours les ont érodés.

Sur le territoire de Houeydets, on trouvait jusque dans les années 1950, dans le quartier " Poutge-Pla" un très grand nombre de très grand tas de pierres sèches. Lorsque, la mécanisation en a permis l'exploitation, ces pierres ont été utilisées pour paver routes et chemins. Était-ce là des tertres funéraires ? - Si urnes il y eut, le poids des pierres ne peut que les avoir écrasées et enfoncées dans le sol et il est quasi impossible de trouver quelque chose. Il reste peu de ces "Peyrets" intacts.

Enfin, au lieu-dit "Le puyo", un troisième type de tumuli fouillé peut-être par Chalain-Duparc se composait de terre entourant un mégalithe certical. Ceux de ces menhirs qui subsistent mesurent entre 1 m 40 et 2 m 20 de long. D'après la tradition, on aurait mis à jour des "vases, des armes et des médailles".

La datation de ces vestiges ne peut être qu'approximative, aucune analyse au carbone 14 n'ayant été effectuée. Les archéologues font remonter les mégalithes du "Puyo" au néolithique, soit entre 3.000 et 5.000 ans avant notre ère. Les tumuli avec urnes seraient beaucoup plus récents : de l'âge du Bronze ou du Fer, soit de 3.000 ans avant J.C. jusqu'au début de l'évangélisation.

Sur l'actuel territoire de Castelbajac, très peu de tumuli ont été signalés. Mais à l'Ouest du village on peut remarquer le "Tuco de la Mauto". Sur un éperon dominant la vallée de "Rieupeyrous", un poste de guet portant des traces de fortifications (fossé) "couvrait" le CASTERA.



LE CASTÉRA :

Dans des emplacements bien choisis pour l'observation et pour la défense, sur des éperons élevés, des promontoires entourés par des vallons ou des pentes abruptes, on voit encore (mais de moins en moins) des buttes artificielles connues sous le nom de mottes (mauto, puyo, tuco, tucol, tucoulet, turon...).

Elles sont le plus souvent comprises dans des enceintes plus ou moins vastes, entourées d'ouvrages fortifiés, tranchées ou fossés, remparts et remblais de terre et quelques fois de pierres sèches : talus cavaliers etc...

Dans le Sud-Ouest, ces curieux ouvrages sont généralement connus sous le nom de castels, castéra, castériou etc...

On les appelle parfois à tord "Camp de César" ou "Camp Romain". En réalité, ces ouvrages n'ont rien à voir avec la castramétation romaine.

Ils sont établis de façon à surveiller, soit une grande étendue de plaine, soit le débouché d'une vallée ou d'un défilé. Ces populations étaient arrivées à une grande habileté dans l'art de la fortification (Camps de Montmaurin, de Montoussé des Toureilles etc...)

Ce type d'ouvrages correspondant aux besoins des populations et aux ressources qu'elles avaient sous la main se retrouvent avec peu de variantes aussi bien en Anjou qu'en Normandie ou en Angleterre.

A Castelbajac, nous trouvons une des formes les plus simples : un terre-plein rectangulaire d'environ 500 mètres de long sur 150 mètres de large, entouré sur ses quatre faces par des fossés dont la profondeur ne peut-être évalué, mais dont la largeur est de 12 à 14 mètres.

Il est difficile de dater ces ouvrages. Certains doivent remonter à l'Âge de Bronze et peut-être à l'époque énéolithique. L'homme est naturellement belliqueux. Dès l'origine, il a éprouvé le désir d'attaquer son voisin et celui-ci a dû tenter de se protéger.

Au milieu du "Castéra", il y avait une motte castrale. Rasée vers 1970, elle mesurait encore de quatre à cinq mètres de haut pour une vingtaine de mètres de diamètre à la base et était entourée d'un fossé. Ces mottes, édifiées avec la terre retirée des fossés étaient surmontées d'un "château" : petite construction en bois servant d'abri aux guetteurs.

Sur l'escarpe des fossés, s'élevaient des palissades composées de pieux en bois. Des ponts-levis franchissaient ces fossés (L'escarpe est la bordure intérieure du fossé, la contrescarpe étant le bord extérieur).

Sur le terre-plein, quelques bâtiments devaient permettre, en cas de besoin, d'abriter bêtes et gens ainsi que des "provisions" et "munitions".

