Logo de la Bigorre

Évolution d'un village
du Piémont Pyrénéen
de la préhistoire
à nos jours
.



(3ième partie)


(© Madame Marthe Delas)


Sceau
00036426
copyrightdepot.com


souris ok

 

Ouvrages en vente
de Marie-Pierre Manet


Bookmark and Share




Volailles :

Les poules étaient nombreuses. Elles étaient élevées en liberté. On leur donnait un peu de grain le matin et, dans la journée, elles picoraient herbe ou vermine. Les œufs entraient pour une part importante dans l'alimentation et et leur vente couvrait à peu près les besoins de la ménagère en "épicerie". Les poulets élevés en liberté grandissaient lentement mais leur chair y gagnait en qualité gustative. Quelques uns étaient vendus au marché de Lannemezan. Il semble que la pratique du chaponnage a à peu près disparu au milieu du XX e siècle.

Les lapins, nourris à l'herbe et au grain étaient en majorité destinés à la consommation familiale. Il s'en vendait assez peu.

Canards, oies et dindons étaient parfois achetés au marché de Trie à l'âge de quelques semaines. Souvent, on conservait quelques reproducteurs.

Dans certaines basses-cours, il y avait une oie ou une dinde. Au printemps, la maîtresse de maison prenait la bête par le bout de l'aile et la conduisait chez celle de ses voisines qui possédait un jars ou un dindon. En raison de ces accouplements rapides et irréguliers, tous les œufs n'étaient pas fécondés. Couvés depuis une semaine, on les mirait et on retirait les œufs "clairs". - D'aucuns les utilisaient alors pour faire des crêpes !!!...

La dinde a une aptitude particulière à la couvaison. On pouvait lui confier jusqu'à 24 œufs de poule. Mère attentive, elle prenait grand soin des poussins, les défendant contre les rapaces, dissuadés par sa taille. Lorsqu'elle était réticente pour couver, on lui administrait un demi-verre de vin blanc, après quoi, elle restait sur les œufs.

Les canards étaient gavés dès la fin septembre. Leurs foies n'étaient pas aussi prisés que ceux d'oies, et ils se vendaient à bas prix. Aussi, lorsqu'on avait sacrifié les canards dans une maison, il était d'usage de faire une petite réunion de parents et d'amis et de mettre au menu des foies poêlés chauds : un délice !!!

Les oies, soigneusement gavées au maïs blanc étaient transformées en confit alors que les foies étaient vendus sur le marché de Lannemezan et apportaient un sérieux revenu à la ménagère.

Les dindons mangeaient des céréales puis étaient gavés avec des châtaignes. Une partie était réservée à la consommation familiale, le reste était vendu au marché de Lannemezan.

Il y avait très peu de pintades.

De 1925 à 1935 environ, il y eut deux petits élevages de lapins angora (Amiel à Houeydets et Tilhac Nibèle à Castelbajac). Le poil était vendu à un organisme qui avait un siège dans les Landes et un autre en Normandie. Ce poil était utilisé pour confectionner des sous-vêtements pour... les aviateurs ! Les avions n'étaient pas aussi confortables que maintenant, la climatisation était inconnue .



Moutons :

Les ovins ont toujours été nombreux en Bigorre. De race rustique, ils étaient nourris des refus des bovins ou de la végétation des landes : fétuque ovine, bruyère, ajoncs. Les jeunes agneaux étaient commercialisés sur le marché de Lannemezan. Plus vieux, après avoir été châtrés, ils étaient engraissés avec des glands et des châtaignes, puis vendus à la foire de Tournay.

Dans la plupart des maisons du lieu qui nous intéresse, il y avait quelques brebis toute l'année, mais, certains paysans profitaient de la pratique de la transhumance. Des propriétaires des vallées d'Aure ou du Louron avaient leurs bêtes "en montagne" pendant l'été, dans des pâturages communaux. Pour la durée de l'hiver, ils les confiaient à des habitants "du pays bas" selon une formule qui leur était chère. Le printemps venu, ils reprenaient leurs bêtes, laissant à celui chez qui elles avaient hiverné, la moitié des agneaux et la moitié de la laine.

Ce système perdura jusque vers 1970. Le passage de ces troupeaux, au printemps et à l'automne était très spectaculaire. Plusieurs propriétaires se réunissaient et regroupaient parfois près d'un millier de brebis. Les sonnailles s'entendaient à plusieurs kilomètres, les hommes et les chiens encadraient le troupeau. Un mulet ou un âne tirait une petite charette qui transportait les agneaux nés en route. Certains allaient ainsi du Plan Aragnouet jusqu'en Armagnac. Le soir venu, bêtes et gens harassés faisaient escale dans une ferme et reprenaient la route le lendemain.

Ces déplacements "à pied" ne sont plus possibles aujourd'hui à cause de la circulation automobile. Les transports des brebis se font par camions et la transhumance a perdu toute sa poésie.

Dans le courant de l'hiver, le propriétaire venait voir ses bêtes : il descendait à pied jusqu'à Arreau, prenait le train jusqu'à Lannemezan et continuait à pied. Il mangeait et couchait "chez l'habitant" et lorsqu'il remontait chez lui, il emportait souvent un ou deux litres d'eau-de-vie.

Dans les années 1970, un élevage de brebis bien conduit était très rentable. Un éleveur de Castelbajac en avait environ 250 en élevage "intensif". Un procédé permettait de bloquer le cycle des femelles puis d'obtenir une ovulation multiple. Chaque brebis donnait ainsi au moins deux agneaux par portée et souvent trois ou quatre. On laissait un agneau à la mère et les autres étaient élevés au biberon avec du lait reconstitué. Vers 1980 arrivèrent sur le marché européen, via la Grande-Bretagne, des ovins d'Australie et de Nouvelle-Zélande à très bas prix. L'élevage intensif devint moins rentable.

Vers cette époque s'implanta un élevage d'une cinquantaine de chèvres. Le lait était acheté par la laiterie de Villecomtal, filiale de Gervais-Danone. Cet organime trouva à s'approvisionner en Espagne à moindre coût et cet élevage de chèvres disparut.

En 1996, vint s'établir à Castelbajac, une personne qui avait un troupeau de brebis laitières. Elle faisait du fromage qu'elle commercialisait sur les marchés locaux. Des problèmes de santé l'empêchèrent de poursuivre cette activité.

