Fondation du séminaire : [1]
Le saint Concile de Trente (Sess. XXIII, ch. XVIII) ordonne que toutes les églises, cathédrales, métropolitaines et autres supérieures à celles-ci, chacune selon la mesure de ses facultés et l'étendue de son diocèse, seront tenues et obligées de fonder un Séminaire. En d'autres termes, chaque évêque devra nourrir, élever dans la piété et instruire, dans la discipline ecclésiastique, un certain nombre d'enfants de sa ville, de son diocèse ou de sa province, si, dans le lieu, il ne s'en trouve pas suffisamment, en un collège qu'il choisira près de son église même, ou dans un autre lieu convenable.Beaucoup de prélats ne purent, faute de ressources, répondre, tout de suite, aux vœux de l'auguste assemblée. L'Évêque de Tarbes fut de ce nombre, pendant bien des années. Ce n'est qu'au XVIIe siècle, en effet, que la Bigorre se voit dotée d'un Séminaire.
Mrg Marc-Malier de Houssau [2], évêque de Tarbes, obtint de Louis XIV (décembre 1669) des lettres-patentes qui l'autorisaient à fonder un Séminaire dans sa ville épiscopale. Ces lettres, d'abord vérifiées au Parlement de Toulouse, le 15 février 1670, furent soumises à la Cour des Aides de Montauban, le 25 février suivant, pour être, ensuite, examinées à la Chambre des Comptes de Navarre, le 13 mars 1670.
L'Évêque pouvait doter le nouvel établissement d'un revenu de 2.500 livres, par les Unions de bénéfices ou par des impositions sur le clergé. De plus, les lettres royales lui permettaient de choisir tels sujets qu'il trouverait à propos pour diriger la Maison " et former les séminaristes aux bonnes mœurs et toutes les fonctions ecclésiastiques et à la science nécessaire pour instruire les fidèles."
Mrg Marc-Malier fit donc construire au midi de son palais épiscopal, un très beau bâtiment destiné à recevoir les clercs. Mais son œuvre n'était pas achevée lorsque la mort le surprit à Auch, pendant l'assemblée provinciale, en 1675.
Messire Anne Tristan de la Baume de Suze, lui succéda, pour être aussitôt transféré à St-Omer, d'où il revient plus tard avec le titre d'archevêque d'Auch. Ce prélat ne put rien faire pour le séminaire. Il en fut autrement de Mgr François de Poudenx, devenu évêque de Tarbes, après la translation de son prédécesseur sur le siège de St-Omer, qui ne cessa pas de songer aux moyens pratiques de mener à bonne fin l'entreprise de Mgr Marc-Malier de Houssay et d'assurer une sérieuse éducation aux jeunes clercs qui aspiraient au sacerdoce....
Les Doctrinaires occupèrent le Séminaire. Un nombre suffisant de directeurs furent envoyés pour l'instruction et l'éducation des clers. L'Évêque donne à perpétuité la direction du Séminaire de Tarbes à la Congrégation de la Doctrine Chrétienne de la province de Toulouse. Le Séminaire sera toujours placé sous la juridiction et la dépendance de l'Évêque de Tarbes, de ses successeurs ou de leurs vicaires généraux. L'enseignement donné dans l'établissement aura toujours l'approbation préalable de l'Évêque ou de ses successeurs.
Les revenus promis par l'Évêque ne furent pas garantis au moment de la mort de ce dernier le 24 juin 1716. Alors il fallut des Unions au séminaire pour survivre. Le séminaire s'unit avec l'Abbaye de La Reule et vit son profit augmenter jusqu'au départ des derniers moines au XVIIIe siècle. A cela, s'ajouta des déboires financiers avec l'abbaye laïque d'Esterre qui coûta des sommes astronomiques aux deux parties.
A l'arrivée de la Révolution, le Séminaire de Tarbes, imbu des principes du jansénisme, donna le scandale du serment de fidélité à la Constitution civile du clergé. Il fut, du reste, imité dans sa conduite, par les professeurs du collège, tous Doctrinaires comme ceux du Séminaire. Lacombe, professeur de mathématiques, fit seul exception à la règle générale et le registre des délibérations de la ville de Tarbes le place parmi les insermentés. Tous les directeurs du Grand-Séminaire comptèrent au nombre des jureurs. Les Doctrinaires continuèrent à diriger la maison jusqu'en 1793. A ce moment-là, le siège épiscopal de Tarbes est sacrilègement envahi par le Père Jean-Guillaume Molinier, recteur du collège et professeur de théologie.