Beaucoup plus tard, furent construits, toujours à l'intérieur du Castéra, - dans l'angle Sud-Ouest, un château-fort médiévial classique, en pierres - et l'église.

L'importance stratégique de ce lieu est indiscutable. Du sommet de la motte, la vue s'étendait au Nord jusqu'aux confins de l'Armagnac, à l'Est vers Montastruc, le "Castet de la Garde de Hachan, à l'Ouest : " Tuco de la Mauto, le Castet de la Garde de Burg etc...Tous ces points stratégiques étaient vraisemblablement surmontés de "tours à signaux ", et pouvaient échanger des messages.

La tradition locale fait état d'un souterrain qui aurait relié les châteaux de Castelbajac et de Montastruc. Une étude récente, réalisée par un radiesthésiste permet de croire à l'existence d'un souterrain entre la motte castrale de Castelbajac et le château de Montastruc.

La motte castrale était désignée dans les dernières décennies de son existence sous le nom de "Tépè de Nibelo", du nom du plus proche habitant.

Le petit chemin qui traverse l'enceinte de l'ancien Castéra est dit "Chemin de Baradas"" (fossés).

La commune de Castelbajac, cultivée depuis très longtemps a certainement effacé les traces de tumuli, mais il devait y en avoir quelques uns. Lorsque la région fut évangélisée, tous les lieux de culte païens furent "christianisés" par l'érection de croix ou de chapelles. A défaut d'autres signes, on peut supposer que quelques tumuli s'élevaient au quartier de Barba où s'est trouvée ensuite une chapelle dédiée à Saint-Exupère et au quartier de la Paguère où fut signalée une croix, but de processions.

D'après la tradition, un souterrain reliait le château de Castelbajac à l'actuelle maison "Chauvier", qui abritait les écuries du Baron. Or, dans un coin de la cour du château on voyait jusqu'à un passé très récent, ce qui pouvait être considéré comme l'entrée du boyau. Un cabaretier installé sur les lieux l'utilisait comme cave. Lors de travaux dans la maison Chauvier, il fut découvert sous la cuisine, ce qui pouvait être l'extrémité du dit souterrain.

Lorsque les Romains arrivèrent en Gaule, ils ne virent pas toujours de très bon œil, ces fortifications. Ils occupèrent celles qui pouvaient leur être utiles, et laissèrent les autres à l'abandon. Le Moyen-Âge devait relever la plupart de ces lieux qui connurent encore de beaux jours.

Des lieux-dits : Puyo, Turroum, Tourroumbeu, peut-être Manautou, Tuco etc... semblent désigner d'anciens postes d'observation plus ou moins fortifiés.

Il est à remarquer que l&pos;homme ne devait pas seulement se protéger de l'homme, mais aussi d'animaux prédateurs dont certains étaient de grande taille : ours, loups etc...

Châtillon-en-Bigorre ne devait pas être un lieu de passage très intense. Les pistes les plus fréquentées se trouvaient soit plus au Nord (au pied du Plateau), soit plus au Sud (au pied de la montagne : route du sel) ou encore à l'Ouest avec la " Ténarèze" qui passe au sommet de Bégole.

Il devait y avoir là un peuple de pasteurs, relativement sédentaires, pratiquant peut-être la transhumance en moyenne et haute montagne pendant l'été. La brebis devait constituer leur principale ressource. Les auteurs latins parlent de "la cape grossière" des Bigorrais, vêtement en usage chez les bergers jusqu'à un passé récent. Appien fait mention de l'élevage ovin et de l'exportation de "Vestes Bigerricae" (vêtement bigourdans).

Les relations avec le nord de l'Espagne devaient être relativement importantes par la Ténarèse et le col du Rieumajou. Il était assez facile de pratiquer ces voies avec des animaux de trait : chevaux ou ânes.

Strabon insiste sur les analogies entre Bigorrais et Ibères. Jusque dans les années 1930, on pouvait voir encore à Houeydets et à Castelbajac des personnes âgées enveloppées de grandes capes de deuil noires, doublée de rouge. Or le rouge était la couleur de deuil des Ibères.