Autrefois, il n'y avait que peu de chèvres. Elles produisaient un peu de lait pour les enfants ou pour les agneaux dont la mère était défaillante. Comme il n'y avait pas de bouc dans le village, il fallait se rendre à Lutilhous où se trouvait un élevage assez important. Pour le rentabiliser, son propriétaire se rendait à Tarbes et parcourait les rues au son d'un haubois. Les personnes intéressées, surtout les enfants souffreteux sortaient avec leur verre que le chevier remplissait au pis de la chèvre et que le client consommait tout chaud, sur le trottoir. Ceci se passait aux environs de 1900.



Cheval - Âne :

Dans chaque famille, il y avait un cheval et (ou) un âne. Montés ou attelés, ils permettaient de "voyager" jusqu'à Lannemezan, Tarbes ou même Pau. Généralement c'étaient des femelles dont les produits étaient une source de revenus non négligeables.

Pour les ânesses il y avait des baudets, soit à Lannemezan, chez "Bourtoumiou" (Vidou), soit à Burg chez "Pé-de-Boumbo" (Tujague).

Pour les juments, le Haras de Tarbes avait un dépôt d'étalons de Lannemezan. En 1937, il y avait à Houeydets, une vingtaine de chevaux.

Les "Anciens" racontaient une anecdote intéressante : L'Émir Abd-el-Kader, voulant faire à la France un cadeau "royal" envoya deux étalons arabes. "Émir" et son compagnon. L'un de ces magnifiques animaux fut envoyé au Haras de Tarbes et c'est ainsi qu'il y eut de splendides descendants d'Émir chez Matrassou, Mounet, Estugatou, Bernadoulet.

Plus rares étaient les gens qui utilisaient leurs juments à la production de mulets. C'était d'un bon rapport. Vendus à Lannemzan, aux foires des Cendres ou de Sainte-Catherine, ils étaient très appréciés par les Espagnols.

Chevaux et mulets faisaient l'objet d'une intense contrebande avec l'Espagne. Deux habitants de Houeydets se livraient à ce commerce : Pierre Martin-Matrassou ( 1838-1915) et Simon Castets-Marianchou (ce dernier épousa en 1849 une personne d'Ozon- Lanespède". Son fils, connu dans la région sous le nom de Marianchou de Lanespède continua le commerce des chevaux).

Porcs :

En principe, chaque famille possédait une (parfois plusieurs) truie. Les porcelets, on en vendaient quelques uns et on gardait celui (ou ceux) destiné à la consommation familiale. La première année de leur existence, ils étaient nourris assez chichement. Ils pâturaient beaucoup dans la journée et le soir venu, ils avaient droit à une pâtée plutôt claire, composée des épluchures et des restes de la cuisine mélangés à un peu de son. On les engraissait dans leur seconde année, lorsqu'ils avaient achevé leur croissance et étaient passés du statut de "néourigat" à celui de "passadé". Ils avaient alors droit à de grosses rations de glands, châtaignes, maïs et à un brouet de navets et pommes-de-terre que l'on cuisait dans d'énormes marmites en fonte (métaou). Ces animaux atteignaient un poids considérable, couramment 250 kilos et jusqu'à 300 et même 350 kilos. Les jambons frais pouvaient attteindre 40 kilos chacun et le lard une épaisseur de 18 à 20 centimètres.

Outre les animaux destinés à la consommation familiale, certains paysans vendaient des porcs gras. Il fallait les porter avec le tombereau tiré par des vaches, jusqu'au marché de Lannemezan, sur la "place des cochons", devenus place "du XIV juillet". Si l'acquéreur était un charcutier de Toulouse ou de Tarbes, il fallait alors porter le porc à la gare d'où il était acheminé par le train. Au pas lent des vaches, il prenait toute la journée. En hiver, la nuit était tombée depuis longtemps, lorsque le paysan rentrait chez lui.

Les races connues dans le pays étaient le porc noir dit "de Castelnau" ou le porc "commun" dit encore "armé", ainsi nommé parce que, sur un fond blanc, il avait de grandes taches noires affectant l'aspect d'une "armure".

Les "porcs de Mirande", blancs à oreilles pendantes n'étaient pas appréciés : leur chair était réputée plus fade.

Aprè 1945, les élevages de porc se développèrent. Encouragés par la Société " Sanders", quelques paysans construisirent de vastes porcheries modernes. La société fournissait les aliments, l'assistance d'un technicien et achetait les animaux. En 1996, il y a à Houeydets un naisseur-engraisseur, à Castelbajac, un naisseur, deux naisseurs-engraisseurs et quelques porcheries plus modestes.

Pendant longtemps, il fut intéressant de vendre une truie prête à mettre bas. Elle était souvent achetée par des paysans du Gers qui comptaient sur la vente des porcelets pour rentrer dans leurs fonds, puis ils engraissaient la mère pour la consommation familiale. Ces élevages "hors sol", comptent actuellement entre 50 et 10 mères.

Chiens :

Depuis 1993 s'est installé un élevage chiens avec 35 mères de race "cocker golden, cocker américain et Retriever". Il y a aussi deux chiennes "Berger allemand" à vocation "chien de garde" mais qui, accessoirement donnent quelques portées.

Chasse :

Le gros gibier : cerfs, chevreuils, sangliers, abondants pendant le préhistoire semblent avoir disparu avec l'implantation de l&apôs;agriculture qui grignota peu à peu les forêts. Toutefois, au Sud-Ouest de Houeydets, le lieu-dit "Cabiro" semble garder le souvenir de chevreuils.

Par contre, le petit gibier sédentaire : lièvres, lapins, perdrix etc... et gibier de passage : cailles, palombes, vanneaux, canards, bécases, abondaient.

Le Baron de Castelbajac avait sa "palombière" en bordure du chemin des crêtes, à mi-chemin entre ses châteaux de Castelbajac et de Montastruc. Les traces de cette palombière étaient encore matérialisées au milieu du XX e siècle par quelques gros chênes très vieux. Ils étaient les vestiges de ceux qui entouraient un terrain rectangulaire. Sur le sol soigneusement dressés, attiraient maïs et autre appât. Des pigeons, soigneusement dressés, attiraient les palombes dans ce piège et un filet les emprisonnait.

Les manants, eux, ne se faisaient pas faute de piéger le petit gibier.

Vers 1950, les sociétés de chasse ont introduit perdrix, cailles ou faisans et chevreuils. Seuls, ces derniers ont proliféré. Le "gibier à plumes", sensibles aux pecticides et détruits par les prédateurs qui, eux, pullulent (renards, fouines, rapaces), ne retrouvent pas leur densité d'antan.