En 1801, de nombreux sièges épiscopaux furent supprimés et c'est ainsi que le Pape demanda à Mrg de Gain d'y renoncer.
Le diocèse de Tarbes, annexé à celui de Bayonne, en vertu du Concordat de 1802, était couvert de ruines d'églises, de monastères et de couvents, lorsque Napoléon rendit la paix religieuse à la France.
En 1822, c'est le rétablissement de l'évêché de Tarbes. En septembre 1823, Mrg de Neyrac prit possession de l'évêché. Un de ses premiers soins fut la restauration du Séminaire diocésain tombé au pouvoir de la ville de Tarbes.
Le Grand-Séminaire se retrouvait dans les bâtiments destinés à son usage, longtemps avant la Révolution, au midi de la cathédrale de Tarbes. Seulement, il devint insuffisant en ce siècle, par suite de l'accroissement du nombre des élèves. Il fallut donc songer à l'agrandir.
Un heureux accord survenu entre l'État et l'autorité diocésaine mit l'établissement à la disposition du gouvernement pour une École d'artillerie. En retour, on fournissait au diocèse, à l'ouest de la ville de Tarbes, un superbe bâtiment, dont les murs commencèrent à s'élever en 1862.(Suite)....
La préfecture des Hautes-Pyrénées : [3]
Petit département de 200.000 habitants, les Hautes-Pyrénées voient affluer, chaque été, attirés par Lourdes, des stations thermales réputées ou seulement, par les sites magnifiques et l'air vivifiant de ses vallées et de ses monts, pélerins, malades, touristes. Beaucoup passent par Tarbes, grand nœud de routes. Mais la plupart ne remarque pas la Préfecture des Hautes-Pyrénées. Celle-ci, en effet, n'est pas située dans le centre de la ville, mais dans sa partie occidentale, dans le quartier qui correspond à l'ancienne cité épiscopale et non dans celui qui succède au vieux "bourg" des Comtes de Bigorre, cœur du Tarbes moderne.L'histoire de sa construction nous mène du logis de l'ancien évêché de Tarbes et le bâtiment en équerre qui unit celui-ci aux sacristies de la Cathédrale. Le premier sert, depuis le Premier Empire, de résidence aux Préfets ; dans le second, sont logés les bureaux de la Préfecture et se tiennent les séances du Conseil Général.
Il n'a pas été fait d'étude complémentaire sur le palais épiscopal bien que, dans sa monographie de la Cathédrale de Tarbes, M. Caddau, architecte des monuments historiques, ait été amené à en parler, en raison de la proximité des deux édifices. Faute de documents précis - ni ce qui reste des archives de l'évêché, ni les minutes des notaires tarbais consultées par divers érudits n'ont fourni de textes à ce sujet - il n'est pas possible de dire avec précision quand et comment l'ancien évêché du XVIe siècle, ruiné par les guerres de religion, fut à peu près entièrement reconstruit au XVIIe siècle.
Divers documents du XVIII e siècle, notamment des inventaires après décès et des expertises sur les réparations à faire au Palais Episcopal, permettent de se rendre compte de ce qu'il était au XVIIIe siècle. Malgré certaines imprécisions, on s'aperçoit, en les confrontant, aux premiers plans existants (1818), que le corps principal du "palais" était en gros ce qu'il est maintenant avec ses deux "tours" Est et Ouest, la seconde plus importante que la première, réunies par un bâtiment plus étroit avec deux étages et des combles sous un toit très élevé typiquement pyrénéen. Il était complété par une construction moins haute, perpendiculaire à la façade partant de la tour Ouest qui abritait remises et écuries. Du côté Nord, l'évêché donnait sur une cour d'honneur beaucoup plus étendue que la cour actuelle, terminée par une porte cochère encadrée de deux petits bâtiments, et au-delà sur une petite place. A l'ouest, dépendances et tours donnaient sur le canal de l'Ayguerote, un des multiples canaux tarbais. Au Sud, le corps de logis était et est encore prolongé par une terrasse encadrée de murs arrivant à la hauteur du premier étage, dominant également de même canal qui contournait l'évêché. Enfin, à l'Est, il y avait un vaste jardin, le jardin actuel de la Préfecture, limité au Nord par la masse de la Cathédrale et son vieux cloître démoli parce que tombant en ruines, au début du Premier Empire.