La région dut être évangélisée entre les V e et VII e siècles. Il y a dans l'église de Castelbajac, une cuve baptismale estimée par d'éminents archéologues, du VII e ou VIII e siècle. Pour christianiser les lieux de culte païens, y furent érigées croix ou chapelles (une vingtaine sur l'ensemble du territoire de Châtillon-en-Bigorre.

L'occupation romaine a laissé assez peu de traces. Quelques mots dans la toponymie, mais aucun aqueduc, théâtre ou temple quelconque. Quelques pas de murs gallo-romains sont encore visibles dans certaines maisons : (Bidaou, Cazat etc...)

L'anecdote suivantes révèle-t-elle une référence à un lointain et célèbre romain ?

Dans la première moitié de ce XX e siècle, lorsqu'un paysan de Houeydets : Marcellin M.P. avait des démélés avec ses bœufs, il leur adressait une invective inattendue :

"Espèce de Marc-Antoine".

Cela peut nous laisser songeurs.

Les Romains n'ont pas créé de réseau routier. Ils se sont contentés de perfectionner les itinéraires existants et de les adapter à leurs besoins.

Une route importante : Toulouse-Dax - traversait le Plateau de Lannemezan. Des routes secondaires s'y rattachaient, reliant les nombreuses sources minérales ou thermales que les Romains appréciaient particulièrement. C'est ainsi qu'une route venant de L'Isle de Noé passait par Galan, Bonrepos, Castelbajac, (quartiers des Sabathès et de l'Arriou-det-Thou) et se dirigeait vers Lagrange, Capvern, Bagnères-de-Bigorre.

De petites routes transversales reliaient cette voie de la Ténarèse : Chemin de Cascar (Chemin de César ?) etc...


BARONS DE CASTELBAJAC :

Vers l'an 820, la Bigorre fut érigée au Comté héréditaire... elle avait donc à sa tête, le Comte de Bigorre. Le siège de l'administration de la province était à Tarbes, où le Comte réunissait divers représentants du Tiers-État, du Clergé et de la Noblesse.

Parmi les douze Barons de Bigorre qui siégeaient, le Baron de Castelbajac était le premier et le plus puissant.

L'origine de "la Maison de Castelbajac" est aussi floue que celle de la Bigorre. Son apparition peut-être raisonnablement située entre les années 950 et 1.000, voire même antérieurement. Le terme de noblesse féodale, dite également immémoriale s'applique à cette famille dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Le titre de "Baron" y est porté dès l'origine, confirmé entre autres par le roi de France Philippe de Bel. Un document indiscutable, déposé aux "Archives Nationales" fait état, en 1021, de Jean de CASTELBAJAC, chevalier, baron, capitaine, viguier de Goudon.

Certains historiens dont P. de Marca prétendent que les CASTELBAJAC descendent des Comtes de Bigorre. D'autres avancent qu'il y aurait un lien très étroit entre cette famille et les rois de Navarre. Les uns considèrent Eneco-Arista, premier roi de Navarre comme étant issu de la "Maison de CASTELBAJAC" les autres présentent les seigneurs de Castelbajac comme descendants d'Eneco-Arista.

Dans l'ouvrage de l'abbé COLOMEZ "Histoire de la Province de Bigorre", il est rapporté qu'Arnaud-Raymond de BAS (Coarraze) en Béarn, contribua à la fondation de l'abbaye de Saint-Pé en cédant des terres qu'il possédait en ces lieux.

Le Duc de Gascogne lui donna en échange :

"La riche Maison de Séméac en Bigorre".

C'est peut-être à cette occasion que cette famille de Bas prit le nom de CASTELBAJAC : château donné ?...

C'est donc sans doute, mandé par le Comte de Bigorre qu'un Castelbajac vint de Séméac à Châtillon-en-Bigorre pour prendre la tête de la garnison de trois cents hommes qu'abritait le "Castéra".

Le château de Séméac fut conservé dans la famille jusqu'au XVI éme siècle. C'était là leur résidence d'hiver. Séméac devait être plus confortable que Castelbajac ou Montastruc.

A Castelbajac s'élevait un petit château-fort classique : des fossés, de hautes murailles entourant une cour intérieure, un donjon carré jouxtant le porche d'entrée auquel aboutissait le pont-levis. Les galets dont il était bâti ont apparemment servi à édifier le mur du cimetière. Lors de récents travaux, on put les voir, bien réguliers et remarquablement alignés. Ils ont été recouverts d'un crépi malencontreux.