Pêche :

Les Baïses étaient très peuplées de truites, écrevisses. Il y avait aussi quelques anguilles. Dans les petits ruisseaux, grouillaient goujons, vairons et truitelles car les truites remontaient ces petits cours d'eau pour frayer. La pollution de notre XX e siècle a été très néfaste à tous ces poissons. Aujourd'hui les sociétés de pêche pratiquent l'empoisonnement pour satisfaire les pêcheurs à la ligne. Les résultats sont assez décevants. Depuis la construction du lac de Puydarrieux, les hérons se sont sédentarisés. Devenus très nombreux, ils causent des ravages dans les rivières.

Une usine implantée sur le Plateau de Lannemezan est aussi cause d'une très importante pollution des rivières qui se fait sentir jusqu'à une cinquantaine de kilomètres en aval .



Flore - Agriculture :

La flore de ce territoire est évidemment la conséquence du climat et du relief et à leur image, très variée. De ce fait, l'agriculture traditionnelle se caractérisait par la "polyculture".

Il pousse spontanément beaucoup d'herbe : "graminées, légumeuses etc... qui font un excellent fourrage. Il y avait donc, autrefois, beaucoup de prairies naturelles. Elles étaient fertilisées au fumier naturel ou à la "balle de trèfle", laquelle assurait un apport d'azote. - Après une première coupe, elles étaient irriguées par l'eau des Baïses, pour celles qui étaient dans les vallées, ou par le canal de la Neste, pour celles qui étaient situées sur les crêtes. Cela permettait une seconde coupe : le regain.

Les parties du territoire les plus arides sont couvertes de bruyère, fougères, ajoncs, genêts, genévriers. Les arbustes épineux sont nombreux : ronces, églantiers, houx, prunelliers, aubépines. Les lauriers surtout laurier cerise et laurier sauce prospèrent. Ils étaient surtout utilisés comme brise-vent à l'ouest des bâtiments où on les plantait en haies bien touffues.

Les forêts de chêne tauzin "Tauzis", de hêtres "Haouas" de tilleuls "Tilhaco", étaient relativement importantes. Les châtaigniers ont trouvé un terrain favorable et se sont beaucoup développés. Leur bois a été utilisé pour les charpentes, la menuiserie, les clôtures, la tonnellerie et enfin la chauffage. La croissance d'un taillis de chataigniers est particulièrement rapide ; après abattage, la souche émet des rejets qui peuvent être exploités moins de vingt ans plus tard.

En Ardèche, on a trouvé des traces de chênes, châtaigniers et vignes fossilisés, vieux de huit millions d'année. Il est donc probable que ces mêmes végétaux sont implantés chez nous depuis la même époque.

Frènes, saules, aulnes, occupaient les parties les plus humides. Il n'y avait pas de grands conifères. Seul, le genevrier était abondant.

Le paysage sylvestre a été profondément modifié à partir de 1950 : les landes ont été défrichées et cultivées ; les feuillus ont été remplacés par des conifères dans les forêts communales. La population est donc la main-d'œuvre diminuent, beaucoup de terres, autrefois cultivées, sont devenues des friches ; elles se sont boisées anarchiquement et ne sont pas exploitées rationnellement.

Nos ancêtres pratiquaient une sage gestion de leurs forêts.

"On ne pouvait abattre qu'un centième des chênes par an, et il fallait replanter quatre petits chênes par arbre abattu. Il était impératif de laisser une réserve d'un quart, à laquelle il n'était permis de faire aucune sorte de coupe sauf cas de nécessité extraordinaire".

En cas d'incendie, on donnait parfois au sinistré du bois d'œuvre pour reconstruire sa maison.

"Pour les taillis, on pouvait couper un dixième par an en laissant seize baliveaux par arpent, pour croître en haute futaie".

La plantation de jeunes chênes donnait lieu à réunions et réjouissances. Le registre des délibérations de Castelbajac relate ainsi cet événement".

"L'An V de la République française, une et indivisible et le 23 Ventôse a été procédé par tous les habitants de la commune de Castelbajac à la plantation de jeunes chênes suivant l'usage ; chaque particulier a planté neuf chênes, ce qui fait un totale de neuf-cent-vingt-sept. Et après la plantation, les habitants ont, suivant l'usage de tout temps, fait une collation que l'agent municipal a payée avec l'argent qu'il aurait employé pour payer la main-d'œuvre à quoi ont renoncé les habitants moyennant la collation qu'on leur a fournie".

Compte-tenu des habitudes de l'époque, la collation devait consister en un repas bien copieux et bien arrosé.

L'agriculture est restée longtemps traditionnelle et "biologique". Le relief tourmenté, facteur de micro-climats, au sens étroit du terme, favorisait la polyculture. Chaque petite propriété était à peu près auto-suffisante. Les céréales cultivées de temps immémorial étaient : le seigle, le froment, l'avoine, le mil ; orge et maïs sont d'implantation plus récente ainsi que pommes-de-terre et haricots, mais, fèves, pois et diverses racines : navets, carottes, betteraves sont connus depuis très longtemps.



Amendements :

Le sol très acide était sérieusement amélioré par :

a) - L'apport de marne fournie par trois carrières qui se trouvaient sur le territoire de Houeydets : Baysolle, Anclou et Gachiot. Les cultivateurs l'utilisaient de manière empirique, n'ayant aucune notion d'analyse des sols. Une longue expérience supplétait à cette ignorance puisque les Gaulois, déjà, connaissaient l'usage de la marne. Chaque habitant avant le libre usage des carrières. Il lui suffisait de piocher. La main-d'œuvre était autrefois abondante. Pour ceux qui ne pouvaient extraire la marne eux-mêmes, il était possible de l'acheter à des "brassiers" qui faisaient ce travail pour un prix modique. Ces carrières sont abandonnées depuis la guerre de 1914.

b) - Le fumier naturel, founi par les animaux de la ferme, pouvait être utilisé tel quel ou contribuait à la confection de :

c) - "fumier artificiel". Pour ce faire, on récupérait de la bruyère, et des fougères dans les landes, les tiges de maïs, les feuilles mortes. Dans la cour de la ferme, on alternait une couche de ces végétaux et une couche de fumier. Ce mélange se décomposait pendant l'hiver et le printemps venu, tout cela était récupéré et enfoui dans les champs destinés à produire du maïs.

d) - On pratiquait généralement l'assolement triennal. La mise en jachères, les labours de printemps suivis de plusieurs passages de herse en été éliminaient les mauvaises herbes et évitaient l'emploi de desherbants chimiques.

e) - Les engrais chimiques ne furent guère utilisés qu'à partir de la guerre de 14. Ne prenant pas le précausion de faire analyser leurs sols, les agriculteurs n'apportaient pas des amendements bien équilibrés.

f) - Les apports en azote étaient assurés par des cultures de légumineuses : trèfle violet, trèfle incarnat, fèves. On épandait parfois sur les prairies de la balle de trèfle récupérée lors du battage du trèfle. Le trèfle violet était assez répandu. Utilisé comme fourrage d'appoint, ses graines étaient aussi précieuses, qu'elles étaient revendues à bon prix soit à des particuliers, soit à des négiciants en semences.