C'est là que vivront les évêques qui se succédèrent aux XVIIe et XVIIIe siècles. Les derniers seront Mgr De Gain-Montagnac qui le quittera pour se retirer en Espagne en 1791 et l'évêque constitutionnel Molinier qui y demeurera quelques mois. Au premier étage, donnant sur la terrasse Sud, logeaient les évêques. Entre le grand escalier et l'extrêmité de la tour Ouest, ils avaient leur chapelle privée, leurs salons, leur chambre, leur bureau bibliothèque et leur salle-à-manger. Les inventaires après décès nous donnent une idée du mobilier et des bibliothèques assez riches. Avec eux, vivaient, soit au rez-de-chaussée, soit au second étage, leurs collaborateurs immédiats, souvent de proches parents, et une nombreuse domesticité. L'aménagement des dépendances et du second étage, pour augmenter le nombre de chambres, se poursuivit jusqu'à la fin du XVIIIe siècle.
Après le départ de Molinier, l'évêché servira quelque temps de magasin militaire, au moment de la guerre avec l'Espagne, pour être ensuite le siège de l'Administration départementale sous le Directoire. Tout naturellement, il deviendra la résidence des préfets. Le préfet Chazal, le premier, à y habiter, triomphant des revendications du Génie militaire, affirme que le bâtiment eut à souffrir pendant la période révolutionnaire. Il s'occupa de le réparer et de le meubler. L'Hôtel préfectoral faillit brûler dans l'incendie du 3 décembre 1808 qui vit disparaître une grande partie des archives anciennes du département. On eut le plus grand mal à éviter que le feu, qui avait détruit les dépendances ouest, siège des bureaux, n'atteignit le corps de logis principal. Il fallut un assez long délai pour que de nouveaux bureaux, des remises et des écuires soient reconstruits au même emplacement. Ces travaux ne furent terminés que sous la Restauration ; en même temps, l'extrémité nord de la cour d'honneur fut reculée à la hauteur du mur sud de la Cathédrale et les petits bâtiments encadrant la porte cochère furent démolis. Jugeant insuffisants les travaux précédents et soulignant la vétusté de cette construction, les préfets de la Restauration y réalisèrent d'assez importants travaux d'aménagement et d'entretien. A défaut d'estampes, un tableau de l'époque reproduit approximativement l'aspect des lieux.
La deuxième partie des bâtiments sera édifiée seulement pour la plus grande part sous le second Empire. Concordance curieuse, c'est au moment où le Préfet Massey entrait, au sujet des apparitions de Lourdes, en conflit avec Mgr Laurence, qu'il s'opposait également à lui en voulant édifier sur l'emplacement de l'ancien cloître, de nouvelles remises et écuries permettant de transformer les anciennes en bureaux. Les deux questions sont traitées ensemble comme deux affaires d'égale importance dans les correspondances du Préfet avec le Ministre de l'Intérieur, publiées par le chanoine Dantin [4]. Le conflit, d'ailleurs, s'apaisa vite et le successeur de Massey fut amené à une solution nouvelle, la construction de nouveaux bureaux et dépendances dans un bâtiment en équerre qui s'étendait des sacristies de la Cathédrale à la Tour Est. Un espace libre important était ménagé entre la Cathédrale et le nouveau bâtiment et la limite de la cour d'honneur était ramenée à ce qu'elle est actuellement.
Depuis lors, ce bâtiment sera lui-même progressivement étendu et surélevé jusqu'à une époque toute récente, l'extension de l'aile nord se soudant à la vieille chapelle Saint-Jacques dans le prolongement des sacristies, et l'extension de l'aile Ouest masquant en partie la vieille tour Est. En 1937, les archives départementales, situées au deuxième étage et dans les combles furent transférées dans leur belle construction moderne actuelle, à l'extrémité Est du jardin de la Préfecture.
Centre administratif du département depuis 150 ans, la Préfecture a été forcément le théâtre de la vie moderne et des réceptions imposées par les mœurs du XIXe siècle que symbolisait le bal de la Préfecture. Mais malgré l'éloignement de Paris, elle sera aussi animée à plusieurs reprises par le passage de personnages importants que je rappellerai brièvement.