En entrant dans la cour du château, à gauche, on pouvait voir, il y a relativement peu de temps, l'entrée d'un souterrain. D'après la tradition, il passait sous les douves et aboutissait aux écuries situées à l'emplacement de la maison "Chauvier". Lors de travaux dans la cuisine de cette maison, on mit jour l'extrémité du souterrain. La voûte ogivale de la grande tour carrée fut démolie en 1843. Un ouvrier : CAZABAT fut tué pendant les travaux.

Ce qui restait des montants et du linteau de la porte à laquelle aboutissait le pont-levis fut démoli dans les années 1930 car ils présentaient un sérieux danger.

La place forte de Châtillon-en-Bigorre abritait 50 "lances". Une "lance" étant accompagnée de 3 archers, un écuyer et un page, le Baron de Castelbajac était donc capitaine de 300 hommes.

Si cette garnison avait ici son "port d'attache", il ne faut pas croire que tous ces hommes étaient sédentaires. A cette époque, les Seigneurs offraient leurs services aux chefs de telle ou telle faction. Certains se vendaient "au plus offrant" et passaient sans complexes des catholiques aux protestants ou des Armagnacs aux Bourguignons.

Les CASTELBAJAC, eux, sont remarquables par leur fidélité à l'Église catholique et à la Couronne de France.

Nous avons vu que le Baron de CASTELBAJAC était le premier et le plus puissant des Barons de Bigorre

.

Sur le plan territorial :

Sa souveraineté s'étendait sur de vastes territoires en Bigorre et en Astarac puisqu'ils étaient Seigneur Baron de CASTELBAJAC, MONTASTRUC, ORIEUX, SAINT-LUC, SEMEAC, GOUDON, CAMPISTROUS, FAYAN, ASPIN, CAZENOVE, BERNEDE, BOUILH, FORGUES, ASTUGUE, ROUEDE, BERNET, CABANAC, LUBRET-SAINT-LUC, LAGARDE, MINGOT, CASTELJALOUX, LACASSAGNE, MANSAN, BARBAZAN, et autres lieux.


Pouvoir juridictionnel :

Le pouvoir du Baron de CASTELBAJAC était exceptionnel : il avait droit de juridiction Haute, Moyenne et Basse sur les Seigneuries lui appartenant. Sur celles-ci il avait pouvoir de prononcer toutes condamnations, allant de la peine capitale à la sanction mineure. Hormis cette exception, la justice relevait du seul Comte de Bigorre.

Le Baron de CASTELBAJAC était PAIR et était le seul avec le Comte à recevoir l'HOMMAGE.


ARMES : Croix d'argent sur champ d'azur.

DEVISE : Bigorre ! - Bigorre ! CASTELBAJAC ! ...


Sénéchaux et Gouverneurs de Bigorre :


1389 - ARNAUD-RAYMOND VII

1426 - BERNARD

1488 - PIERRE - ARNAUD

1503 - GASTON

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D'aucuns peuvent avoir l'impression de n'être que très peu concernée par l'Histoire de France.

La Bigorre comme l'Armagnac, le Béarn, le Comté de Foix ou l'Aragon furent le théâtre de nombreux conflits liés aux problèmes de la France : successions litigieuses, guerre de cent ans, guerres de religion. Nos lointains ancêtres, restés anonymes, ont été impliqués aux côtés de quelques personnages plus célèbres dont l'Histoire a retenu les noms.

Les CASTELBAJAC ont ferraillé parfois très loin, entraînant certainement à leur suite quelques hommes du pays. En 1191, au cours de la troisième croisade, Bernard de CASTELBAJAC est signalé à JAFFA.

Les guerres du Milanais voient le "Baron Vert" : Bernard prendre la citadelle de Peschiera del Gardo (près du Lac de Garde) et en être nommé Gouverneur.

En 1501, c'est un CASTELBAJAC qui est Gouverneur de l'île de Mytilène (Lesbos).

En 1510, Rhodes voit passer la bannière d'azur à croix d'argent. Pendant la guerre de cent ans, ils harcelèrent les Anglais sur de nombreux champs de bataille.