L'agriculture ne s'est mécanisée qu'à partir de 1900 et motorisée depuis 1950. Jusque là, les méthodes culturales devaient être à peu près les mêmes depuis le Moyen-Âge.

Pour labourer le sol, une charrue mono-soc (mousso) en fer succéda à l'araire en bois. Pour ameublir, des herses au bâti en bois, aux dehts en fer - plus ou moins longues - (arrachclé - alabiadé) - un rouleau lisse composé d'un tronc d'arbres traversé en son milieu par une forte tige en fer, formaient l&pos;essentiel de l'équipement du cultivateur. Ces engins étaient évidemment à traction animale ; bœufs, vaches ou ânes (mateou de castelbajac). Célestin Sireix, de Castelbajac ( 1868 - 1935), travaillait avec des chevaux. il faut préciser qu'il était allé en Amérique, puis dans la région parisienne. Il avait donc appris à travailler différemment.

La charrue réversible dite "Brabant" n'est arrivée que vers 1925. Elle permit des labours plus profonds. Avec l'arrivée des tracteurs, de fortes charrues permirent des labours très profonds. Ce fut souvent une erreur. La couche de terre arable est mince et ces labours amenèrent de l'argile en surface. Pour obtenir des rendements à peu près corrects, il fallut amender par d'importants apports d'engrais et de chaux, d'où surcroît des produits.

Foins et céréales étaient coupés à la faux ou à la faucille.

La première faucheuse mécanique arriva à Houeydets vers 1900 chez "Bourérou".

Beaucoup plus tard, vers 1935, les premières moissonneuses -lieuses firent leur apparition chez les gros propriétaires : Manautou, Finasset, Bernatas, Picagnou. Ces engins étaient assez lourds, et pour les tirer, il fallait une paire de bœufs ou deux paires de vaches.

On apportait une bonne fumure avant de semer la maïs ou de planter les pommes-de-terre. L'année suivante, on semait blé ou avoine sans complément de fumure.

Pour semer du maïs, après avoir labouré et ameubli le sol on utilisait un engin appelé "mercadé". Il se composait d'une traverse en bois portant trois palettes également espacées et adaptée à timon. Passé dans le champs en long puis en travers, il traçait un quadrillage. Plusieurs femmes avançaient alors de front : dans la poche droite, elles avaient des grains de maïs et dans la poche gauche des grains de haricots tarbais. Elles laissaient tomber trois grains de maïs et deux grains de haricots sur chaque croisillon, non sans avoir, du bout de leur sabot écarté mottes ou cailloux qui auraient pu gêner la bonne levée des plantes. Ces femmes étaient suivies par des hommes qui, à l'aide d'une "binette" couvraient les semences d'un peu de terre bien meuble. Lorsque le semis était terminé, un bon casse-croûte (généralement saucisson, confiture, pâté, pain, vin) permettait de se restaurer tout en racontant quelques histoires.

Au cours de la végétation, on buttait le maïs à l'aide d'une "arraséro" passant entre les sillons, d'abord en long, puis en travers du champ. Le nom de cet engin vient peut-être de "l'araire". La floraison du haricot tarbais s'échelonne tout au long de sa croissance. La récolte se faisait donc en plusieurs fois et c'était l'occasion pour les voisines de se retrouver. En principe, on cueillait en deux fois, la troisième cueillette se faisant en même temps que celle du maïs.

Les blés cultivés autrefois étaient des "blés tendres" à paille longue et souple, sujets à la "verse" mais bien adaptés à la région. Le pain obtenue avec le "sarragnet ou le galer" était très savoureux. La culture des variétés de "blé dur", à paille courte au rendement supérieur mais à la farine insipide s'est répandue dans la seconde moitié du XX e siècle ; certains boulangers locaux reviennent au pain de "galer" plus apprécié par la clientèle.

Les rendements en blé sont ici très irréguliers. Au moment de la floraison (Juin), il y a souvent des brouillards qui perturbent la pollinisation. Nature du sol et altitude ne sont pas favorables à la culture des céréales et nous nous sommes très loin des rendements de l'Ile-de-France.

Lorsque la population était très nombreuse, on pouvait voir dans les champs de céréales, des groupes de femmes qui arrachaient "à la main" les mauvaises herbes : chardons, ravenelles etc.

Chaque exploitant semait autrefois une petite surface de seigle, d'une variété à paille particulièrement longue et solide. Coupé "à la main" (faux ou faucille), il était ensuite pris par petites poignées puis égrené à l'aide d'un bâton sur la planche à laver en prenant bien soin de ne pas abîmer la paille destinée à lier les gerbes des autres céréales ou à couvrir des bâtiments (chaume).

Le mil, transformé en farine était utilisé pour engraisser les porcs mais lorsque le blé manquait, on en faisait aussi du pain appelé "mesturet".

Deux variétés d'avoine étaient cultivées. L'une, semée en automne (grain gris clair, paille longue), l'autre semée au printemps (grain noir et paille courte). Cette dernière variété était plus riche en farine. L'avoine servait à la nourriture des animaux et surtout des chevaux. Certaines personnes en faisaient un pain qui, accompagné de miel ou de confiture était réservé au petit déjeuner.

L'orge de printemps était peu cultivée et celle d'automne (escourgeon) n'a fait son apparition ici que dans la seconde moitié du XX e siècle.

On semait parfois un mélange blé-seigle (carrou) ou blé-avoine méteil (1/3 avoine et 2/3 blé). Dans ce dernier cas, les hormones élaborées par la germination de l'avoine favorisaient la végétation du blé et le rendement était bien meilleur.

Le lin : cultivé très soigneusement sur de très faibles surfaces, il assurait le trousseau des jeunes mariées et les besoins en linge de corps et linge de maison de chaque famille. Au début du XX e siècle, il ne fut plus filé et tissé sur place. Les usines de Nay (Pyrénées Atlantiques) pratiquaient l'échange paille de lin contre tissu, soit en se rendant à l'usine en voiture, soit par l'intermédiaire de démarcheurs qui parcouraient la campagne .