Le premier chef d'État qui y fut reçu fut Napoléon Ier. Attiré à Bayonne par les affaires d'Espagne, il y fait un séjour rapide recevant les autorités et passant en revue dans la cour la "Garde d'Honneur" du département. À peine s'arrêtera-t-il pour repartir à 2 heures du matin pour Auch. Vraisemblablement, Napoléon ne fit qu'y entrer quelques instants lorsqu'il passa à Tarbes, se rendant à Saint-Sauveur avec l'Impératrice, en août 1859. Arrivé en chemin de fer - on avait accéléré la construction de la ligne Morcenx-Tarbes pour lui permettre de l'inaugurer - il n'y fut pas l'hôte du Préfet. Celui-ci dut s'incliner devant le Ministre d'État Achille Fould qui, fier, de manifester ses relations d'amitié avec l'empereur, l'accueillit dans sa belle villa tarbaise.
Beaucoup plus tard, le Président Carnot y résida dans une courte visite à Tarbes en mai 1891, au cours de son voyage dans le Sud-Ouest. L'inauguration du Musée Foch, dans sa maison natale y amènera peut-être prochainement notre actuel Président de la République, M. Vincent Auriol.
Un souverain étranger, qui devait acquérir en France une popularité justifiée, y passa aussi quelques instants. Le Préfet offrit en effet un lunch à l'alpiniste passionné qu'était Albert Ier, Roi des Belges (1912).
Venus en voyage officiel, ou attirés par les sites pyrénéens ou les stations thermales, divers princes et princesses des dynasties régnantes s'y arrêtèrent. La Reine Hortense, dans son voyage incognito, célèbre dans l'histoire du Pyrénéisme, vint déjeuner discrètement à la Préfecture. Le Duc d'Angoulême, en août 1814 et en décembre 1815, la Duchesse d'Angoulême en 1823, à l'occasion d'une cure à Saint-Sauveur, y présidèrent des réceptions organisées avec le plus grand soin. Il en fut de même pour le Duc d'Orléans, fils-aîné de Louis-Philippe, en 1839, et pour le Duc de Nemours, son fils cadet, venu à plusieurs reprises dans notre région.
Nombreux furent les ministres reçus à la Préfecture. Je me limiterai à en citer quelques-uns dont la venue est liée à des évênements marquants de l'histoire locale tarbaise des 50 dernières années. Le général André était présent en 1903 à l'inauguration d'une statue élevée sur la place de la Mairie, non à Bertrand-Barère, mais - malchance posthume - à Danton, son ennemi. En 1926, les présidents Poincarré et Henriot assistèrent à celle de l'École Professionnelle qui symbolisait la transformation de notre chef-lieu en ville industrielle ; en 1935 enfin, le colonel Fabry présida l'inauguration de la statue équestre élevée sur les Allées du Général Leclerc au Maréchal Foch.
Il faut mentionner, tout de même, la réception faite à ce grand chef le 29 septembre 1919, lors de son voyage triomphal à Tarbes. Fils d'un secrétaire général du Second Empire, il y retrouva sans doute les souvenirs de son enfance, en y déjeunant, avant d'être reçu et fêté dans la salle des séances par le Conseil Général des Hautes-Pyrénées.
La Préfecture de Tarbes, ne présente pas, il faut le reconnaître, un intérêt exceptionnel. Mais elle n'en est pas moins, malgré un manque d'unité inévitable, puisque sa construction s'échelonne sur trois siècles, un des monuments notables de la ville. Car les derniers siècles n'ont pas ajouté beaucoup d'œuvres méritant de retenir l'attention à ce qui a échappé aux effets destructeurs des guerres de Religion. A côté de l'ancienne Cathédrale, seul édifice important à peu près conservé de la ville du Moyen-Âge, le vieil évêché, relativement modeste, et les constructions nouvelles qui s'y ajoutent, constituent un ensemble architectural assez heureux et non dépourvu d'une certaine valeur artistique.
Tarbes, le 17 septembre 1951
Joseph MANGIN
(1912-2015)
Archiviste départemental
[1] Source : Gallica.bnf.fr Bibliothèque Nationale de France. Séminaires du diocèce de Tarbes. Par l'abbé Cazauran - 1895. | Il fut d'abord, comme son père, premier aumônier de Madame le duchesse d'Orléans. | Bibliothèque Nationale de France. Bulletin de la Société académique des Hautes-Pyénées. Société académique des Hautes-Pyrénées. | Les apparitions de Lourdes en 1858 Tarbes 1914 |
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