Arnaud-Raymond VI commandait le château de Lourdes lorsqu'il reçut l'ordre du roi de France de le remettre aux Anglais à la suite du traité de Brétigny.

Avec les Armées de Charles VII et de Jeanne d'Arc, on les trouve à Montargis, Vendôme, Beaugency, Melun etc...

Nous avons vu plus haut que les Barons de CASTELBAJAC aidaient sans lésiner, la couronne de France. Le Roi, Jean le Bon, voulant récompenser Arnaud-Raymond de ses bons et loyaux services tant dans les Flandres, qu'en Guyenne et tout particulièrement pendant le siège de Sainte-Bazeille (un bourg du Lot-et-Garonne), lui donna "la bastide de Châtillon - en - Bigorre" avec tous les droits afférents tant en rentes qu'en juridiction, haute, moyenne et basse, comme en témoignent les photocopies de documents qui suivent :

Enfin, en Décembre 1352, à la demande d'Arnaud-Raymond la bastide de Châtillon - en - Bigorre portera désormais le nom de CASTELBAJAC.

A partir de 1342, c'est donc au Baron de Castelbajac et non plus au Roi que les habitants de Castelbajac durent payer leurs fiefs. Ils devaient lui donner tous les ans à la fête de "Toussaint" : une poule, dix litres d'avoine et 12 sous par "feu allumant". On ne peut pas dire que ce soit excessif !

En outre, les habitants de Castelbajac devaient porter chaque année : 50 chars de bois, pris dans "le bédat de Castelbajac" (situé aux confins de Lannemezan) pour le chauffage du château. Les consuls n'étaient tenus de porter qu'une bûche.

Le "bédat de Castelbajac" se trouvait à proximité de Peyrehicade. On connaît encore le "pas" (ou gué) du Bédat et le chemin du "Bédat".

Le droit de taverne et boucherie était adjugé aux habitants. En outre, ils avaient la jouissance et possession de tous les padoens et communaux avec faculté de les réduire en culture et les mettre en afferme suivant leurs nécessités publiques. Tout cela par sentence arbitrale du 14 Mars 1480, qui ne faisait que reconduire ce qui était déjà "de temps immémorial".

Il n'a été trouvé aucune mention de "four banal". Il semble que chaque maison avait son four.



Notes :

A la suite de la mise sous séquestre de la Bigorre en 1293 c'est le Roi de France qui était Comte de Bigorre et de ce fait disposa de Castelbajac.

Pour ce qui est du moulin, le Baron de Castelbajac était propriétaire du moulin de " GNAN" à l'Ouest du village sur la rivière "Rieupeyrous", mais comme il y avait plusieurs autres moulins sur le territoire, il est évident que les habitants n'étaient pas tenus de passer tous par le moulin du seigneur.

Nous avons vu que Jean-le-Bon avait donné Castelbajac à Arnaud-Raymond. Un peu plus tard, il lui donna Montastruc. Arnaud-Raymond ne put en prendre possession qu'à la fin de la guerre de Cent Ans.

Cette forteresse était beaucoup plus vaste que celle de Castelbajac et bien mieux située ; il s'y installa, laissant Castelbajac à des "cadets".

Jean-Baptiste Carsalade-Dupont a laissé de Montastruc une description qui fait rêver :

"Les chambres tendues de tapisseries, les meubles richement sculptées, les coffres superbement vêtus, des sièges, des archebancs à grandes housses frangées de soie et d'or, des tables recouvertes de tapis précieux, les dressoirs surchargés de vaisselle d'argent, de pièces d'orfèvrerie, de coffres incrustés. Des armures damasquinées, forgées à Tolède et à Milan et mises à l'épreuve sur vingt champs de bataille, s'accrochaient aux murailles".

Les Barons de Castelbajac habitèrent MONTASTRUC en été et SEMEAC en hiver. Le château de Castelbajac fut abandonné mais la famille conserva son tombeau dans l'église qui était légalement "lieu capital et principal du Marquisat et le seigneur devait y tenir et faire tenir les assises judiciaires de trois en trois ans, selon l'ancienne coutume".

Comment l'ancienne Baronnie est-elle devenue Marquisat ?