Le jardin potager :

Il a toujours eu une très grande importance : "La valeur d'une ménagère est révélée par l'aspect de son jardin" disaient les anciens.

Par son agencement il pouvait témoigner du caractère ordonné ou, au contraire brouillon de sa propriétaire. Par ailleurs, la multiciplicité des cultures pouvait faire augurer du menu quotidien, les produits du jardin se retrouvant à chaque repas sur la table familiale.

Le potager était le domaine quasi exclusif de la femme. C'était elle qui généralement maniait tous les outils même la bêche. Dans quelques familles très nombreuses et dont le jardin avait une surface relativement importante, il arrivait que le labour soit effectué par un homme avec la charrue tirée par des vaches, mais c'était assez rare.

Les allées soigneusement desherbées étaient bordées de quelques fleurs, de plantes aromatiques, (thym, persil, marjolaine, céleri, ciboule et ciboulette, romarin), de plantes médicinales (menthe, camomille), de fraisiers.

Les plates bandes voyaient la rotation de divers légumes. C'était la culture intensive, le sol étant occupé en toute saison.

La récolte des fèves et pois semés en automne débutait en Mai, en même temps que celle des pommes-de-terre "primeurs" semées en Février.

On consommait beaucoup : d'oignons et il s'en cultivait diverses variétés. Les choux cabus ou de Milan ne firent leur apparition qu'à la fin du XIX e siècle. Jusque là étaient seuls connus des choux dits "communs" d'été ou d'hiver - que l'on dirait maintenant "fourragers".

Carottes, poireau, laitues ou scaroles variées, haricots verts avaient aussi leur place.

Les tomates ne se répandirent qu'au début du XX e siècle. Avant l'introduction du haricot en France, les fèves étaient très abondantes et elles contribuèrent d'ailleurs à être appréciées. Source non négligeable de protéines végétales, on les avait longtemps cultivées dans les champs en procédant comme pour le maïs : on quadrillait le terrain et on semait deux ou trois graines sur chaque croisillon. Les jeunes plants étaient ensuite sarclés et butés avec l'araser.

Chaque Mercredi, le marché de Lannemezan permettait aux femmes de vendre volailles, légumes ou fruits de leur jardin. Les employés ou les fonctionnaires travaillant à Lannemezan, les cadres de l'usine, les hôteliers composaient une petite clientèle régulière. Pendant la "saison", hôteliers de Bagnères et de Capvern se ravitaillaient également sur le marché. De Tarbes ou Toulouse venaient des grossistes qui achetaient des quantités plus importantes. Fraises et cerises, pommes, poires ou pêches se vendaient très bien car les deux marchands de "primeurs" de Lannemezan n'avaient que deux minuscules boutiques peu approvisionnées.

Aujourd'hui, il n'y a pratiquement plus de petits producteurs de légumes. A Houeydets, seul, Lahaille-Arnauchec s'est spécialisé dans la culture maraîchère et fait les marchés de la région (Tarbes, Lannemezan, Saint-Lary etc...).

Depuis les années 50, la production de cèpes a chuté et elle ne satisfait plus que les besoins familiaux. Autrefois, en pleine saison, des acheteurs passaient dans les campagnes plusieurs fois par semaine avec un camion, et collectaient les champignons qu'ils acheminaient vers les conserveries.

En automne, une grande halle, située Place de la République à Lannemezan, voyait affluer de grands sacs de "haricots tarbais", noix, châtaignes. La vente de ces produits apportait à nos paysans des sommes conséquentes. La vente de semences de trèfle violet ou de trèfle incarnat, était aussi d'un bon profit.

Les arbres fruitiers :

Relativement nombreux et variés, ils n'étaient regroupés en un espace réservé au rôle de "verger". Ils étaient disséminés le long des talus ou dans des coins impropres à toute autre utilisation. Seuls les pommiers étaient parfois rassemblés dans une "poumérère".

Les pommiers étaient très nombreux. Les variétés locales très anciennes ont presque disparu. Ils donnaient des pommes de table : quelques reinettes, calvilles, plate-rose, gaillarde, museau de lièvre. Certaines de trè bonne conservation étaient consommées tout l'hiver, jusqu'à la floraison des pommiers, au printemps suivant. Pour les conserver, on les enfouissait dans un tas de blé ou de regain. Les fruits qui n'étaient pas destinés à la provision hivernale rejoignaient las variétés spécifiques de la fabrication de cidre : ladette, bichcouette.

En automne, il se faisait quelques hectolitres de cidre dans chaque maison. C'était plutôt la boisson des femmes.

Pour les poiriers, beaucoup moins nombreux que les pommiers, on trouvait "la poire de la Saint-Jean", variété précoce comme son nom l'indique. Plus tard, en saison et pour la provision d'hiver, on trouvait : la "Belle Héloïse" - la "Caillaoua Roudat" - Quelques autres variétés très rustiques ont résisté jusqu'à ce jour. Ces fruits étaient utilisés pour faire des confitures et parfois des "poiré".

Les cerisiers, grands arbres de plein vent faisaient le bonheur des enfants et des oiseaux. Deux ou trois variétés échelonnaient leur maturité de Mai à Juillet. Avec les cerises on faisait parfois (très rarement), une boisson fermentée.

Les pruniers étaient relativement nombreux. Les diverses variétés donnaient une eau-de-vie appréciée.

Figuiers et pêchers étaient bien représentés par de nombreuses variétés.

Il ne faut pas oublier le cognassier qui donnait d'excellentes confitures.


Les fruits sauvages :

Ils étaient abondants dans les sous-bois ou sur les talus : selon les saisons : mûres, ou prunelles - Ces deux dernières n'étaient comestibles qu'après avoir supporté quelques gelées.


Les châtaigniers :

Nous avons vu plus haut les multiples usages auxquels pouvait être consacré le bois de châtaignier : charpente, menuiserie, clôtures, tonnellerie, tanin, éventuellement bois de chauffage. Mais le châtaignier a une très grande importance en tant qu'arbre fruitier. Le sol soigneusement labouré, fumé et sarclé était planté en scions greffés qui devenaient de magnifiques arres très productifs et à la longévité impressionnante. Les fruits étaient soigneusement récoltés. Les bogues intactes étaient entreposées à l'abri de l'humisité, sous une épaisse couche de feuilles sèches. Les grains épars étaient utilisés en premier lieu. Porcs, moutons, dindons étaient engraissés avec des châtaignes. Elles constituaient pour les humains une part importante de la nourriture pendant l'hiver.

La vigne :

Elle mérite une mention toute spéciale. Arrivée dans le Midi de la France, avec les Grecs, environ cinq siècles avant notre ère, elle s'y implanta et donna un vin de qualité, se bonifiant en vieillissant dans les fûts en chêne ou en châtaignier, bien préférables aux amphores.

Les Romains répandirent la culture de la vigne dans diverses provinces de la Gaule. Lugdunum Convenarum n'étant pas très éloignée de Châtillon-en-Bigorre, il n'est pas interdit de penser que l'implantation de la vigne en ce lieu puisse coïncider avec la conquête romaine.

A priori, le Plateau de Lannemezan, avec son altitude, peut sembler impropre à la viticulture, mais c'est sans compter avec ce relief tourmenté qui crée combes ou côteaux aux micro-climats permettent la parfaite mâturation des figues et des raisins.

Jusqu'à l'offensive de Phylloxéra, vers 1850, les surfaces plantées étaient importantes. En 1830, on trouve 64 ha, 61 ares, 18 ca de vignes pour 487 hectares de terres labourables. Les plants cultivés de temps immémorial s'étaient bien acclimatisés au pays :

- En blancs : manseng, piquepoult, plant-de-dames.
- En rouges : caillaoua, tannat, folle-noire, grosse-mérille etc...

Cela donnait un petit vin fruité, au bouquet très agréable. La majorité des vignes furent détruites par le Phylloxéra et remplacées par des hybrides américains, certes réfractaires au Phylloxéra mais de qualité bien médiocre.

Ce furent d'abord, en blanc le Noha, en rouge le terras et le pouzin. Ces plants très productifs donnaient des vins alcoolisées, riches en tanin. Leur rusticité permit de les planter en des lieux moins abrités, moins accidentés, donc plus faciles à cultiver.

Un peu plus tard arrivèrent les hybrides plus complexes armemont, seybels, bacots blancs et rouges qui produisirent un vin un peu plus délicat mais qui ne valait pas le bon vieux "plant-de-dames".

Il semble, au dire des anciens, que l'arrivée des hybrides a coïncidé avec un développement des cirrhoses. Beaucoup mourraient parce qu'ils avaient "le foie détrempé" (sic) L'abus du Noha dut provoquer des "délirium-tremens", car certains l'appelaient "le vin des fous".

Les Romains avaient enseigné la culture de la vigne "en hautin". Chaque pied de vigne était planté auprès d'un tuteur qui pouvait être un arbre fruitier : pommier ou cerisier ; ou un orme. Cette méthode était réputée préserver la vigne du mildiou ou de l'oïdium.

Vers 1950, on pouvait voir encore en Barousse quelques arpents cultivés sur hautins. A Castelbajac, les châtaigniers étant très abondants, ils donnaient d'excellents échalas pour tuteurer les vignes.

Les raisins de table : chasselas, muscats blancs ou roses, malagas, "raisin de Palestine" dont les grappes atteignaient un mètre de longueur, étaient cultivés en espaliers, contre des murs bien ensoleillés (muscatèros). Les grappes de raisin cueillies à complète maturité étaient accrochées au plafond et consommées pendant l'hiver. Elles se conservaient jusqu'en février ; c'étaient alors de véritables fruits confits.

Après la seconde guerre mondiale, les méthodes de culture et d'élevage changèrent complètement. Les pâturages communaux n'eurent plus la même importance. Un vaste projet de mise en cultures de toutes ces landes fut mis sur pied au niveau départemental. De grandes étendues furent défrichées sur le Plateau, sur les communes de Lannemezan, Capvern, Avezac etc... Les agriculteurs qui le souhaitaient pouvaient prendre d'importantes parcelles en fermage. Entre 1960 et 70, Houeydets et Castelbajac profitèrent des subventions qui leur étaient offertes pour défricher les parties les moins accidentées de leurs terrains communaux, et les donner en fermage à des agriculteurs qui voulaient agrandir leurs exploitations. Peu à peu, seigle, maïs, prairies remplacèrent fougères et bruyères.

Pour l'observateur non averti, ce village, aux petites maisons, aux petits champs, aux petits troupeaux pouvaient paraître très pauvres. On n'y connaissait pourtant que peu de misère et il n'y est pas trouvé trace de famine.

La polyculture permettait des récoltes variées, échelonnées tout le long de l'année. Si les intempéries détruisaient le maïs, il y avait la possibilité d'une bonne récolte de millet. Si les pommes-de-terre étaient peu abondantes, on pouvait se rattraper sur les châtaignes etc...

Chacun étant propriétaire de son lopin, si petit soit-il, il n'était pas tenu de partager sa récolte avec un "maître" comme c'était le cas pour les "riches" régions de "grandes propriétés" et de mono-culture.

Ce statut de propriétaire a généré une mentalité assez curieuse. Dans ces villages pauvres, les gens ont souvent des mentalités de "capitalistes" avec des situations de "prolétaires". Le remembrement s'opère par des échanges "à l'amiable". Aurefois, chaque paysan cherchait à avoir des champs dispersés sur toute l'étendue de la commune. Les orages de grêle, particulièrement redoutés, ne frappent en général qu'une partie de la commune. Une partie des récoltes pouvait donc être sauvée .



L'alimentation :

Durant la préhistoire, les premiers habitants du lieu devaient se nourrir de chasse, de pêche et de cueillette. Les fruits sauvages abondaient dans les bois : fraises, mûres, myrtilles, pommes, poires, nèfles, noisettes, faine, noix, châtaignes. Les glands étaient paraît-il, la base de la nourriture chez les Ibères. Blanchis puis convenablement cuisinés, additionnés de miel ou d'aromates, cela donne un aliment très nutritif. De nos jours, on consomme couramment de la farine de glands en Turquie.

Feuilles et racines poussaient à l'état sauvage et étaient certainement utilisés : carottes, pissenlits, mâche, oseille etc...

En des temps plus proches, l'agriculture se développant, l'alimentation se rapprocha de plus en plus de ce que nous avons connu dans un passé récent.

Une économie agro-pastorale et la possibilité d'auto-suffisance, générées par un climat favorisant la polyculture, ont permis à nos ancêtres de Castelbajac se se nourrir convenablement et de ne jamais connaître de réelles famines.

Certes, comme aujourd'hui, certaines femmes n'aimaient pas ou se savaient pas cuisiner. Il y avait aussi des gens particulièrement "économes" qui vendaient leurs produits au lieu de les consommer, mais pour la majorité de la population, l'alimentation était très riche. Il faut remarquer qu'une importante activité physique exigeait beaucoup de calories. On se déplaçait à pied. Pour labourer un champ au pas des bœufs, avec une charrue monosoc, on parcourait beaucoup de kilomètres. Les gros travaux : fenaison, moisson, battages, bûcheronnage consommaient beaucoup d'énergie.