- Louis XIV ayant besoin d'argent décrété que les seigneurs qui avaient quatre quartiers de noblesse pourraient porter le titre de Marquis. Ce n'était pas gratuit et permit de renflouer légèrement les finances du royaume. Les Barons de Castelbajac, pouvant se prévaloir d'une noblesse "de temps immémorial" en profitèrent et le 19 e Baron : Charles devint le 1 er Marquis.

Actuellement (1996) Guilhem de CASTELBAJAC, chef de la branche aîné est à la fois le 31 e Baron et le 13 e Marquis.


Les rapports entre les habitants de Castelbajac et leurs seigneurs :

Selon un adage bien connu "les gens heureux n'ont pas d'histoire". Il semble que les rapports entre les Barons de Castelbajac et leurs vassaux aient été assez calmes pendant quelques siècles.

Les fiefs n'étaient pas très élevés (une poule, douze sous et un coupet d'avoine), la taille réelle (impôt foncier) fut extraordinaire sous Philippe le Bel et ne devint permanente qu'avec la guerre de cent ans. La taille personnelle (sorte d'impôt sur le revenu) ne touchait que les "Pays d'Élection". La Bigorre étant un "pays d'État" n'était donc pas touchée par cet impôt.

Mais le Baron Bernard, mort sans postérité en 1545 légua ses biens et ses titres à sa sœur Louise (demoiselle d'honneur de la Reine de Navarre).

Louise avait épousé en 1524 Jean de Durfort-Duras. A l'occasion de son mariage, son frère lui constitua 4.000 livres. Il promit aussi de la vêtir, orner et habiller : d'une robe de satin broché, d'une de velours cramoisin, d'une de velours tanné, d'une de velour noir et d'une de camelot (tissu de laine) - fourrées et doublées, ainsi que en tel cas appartient, ensemble cottes et manchons, chaperons de tête : trois de velours.

Il promit de doubler la robe de satin broché, savoir la parure d'icelle de satin blanc, et la cotte de damas blanc ; celle de velours noir de pannes noires (tissu de soie genre velours mais à poils plus longs et moins serrés), la cotte de satin cramoisin ; celle de camelot de pannes blanches et la cotte de satin noir.

Il lui donna lors du contrat une de velours tanné doublée de velours même et une autre de velours violet cramoisin doublée.

Les habitants de Castelbajac eurent alors une histoire. Les archives regorgent de documents relatifs aux litiges ayant exposé le nouveau seigneur à ses vassaux. Lui et ses descendants se révélèrent cupides, violents, dénués de tout sens moral. Ils voulurent doubler les fiefs, contestèrent les droits de taverne et de boucherie ainsi que la possession de tous les communaux.

Les Consuls assistés de Vingt "hommes d'honnête qualité" avaient compétence pour rendre la justice en matières civiles et criminelles, et cela de temps immémorial. Le nouveau seigneur le leur contesta. Les Consuls en appelèrent au Parlement de Toulouse (1565). Ils avaient à leur tête un certain Lagaye de Houeydets, ancêtre des familles Barnatas. - Mananton - l'Hoste etc...

Le plus odieux fut certainement Charles, petit-fils de Louise. Non content de s'en prendre à ses vassaux, il eut aussi des démêlés avec les cousins de Louise pour de sombres affaires d'héritage. Le comble de l'horreur fut atteint lorsqu'il fit empoisonner sept personnes résidant au château de Castelbajac (par l'intermédiaire d'une nourrice). Ayant aussi "criminalisé" un habitant de Houeydets, il fut condamné à mort par le Parlement de Toulouse et ses biens confisqués au profit du Roi (1617 - 1628 - 1629).

Sa veuve implora la clémence du Roi pour que soient restitués à ses enfants, leurs biens et leurs titres.

Mais Godefroy, en digne fils de son père continua ses exactions. Pour intimider les habitants du lieu, il fit venir une compagnie de deux cents chevaux qui y resta cinq ou six jours

"en telle sorte qu'après le saccage et pillage entiers de leurs maisons, ils furent contraints de passer une reconnaissance conforme à son désir".

" N'étant pas encore pleinement satisfait, il leur fit enlever deux cents têtes de bœufs et autres bestiaux, lesquels bestiaux il fit éloigner dix ou douze lieues dudit lieu de Castetbaiat. Les pauvres suppliants furent jeter aux pieds de leur Seigneur qui, bien loin d'être touché de quelque sentiment de compassion, leur répondit qu'il fallait bailler six mille livres ou perdre leurs bestiaux".