Les proteïnes animales :

Elles étaient fournies essentiellement par les porcs, les volailles, le gibier et les truites.

Les proteïnes végétales :

Elles étaient apportées par les légumeuses, très abondantes : pois, fèves, haricots.

Les graisses végétales :

Elles se réduisaient jusqu'au début du XX e siècle à l'huile de noix. Chaque famille avait ses noyers. Pendant les longues soirées d'hiver on cassait les noix qui l'on portait ensuite au moulin à huile de Galan. Vinrent ensuite l'huile d'olive, puis l'huile d'arachide et enfin, dans un passé récent, les margarines et végétalines qui n'ont pas eu un grand succés.

Lait, beurre, fromage :

Ils n'étaient pas très prisés. Paradoxalement, dans une région où les moutons étaient nombreux, leur chair n'était pas appréciée et n'entrait pas dans l'alimentation qu'exceptionnellement. Ce n'est qu'au cours de la dernière guerre que l'usage de cette viande se vulgarisa dans nos villages.



Les céréales :

Elles constituaient les aliments de base des menus quotidiens sous diverses formes : blé, seigle, mil, maïs, orge, avoine, entraient dans la confection de pain, de crêpes, de galettes ou de bouteilles sucrées ou salées.

A l'automne, telles les fourmis, il fallait emmaganiser les provisions pour affronter la mauvaise saison. Les pommes-de-terre, les haricots, le maïs et les châtaignes constituaient l'essentiel des repas avec quelques fruits : pommes, poires, raisins. Il est à remarquer que les gelées ne sont que très exceptionnellement assez fortes pour détruire choux, carottes ou navets qui passaient l'hiver en pleine terre. De même, les poules, à la seule condition d'être jeunes, n'arrrêtaient pas de pondre en hiver.

Sucre, café et chocolat ont été des denrées chères jusqu'aux environs de 1910 et il s'en consommait assez peu. Le sucre était remplacé par le miel, très répandu. Chaque famille avait ses ruches et il n'était pas rare de trouver des essaims d'abeilles dans les troncs creux de certains arbres.

Les menus quotidiens étaient assez répétitifs. Tous les jours, deux fois par jour, on servait la "soupe". A base de choux, haricots, pommes de terre, assaisonnés d'un bouquet garni, d'un hachis de lard salé et d'ail, de confit d'oie, de canard ou de porc, c'était un plat complet. On mettait dans la soupière de fines tranches de pain et on les couvrait de bouillon. Les légumes et la viande étaient servis séparément.

Lorsque la cuisinière manquait de temps pour préparer le repas, elle faisait un "tourrain". La recette en est simple : faire revenir des oignons dans de la graisse d'oie ou de canard, mouiller avec de l'eau. Ajouter sel, poivre, bouquet garni. Plonger dans ce bouillon, un morceau de confit afin de le réchauffer et de le dégraisser. Lier avec des œufs battus et verser sur des tranches de pain.

Les hommes faisaient habituellement "chabro". Cela consistait à laisser un peu de bouillon au fond de l'assiette et à y ajouter un verre de vin.

Au menu du soir, il y avait très souvent des pommes-de-terre dites "à la poele" ou "à l'étouffé". Pour ce faire, on mettait dans une poêle : de la graisse, des pommes-de-terrre coupées en très fines lamelles, sel, poivre, persillade. Il fallait laisser cuire à couvert et à feu très doux en remuant très souvent. On pouvait au dernier moment ajouter des œufs battus. On servait avec une salade ou des cornichons au vinaigre.

Les ragoût de haricots (genre cassoulet) ou haricots rouges longuement mijotés avec du vin rouge, des abattis de volailles, un talon de jambon etc... dans un pot en terre (oulo), sur les braises ou au four, étaient courants.

En hiver, on mangeait beaucoup de châtaignes grillées ou bouillies. Les enfants partaient souvent à l'école , les poches bourrées de "péréquos" : châtaignes cuites à l'eau dans leur peau.

La farine de maïs tenait une grande place dans l'alimentation locale. Versée en pluie sur du lait bouillant sucré, aromatisé d'une feuille de laurier-sauce ou de laurier-cerise, c'était le régal des enfants et souvent réservé au repas du soir (gaudines).

Une spécialité bigourdane, le "pastet", était très prisée. Dans une cocotte en fonte, posée sur des braises bien incandescentes, il faut mettre la farine de maïs et remuer à la spatule jusqu'à obtention d'une teinte "noisette". On arrose alors de bouillon chaud en remuant énergiquement, on rectifie l'assaisonnement. La torréfaction donne à la farine, un goût particulier et très apprécié. La qualité de cette préparation dépendait surtout de la qualité du bouillon de garbure, ayant servi au "mouillage". On servait cette bouillie épaisse dans des " écuelles". Elle remplaçait parfois le pain. On la couvrait de soupe ou, encore mieux de daube. Là c'était un vrai régal.

Lorsqu'on tuait le cochon, on faisait du boudin. Pour cela on mélangeait sang, viande, oignons bien revenus et des aromates. Cet appareil était introduit dans des boyaux, mais on en gardait un peu au fond de la bassine pour faire les "micos". Pendant que le boudin cuisait dans un bon bouillon de légumes, on façonnait des boules (micos), avec un mélange de farine de blé, de farine de maïs et ce qui restait de la préparation pour boudin, non sans avoir rectifié l'assaisonnement avec ail, épices, sel et poivre.

Les boudins étant cuits, on les posait sur de la paille pour qu'ils s'égouttent et on les remplaçait dans la marmite par les " micos " qu'on laissait pocher lentement dans l'eau de cuisson du boudin. Lorsqu'elles étaient cuites, on les posait sur de la paille et on versait en pluie dans cette eau de cuisson, de la farine de maïs et un peu de farine de blé, jusqu'à bonne consistance. C'était la " pasto tripado ".

Après cuisson du confit, il reste au fond du chaudron un jus saléet un peu de graisse. On ajoutait un peu d'eau, et là encore farine de maïs et de blé donnaient la "pasto grasso". Refroidie et coupée en tranches, elle était poêlée ou grillée et parfois saupoudrée de sucre.

Ces diverses préparations étaient plus ou moins savoureuses selon le "tour de main" de la cuisinière. Elles étaient toujours hautement caloriques et permettaient d'affronter les températures les plus rigoureuses.

Les paysans se levaient tôt. Il fallait nourrir les animaux qui allaient assurer une journée de travail. Au lever, les hommes buvaient généralement un verre de café et pendant le repas des bœufs, ils "déjeunaient". La miche de pain pouvait accompagner des charcuteries : jambon, pâté, saucisson, ventrêche etc..., omelette aux pommes de terre. En été, ce pouvait être des tranches de jambons poêlées avec des oignons et des tomates. Évidemment de solide "petit déjeuner" était arrosé de vin. Dans certaines maisons, le vin blanc était réservé à ce repas matinal.

Il se consommait beaucoup d'oignons, soit cuits, soit crus : à la vinaigrette ou à la croque-au-sel.

Les boissons :

En 1830, il y avait sur l'ensemble du territoire Castelbajac-Houeydets près de 65 hectares de vignes. On buvait donc beaucoup de vin. Il avait un bouquet délicat mais était peu alcoolisé. On buvait aussi du cidre et de la "piquette". Cette boisson était faite à partir de marcs pressés de raisins ou de pommes. On les couvrait d'eau et après quelques jours de macération, ils étaient pressés. Cela donnait une boisson aigrelette, très faiblement alcoolisée et qui ne se conservait pas très longtemps. On la consommait pendant l'hiver. Elle était surtout destinée aux femmes et aux enfants.

A partir du marc de raisin, on faisait aussi du "vin de sucre" en ajoutant de l'eau et du sucre (chaptalisation). Cela donnait une boisson plus ou moins agréable selon les proportions des composants.

Le distillateur ambulant passait dans chaque commune, avec son alambic, pour traiter les marcs de pommes ou de raisins, parfois du vin ou quelques fruits : prunes, pêches, figues.

Il se consommait de l'eau-de-vie "nature", mais les ménagères faisaient quantité de "liqueurs maison" : eau de noix, cassis, ratafia etc...

Certes, il se consommait beaucoup d'alcool sur place, mais nombre de producteurs en vendaient une partie. Le vin (auquel les plus malins mélangeaient du cidre) était acheté par les habitants de lieux peu éloignés mais dont l'altitude interdisait la culture de la vigne.

Les eaux-de-vie étaient très recherchées par les habitants des vallées pyrénéennes. Cela donnait lieu à une petite contrebande. La route départementale nº 17 a été, jusqu'à un passé récent, un important lieu de passage pour les producteurs du Gers qui écoulaient leur eau-de-vie vers la Vallée d'Aure. Pour le vin, les barriques étaient cachées dans les chargements de paille ou de foin que les bergers achetaient pour l'hiver. L'eau-de-vie et l'Armagnac se logeaient facilement dans le bouble fond des voitures à cheval qui se rendaient au marché de Trie-sur-Baïse. Paysans et camelots s'y rencontraient et quelques relais astucieusement choisis permettaient de déjouer la surveillance de la police. Il y avait un de ces relais dans un petit bosquet sur la commune de Houeydets .



Friandises :

Chocolat et bonbons étaient chers et souvent remplacés par des sucreries "maison".

La fabrication de l'huile de noix laissait un résidu (tourteau) qui, mélangé à du sucre et à du miel, donnait quelque chose de comparable au "turron" espagnol.

Il y avait aussi les pâtes de coings, les confitures classiques à base de sucre et de fruits, et, surtout, le "raisiné", confiture sans sucre. Au moment des vendanges, on mettait dans un grand chaudron, du jus de raison qu'on faisait bouillir jusqu'à réduction de moitié. On remplaçait alors le volume évaporé par des fruits de saison : poires, pêches, figues et on laissait cuire à petit feu jusqu'à bonne consistance. La confiture était alors versée dans des "écuelles" qui passaient vingt-quatre heures dans le four à pain. Convenablement couvertes, elles pouvaient se conserver très longtemps.

Les pâtisseries locales étaient essentiellement : les crêpes, les beignets divers, les tourtes (proportions du 4/4 additionné de levain), les masepains et les "gâteaux au fers" (sortes de gaufres).

Les parfums les plus utilisés pour ces pâtisseries étaient l'eau de fleur d'oranger et l'eau-de-vie .



Conservation des aliments :

Tels les fourmis et les abeilles, nos ancêtres, après une chasse fructueuse ou une récolte abondante, durent éprouver le besoin de faire des "provisions" pour affronter la mauvaise saison ou des périodes de disette.

Il ne semble pas que le "boucanage" ait été utilisé. A Castelbajac il n'est pas resté dans la tradition locale de recettes de charcuterie fumée, comme c'est le cas, par exemple, en Barousse. Le salage des viandes est certainement une pratique très ancienne. L'engraisssement des animaux : porcs, oies et canards, semble un usage antérieur à l'occupation romaine. L'abondance de graisse permettait de confire diverses viandes : porcs, oies, canards, lapins, poules, dindons, depuis bien des siècles. Il arrive aussi à quelques voisins de se partager un veau ou une vache et d'en conserver la viande dans la graisse.

Les légumes secs : haricots, pois, fèves ne posaient aucun problème de conservation. Le charançon du haricot ne fit son apparition qu'au milieu du XX e siècle.

Pour les céréales, il était recommandé d'avoir la récolte d'une année en réserve pour ne pas être pris au dépourvu par une année d'intempéries et surtout de grêles.

Les choux, carottes et navets pouvaient rester en terre, les gelées d'hiver n'étant jamais assez fortes pour les détruire.

Les poules continuant à pondre en hiver, il n'était pas utile de conserver des œufs, comme cela se pratiquait dans bien des régions.

La pratique de la stérilisation atteignit nos villages au début du XX e siècle. Les récipients utilisés étaient de solides bouteilles champenoises ou des bouteilles à bière. On conserva d'abord des tomates réduites en purée, des petits pois et des haricots verts. L'usage des bocaux ne se généralisa qu'après la seconde guerre mondiale. Chaque maîtresse de maison rivalisa alors de savoir-faire pour conserver fruits, légumes, viandes ou plats cuisinés.

Avec la vulgarisation du congélateur - vers 1960 - 1965 - méthode de conservation et par conséquent mode d'alimentation changèrent complètement.




           



[Plan du site passion-bigorrehp.org]



[Commune de Castelbajac.]
[Généralités sur les Communes]
[Sommaire]



Chacun peut apporter son aide concernant les monographies de nos jours des communes de la Bigorre.

Entraide apportée par :

- © Madame Marthe Delas
.

© Marie-Pierre MANET





Bookmark and Share