D'interminables procès gagnés par les Consuls de Castelbajac marquèrent toute cette période.

Ces individus particulièrement belliqueux, combattirent leurs cousins Castelbajac dans les châteaux voisins. Pour cela ils enrôlaient les paysans qui n'appréciaient pas du tout ce passe-temps.

Il semble qu'avec Roger de Durfort (1640-1693) revint une ère de paix pour la seigneurie de Castelbajac.

Le dernier représentant de cette lignée s'éteignit en 1730 sans postérité et ce fut Bernard de Castelbajac Bernet qui prit la suite. Il était le 24 e Baron et le 6 e Marquis.

La guerre de succession d'Autriche vit la mort à quelques mois d'intervalle du chef de la Maison de Castelbajac et de son frère cadet (1746). Un troisième fils : Jean, entré dans les ordres, revint sur ses engagements pour reprendre le flambeau. Il mourut à Montastruc en 1753.

Sa veuve et son fils posthume s'installèrent chez le tuteur de ce dernier, à Ricau et

"tous les biens, fiefs, quêtes, agriers, dîmes inféodées, lods, prélations, nomination aux Bénéfices & offices & autres droits utiles & honorifiques des terres du Marquisat de CASTELBAJAC, BURG, MONTASTRUC, LANE-CORBIN, & CAMPISTON, Baronnie de FONTARAILLES, LAPEYRE, VIDOU, de la terre de SENTOUS, les quêtes ou fiefs de LIBAROS & BUGOLLE & généralement tous les autres droits en quoi qu'ils puissent consister....".

furent vendus à Jean-Anne-Bernard FAUBEAU de MALLET.

Les FAUBEAU étaient une vieille famille bourgeoise de Galan ayant fait fortune à Saint-Domingue. Celui qui nous intéresse avait une fortune évaluées à cent mille livres de revenus annuels. Il retirait 60.000 livres des propriétés qu'il possédait à la Plaine de Nord, à Saint-Domingue, le marquisat lui en rapportait 20.000 et il jouissait par ailleurs d'autres 20.000 livres de revenus.

Ces sommes étaient considérables pour l'époque. Il prit le titre de Marquis de Castelbajac, les titres nobiliaires suivant la possession de la terre noble qui les conférait. Les habitants de Castelbajac contestèrent la légitimité de leur nouveau seigneur et refusèrent de lui payer leurs fiefs. La Révolution vint mettre bon ordre à tout cela. La Marquis se vit assigné à résidence à Toulouse, ses biens furent vendus comme "biens nationaux". Une page de l'Histoire de Castelbajac était tourné.

Pendant près de deux siècles les descendants des Barons de Castelbajac disséminés dans tous les coins du monde sont venus de temps à autre et individuellement, se recueillir dans cette église qui fut le tombeau de leurs ancêtres jusqu'en 1756. Mais le 18 Août 1991, une mémorable réunion familiale ramena solennellement les centenaires de descendants de cette illustre famille sur les sites de Castelbajac et Montastruc pour y commémorer mille ans de leur Histoire. Depuis cette date, ils reviennent très régulièrement tous les ans, très cordialement accueillis par la population.

Pour conclure, on peut dire que "les institutions valent ce que valent les hommes qui les appliquent" - La féodalité a apporté le meilleur ou le pire : si le Seigneur était un "brave homme" ses vassaux vivaient dans la paix et le bonheur. Si c'était un tyran, il pouvait entraîner ses manants dans la misère et les souffrances les plus profondes. Toutefois, s'ils en appelaient au Roi ou à ses représentants, ils avaient souvent gain de cause, le Roi n'ayant pas intérêt à ce que les hobereaux de province deviennent trop puissants.

A Castelbajac, la mémoire collective n'a pas gardé d'animosité à l'égard de ses seigneurs. Ce n'est pas le cas à Montastruc où, bien que des faits précis n'aient pas été retenus, il est resté un ressentiment latent contre le "château". Peut être parce que les fiefs exigés à Montastruc étaient le quadruple de ceux exigés à Castelbajac.




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